Opinion Paris 2024
14H58 - lundi 24 juin 2024

La marque de fabrique Paris 2024 ! Dans les yeux de Paris 2024, la chronique #40 de Frédéric Brindelle

 

La machine marketing tourne désormais à plein régime. Malgré le vide abyssal creusé par la dissolution dans les perspectives économiques de nos entrepreneurs, les équipes de Paris 2024 s’activent pour rentabiliser les investissements colossaux de la France.

 Gagner de l’argent, c’est maintenant !

 Souvent qualifiés d’évènement « Coca cola », les Jeux Olympiques vendent, tout, à tout le monde. Des droits télé, aux concepts d’hospitalité en passant par les mascottes, les souvenirs, les supports culturels, les tenues sportives avec leurs déclinaisons de drapeaux… Tout se vend.

 Paris 2024 va de son côté, encore plus loin : rien ne se perd, rien ne se crée tout se transforme. 1,2 million d’équipements sportifs sortent des ateliers créatifs de reconditionnement de nos entreprises modèles. Toute leur production se pare des couleurs de Paris 2024. Plus l’objet arbore son identification plus sa valeur décolle. Les experts de la contrefaçon trépignent dans leurs starting-blocks. Les douanes affutent leurs contrôles, seuls les franchisés, sponsors, détenteurs officiels accèdent au rentable pot de confiture. Ils ont payé cher. Ils escomptent un retour sur investissement.

Le volant de badminton, la serviette du tennisman, le mur d’escalade, le ballon de beach-volley, les poteaux des buts de hockey sur gazon, le bidon du cycliste ou encore la piste d’athlétisme du Stade de France… Tout sera estampillé aux couleurs et visuels de l’évènement. Autant d’objet à la vente ou à la revente !

 

12 boutiques officielles ouvrent leurs portes sur tout le territoire Français, dont un mégastore d’environ 1 000m² à proximité des Champs-Élysées. Dès jeudi, des millions de visiteurs vont se ruer jusqu’à la mi-septembre sur les fameux mille produits dérivés référencés.

L’organisation (COJOP) ambitionne les 100 millions de ventes pour un gain d’environ 120 millions d’euros. Des gains utilisés pour financer le fonctionnement des Jeux. Malgré la pléthore d’enquêtes sur l’enthousiasme modéré des français pour leurs Jeux Olympiques, les ventes décollent de façon vertigineuse. 30 à 40% des objectifs de ventes sont d’ores et déjà atteints. Les Phryges, mascottes controversées (c’est la règle pour chaque création en France), s’arrachent avant même que les millions de visiteurs étrangers aient déferlé dans la capitale ou dans les villes hôtes de compétitions. Le Laotien, le Guinéen, le Croate, le Colombien… repartiront avec leurs souvenirs. Aucun papa n’envisage un retour à la maison sans un Phryge  que chacun de ses enfants conservera des années. Aucun supporter n’imagine repartir sans son lot de fétiches immortalisant son périple olympique. Les prix s’affichent sur une large gamme, pour toutes les bourses, à partir de 3 euros pour les produits dérivés basiques à 1000 euros pour une pièce en or tirée à 2024 exemplaires.

T-shirts, casquettes, puzzles, bijoux ou encore boules à neige, composent la liste des 8 000 produits dérivés.

Edouard Bardon, directeur licences et retail de Paris 2024, fonctionne à la manière d’un athlète, stimulé par les records. Il envisage de pulvériser celui de ses prédécesseurs : « Londres 2012 a vendu environ un million de peluches de sa mascotte. C’est considéré comme un record. Je suis certain que nous allons passer ce chiffre assez facilement avec les Phryges. L’affiche officielle fonctionne très bien également ».

 

4 000 références d’articles d’équipements sportifs accompagnent le Barnum. Presque 250 fournisseurs appartiennent au « carré VIP » des officiels. Soit, ils participent au programme « TOP » du Comité International Olympique (ces multinationales rayonnent dans le monde entier) soit ils intègrent le programme Premium, Officiels ou Supporters. On retrouve dans ce cas-là des leaders sur le marché national, reconnus pour leur savoir-faire à la Française.

Leur contribution peut être financière ou technique, à travers la fourniture de produits et de services. 

La signature visuelle de Paris 2024 conditionne la réussite médiatique de la compétition. Tout se décline avec le “look” des Jeux sous le contrôle des Fédérations Internationales et de l’OBS (Olympic Broadcasting Services), qui assure la production des images des épreuves sportives pour chaque édition des Jeux.  Les sites de célébration, de compétition, les villes hôtes se vêtent de l’identité graphique, composée de 3 couleurs majeures, le bleu (19 sites), le vert (13 sites) et le violet (11 sites). A partir de la couleur principale de chaque site, l’ensemble des équipements sportifs est décliné en utilisant les motifs et symboles du “look” des Jeux (pois, rayures), des éléments de la marque Paris 2024, du pictogramme de la discipline, le tout unifié par une touche de rose.

Un exemple traduit bien l’enjeu mémoriel de ce travail visuel. Nos descendants visionneront au siècle prochain les exploits des athlètes de Paris 2024. Ils identifieront leurs performances grâce notamment à la piste violette d’Athlétisme du Stade de France, une première dans l’histoire. Auparavant, les coloris alternaient entre l’orange et le bleu.  L’extérieur des virages seront colorés également de gris, une référence historique à la piste cendrée utilisée à Paris en 1924. Au premier coup d’œil sur un document, chacun associera automatiquement cette piste caractéristique aux Jeux de Paris 2024.

 

Enfin, un autre acteur incontournable déferlera prochainement dans les kiosques : le programme officiel des Jeux olympiques. Les collectionneurs du monde entier s’arrachent ce guide pratique et historique de chaque édition pendant les décennies suivantes. D’abord utilitaire, il devient « collector ». Aujourd’hui, ce document de 228 pages coûte 10 euros. En 2124, le prix aura peut-être été multiplié par cent.

L’anniversaire de mon vieil ami André réunissait ce week-end des dizaines de convives. A l’ouverture des cadeaux, une fois les bougies soufflées, le célébré livra son plus beau sourire : 2 cadres blancs, avec les affiches officielles de Paris 2024 !

Chacun de vous pourrait envisager de choyer son enfant brillamment diplômé avec un souvenir des Jeux en guise de félicitations. Et c’est ainsi sur l’ensemble de la planète.

 

Mystiques Jeux Olympiques qui génèrent tant de fric ! Que pour nos entreprises phobiques, se rassurent en cette période de crise politique, la farandole marquetée rapplique, elle pourrait leur réserver un déclic… économique !  

 

Frédéric Brindelle
Journaliste, chef de rubrique « Opinion Paris 2024 »