L’entrepreneur du numérique assume son intervention à la Convention de la droite le 28 septembre. Explications.
J’ai vu le vrai visage de l’intolérance…
… et il ne ressemble pas à ce que j’imaginais. Depuis ma participation à la Convention de la Droite le 28 septembre dernier, je suis souvent questionné, de temps en temps critiqué et parfois même invectivé. J’ai tenté de répondre individuellement à chacun jusqu’à ce qu’un ami que je connais depuis vingt-cinq ans refuse de me serrer la main lors de la célébration religieuse du nouvel an Juif, au cri de « retourne chez Le Pen ». J’ai instantanément compris l’ampleur du lavage de cerveau qu’avaient subi nos concitoyens ces trente dernières années mais aussi l’hypocrisie dans laquelle certains se complaisaient. J’ai finalement décidé de répondre plus globalement à l’ensemble de mes détracteurs au travers de cas néanmoins personnels.
Je commencerais par toi, mon ami, celui que j’appelle souvent mon frère. Tu n’as pas hésité à qualifier l’événement de phase préparatoire au 4ème Reich, rien de moins. Toi qui nous a abreuvés pendant des jours sur Facebook de ton pèlerinage à la Mecque, tu avais l’air de nager dans le bonheur en Arabie Saoudite. En même temps, on te comprend car, nos concitoyens de confession chrétienne comme les juifs comme moi, nous n’avons pas le droit de mettre un pied dans ce qui semble être un très joli lieu chargé d’histoire. Où est la cohérence dans tout cela ? Tu aurais souhaité que je boycotte un événement politique majeur au motif que s’y trouvaient quelques personnes que tu qualifies arbitrairement de racistes mais dans le même temps, tu foules le sol d’un pays qui me considère à moi, ton frère humain, comme un singe parce que juif. Tu as le droit d’être en colère mon ami, mais dans ce cas, viens te rendre compte par toi-même et t’exprimer à la tribune comme ont pu le faire Raphaël Enthoven ou Elisabeth Levy peu soupçonnables de cautionner une réunion de fascistes.
Tu as préféré condamner avec beaucoup de véhémence et aussi un peu d’approximation une manifestation à laquelle tu n’as assisté qu’au travers de BFMTV ou de LCI, ces chaînes que tu accuses par ailleurs régulièrement de désinformation quand ellent traitent des sujets ayant trait à l’islam. Ta colère était telle que tu as d’ailleurs manqué à la plus élémentaire des prudences en appelant sur facebook, je cite, tes : « amis juifs et Franc-Maçons qui se reconnaîtront » à ne pas cautionner par leur présence un tel événement. N’importe quelle personne capable de résoudre une équation à une inconnue (niveau CM2) aura vite fait de comprendre de qui tu parlais.
Je poursuivrai avec toi ma cousine. Toi qui ne parles jamais de politique, dimanche, tu étais sous le choc. De Tel Aviv, où tu viens de voter Benjamin Netanyahou, tu m’as sermonné pour ma présence dans la même salle que Marion Maréchal. A l’instar de l’ami cité précédemment, tu as condamné sans rien savoir de ce qu’était cette convention ni pourquoi j’y étais. Tu ne m’as pas questionné, tu m’as jugé sans chercher à comprendre tout comme l’idiot qui a refusé de me serrer la main. Oui, en fait, pour être précis, tu as suivi l’événement via les médias, ceux que tu vilipendes à longueur de temps pour la partialité dont ils font preuve lorsqu’ils traitent du conflit israélo-palestinien. Je ne me focalise pas sur toi ma cousine, mais je m’adresse à travers toi à certains de nos concitoyens dont le motif principal de leur Alya a été l’islamisation supposée de la France. C’est marrant mais j’ai déjà entendu ça quelque part, ah oui précisément dans la bouche de ceux qu’on me reproche d’avoir côtoyé l’espace d’un après-midi. Vous, mes amis français d’Israël, vous encensez Trump et Bolsonaro à longueur de posts, vous votez Netanyahou en hurlant aux orfraies quand la presse française le qualifie d’extrême droite mais perdez soudain toute forme de rigueur intellectuelle quand il s’agit de politique française. En France aussi, il existe comme chez vous maintenant, des gens qui souhaitent défendre leur territoire, leurs valeurs et leur identité pluriséculaire, cela ne vous rappelle rien ? Ils veulent défendre, certes parfois maladroitement, ce beau pays que vous avez choisi de quitter quand moi j’ai décidé de rester pour continuer à y construire. Je n’ai pas jugé votre choix, ne jugez pas le mien. Il est temps de remettre un peu de sérieux, de raison et de cohérence dans tout ça.
Alors pourquoi j’y étais ? Afin d’être didactique, je répondrai, vous me le pardonnerez, de manière un peu mécanique :
- J’ai accepté l’invitation car j’appelle depuis des années de mes vœux à l’unité de la droite républicaine, du centre libéral à la droite nationale. Une droite décomplexée et assumée. Je dénonce depuis toujours l’hypocrisie et le cynisme que représente l’ostracisation du Front National par les autres partis politiques. Ce parti que j’ai toujours combattu par les idées a clairement été instrumentalisé, ce qui était facile au regard de la personnalité de son fondateur. Jamais je n’ai envisagé de le rejoindre, mais jamais non plus je n’ai adhéré à cet hypocrite cordon sanitaire.
« Mettez-vous à la place du Français qui gagne avec son épouse quinze mille francs, qui habite à la goutte d’or où j’étais il y a quelques jours avec Alain Juppé et qui a en face de chez lui une famille africaine…., si vous ajoutez à cela le bruit et l’odeur » Je vous épargne la totalité de la citation car vous l’aurez reconnu. Elle vient de celui qui a décidé de ce cordon sanitaire… Feu Jacques Chirac !
Ces derniers jours, le Président Macron a lui-même repris la quasi-intégralité des thématiques développées depuis des années par la FN devenu RN, sentant que le sujet de l’immigration devenait plus que prégnant. Je citerais volontiers aussi François Hollande qui dans le livre de Gérard Davet et Fabrice Lhomme, « Un Président ne devrait pas dire ça », livre une vision de l’immigration, de l’islam et de l’identité que Le Pen père et grand-père ne renierait pas. Je cite : « …il y a des choses qui les (les Français) taraudent, ils arrivent dans un train, ils voient des barbus, des gens qui lisent le Coran, des femme voilées… » Il y parle aussi de « l’insécurité culturelle » qu’il affirme être une réalité. Il ajoute : « Je pense qu’il y a trop d’arrivées, d’immigration qui ne devrait pas être là » etc… Un chapitre entier de propos pour lesquels un Le Pen ou un Hortefeux aurait été largement condamné.
Alors oui je l’affirme, ce cordon sanitaire est une hypocrisie qui a morcelé la droite (c’était l’objectif et le piège) et radicalisé tous ceux qui, tout en étant sensibles aux thèses de la droite nationale, n’avaient aucune affinité avec le fascisme, le racisme et l’antisémitisme revendiqués et assumés de Jean-Marie Le Pen. Le vote FN a longtemps exprimé une souffrance qui, même si elle saute aux yeux de tous aujourd’hui, continue à être niée. Ce cordon sanitaire associé à un mode de scrutin brutal a été un pur déni de démocratie. A tel point que les communistes qui n’ont rien renié de l’idéologie aux cent millions de morts, celle de Mao, Staline et Pol Pot, ont eu pendant longtemps bien plus d’élus que le FN alors qu’ils ne représentaient plus rien électoralement. Ostracisés mais néanmoins jamais interdits, preuve si c’était nécessaire de l’immense hypocrisie qu’a représentée pendant des décennies cette politique à laquelle il est temps de mettre fin.
- Je m’y suis rendu car il n’est pas question que je laisse à des gens que je considère comme trop radicaux la main sur une telle initiative. Je ne crois pas du tout aux gesticulations verbales mais je pense que le meilleur moyen d’influencer un mouvement, c’est de l’intégrer. Oui cette convention était imparfaite car beaucoup trop orientée sur des thèmes identitaires et sur l’islam. Dans une totale liberté, à peine hué et beaucoup applaudi, Raphael Enthoven a étrillé ceux qui l’invitaient. Imaginez seulement si une personne de droite avait osé une telle impertinence à la fête de l’Huma. Il n’en serait pas ressorti entier, Jean-Paul Delevoye qui y a évoqué la réforme des retraites pourrait en témoigner.
Je vous demande donc : de quel côté est l’intolérance ? Elisabeth Lévy, remarquable dans sa harangue contre les amalgames, Laurent Alexandre, Laurent Obertone et quelques autres encore, dont moi-même, sommes venus pour parler librement et avons pu le faire. Nous avons tous néanmoins un point commun. Nous avons perdu des amis de ce fait. Enthoven a même commencé son intervention en expliquant cela. Alors je vous le demande une deuxième fois : dans quel camp est l’intolérance ?
- J’y suis allé ensuite car je crois profondément au dialogue et que je souhaitais me rendre compte par moi-même de ce qu’était cette Convention. La thématique sur laquelle je suis intervenu, « fiscalité française : un enfer pavé de bonnes intentions » était importante à porter. Je ne regrette rien. L’auditoire d’un excellent niveau a su apprécier la variété des intervenants. La presse a focalisé sur Eric Zemmour occultant totalement tout le reste y compris les débats d’excellente facture.
- Et enfin car sur un plan plus philosophique, je pense que le refus des amalgames doit s’appliquer à tous. Un jour, pour condamner les odieux amalgames dont faisaient l’objet les musulmans, j’ai publié une tribune dans le nouvelobs.fr. Elle s’intitulait « pour sauver la République, cette focalisation sur l’islam doit cesser ». J’y ai écrit : « je refuse de condamner un homme pour les fautes d’un autre, fût-il son frère ». Eh bien de la même manière, je refuserai toujours de condamner une femme, pour les fautes d’un autre, fût-il son grand-père. Concernant Marion Marechal, et même si je suis loin de partager toutes ses idées, au nom de quoi, la condamnerais-je ? Nos désaccords ? Quand on n’est pas d’accord, on ne condamne pas, on dialogue, certains semblent l’avoir largement oublié. J’ai pour ma part, très peu de respect et de considération pour ce que le regretté Pierre Desproges appelait « le petit tribunal du peuple ».
« Quand l’homme montre la lune, l’imbécile regarde le doigt ». Depuis près de quarante ans, les dirigeants successifs de ce pays l’ont laissé sombrer. Malgré un taux de prélèvements obligatoires parmi les plus hauts au monde, un taux confiscatoire, spoliateur, dissuasif et punitif, aucune des missions de l’Etat n’est correctement menée. Education Nationale en berne, hôpital public au bord de l’explosion, Défense Nationale incapable de mener correctement ses missions, Police et Justice dans un état misérable (dixit Corinne Lepage). Tout cela dans un climat sécuritaire et social délétère. Chômage de masse structurels, déficits des comptes publics, déficit des comptes sociaux, explosion de la pauvreté, je pourrais continuer cette liste presque à l’infini. Alors pour se dédouaner et plutôt que d’avoir enfin le courage politique d’agir, les gouvernements qui se sont succédés ont préféré stigmatiser ceux des Français qui souffraient le plus et le parti qui tente de les fédérer. Voilà pourquoi le FN a été pendant des années le chiffon rouge de l’incurie politique française.
Alors oui, il y a en France une montée du racisme et de toutes les formes de rejet mais à qui la faute sinon à ceux qui ont mis par carriérisme, électoralisme et parfois incompétence le pays dans cet état ? Ils ont distribué sans compter des milliards d’argent public en menant une politique sociale de redistribution improductive. N’importe quel étudiant en première année d’économie aurait pu leur dire que mener une politique de soutien à la consommation quand on ne produit quasiment plus rien, c’est suicidaire. Suicidaire mais démagogique. Et ensuite ils osent accuser les autres de populistes. Mais ce sont eux les populistes.
Aujourd’hui, la convention de la droite a vocation à se poursuivre comme un espace libre de dialogue à droite et demain peut-être un instrument de reconquête du pouvoir, une alternative destinée à permettre de remplacer les dogmatiques – populistes au pouvoir depuis des décennies par des réalistes – pragmatiques.
Quant à l’intolérance donc nous sommes accusés, de quel camp vient-elle en réalité, je vous le demande encore ?
Je reprendrai en conclusion cette citation de Roberto Benigni : « Pour le fanatique, il y a toujours deux opinions possibles, la sienne et la mauvaise, ceci est le point de vue du fanatique ». Après les réactions des « progressistes » suite à la Convention de la droite, je sais désormais qui sont les fanatiques, et ce ne sont pas ceux qu’on imagine.
Fabrice Haccoun
Entrepreneur du numérique