Opinion Paris 2024
12H34 - jeudi 1 août 2024

La Seine, au cœur des jeux de Paris 2024 et dans les yeux de Mathilde Chardon

 

En décembre 2020, le comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques avait surpris tout le monde en annonçant que certaines épreuves auraient lieu dans la Seine. L’année suivante il fut révélé qu’une partie de la Seine se transformerait en scène géante pour la cérémonie d’ouverture des jeux.

Beaucoup de Parisiens, habitués à se promener le long d’une eau aussi grise que les toits de la ville, doutaient de cette possibilité et craignaient que les 1,4 milliard d’euros investis dans ce projet ne soient qu’un gâchis. La baignade dans la Seine avait été définitivement interdite en 1923 en raison de la navigation fluviale et de la pollution. Le retour de la baignade avait été promis en 1988 par Jacques Chirac, mais sans succès.

 

Le premier défi a été relevé le vendredi 26 juillet 2024, malgré des cordes de pluie, des milliers d’athlètes ont défilé à bord des mythiques bateaux parisiens sur les 6 km de la Seine, traversant le cœur de Paris sous les yeux de centaines de milliers de spectateurs. Ce choix inédit de localisation a permis d’intégrer les jeux au cœur même de la ville de Paris, le parcours longeant Notre-Dame, le Louvre, et la Tour Eiffel, avant de terminer au Trocadéro.

Le deuxième défi de taille bien plus importante était de rendre l’eau de la Seine baignable. Un défi qualifié complètement fou pour beaucoup et qui fut parsemé de rebondissements, laissant le public et les athlètes dans l’incertitude jusqu’aux derniers instants. Effectivement, les athlètes n’ont pas pu s’entraîner à quelques jours des épreuves, car “ les niveaux de qualité de l’eau (…) ne présentent pas les garanties suffisantes ” suite aux fortes pluies qui se sont abattues sur Paris notamment lors de l’ouverture des jeux. 

Pour rétablir la baignade 101 ans après son interdiction, le projet a commencé il y a 8 ans. Le plan d’assainissement de l’artère parisienne intitulé “plan baignade” a été lancé en 2016 par la ville de Paris en vue des jeux de l’été 2024 et avec l’objectif de rendre la baignade accessible à tous pour l’été 2025. Ces derniers mois, le projet était au cœur de toutes les discussions. Malgré la baignade de la ministre des Sports et des Jeux olympiques, Amélie Oudéa-Castéra ou bien de la maire de Paris, Anne Hidalgo, beaucoup s’inquiétaient de la couleur marron de l’eau et ne comprenaient pas l’entêtement des Français concernant ce projet. 

En réalité, une eau bleu azur n’est pas nécessaire pour assurer la baignade, ce qui compte, c’est le seuil de bactéries. Plusieurs facteurs peuvent impacter ce dernier, la température de l’eau, le soleil, ou bien la pluie. Le plus gros problème restant les eaux usées qui peuvent se retrouver dans le fleuve. Le but était donc de stopper le déversement de ces eaux dans la Seine. Plusieurs solutions ont alors été mises en place comme la récupération de l’eau de pluie afin d’éviter que les égouts et les stations d’épuration ne débordent dans la Seine. Pour cela, des citernes d’eaux pluviales ont été créées afin de pomper et reconduire cette eau vers les stations d’épuration. Le plan comprenait aussi la connexion de logements et des bateaux présents sur la Seine au réseau d’égouts afin de ne plus rejeter leurs eaux usées dans la future zone de baignade. Dans les stations chargées de nettoyer l’eau, de nouvelles technologies ont été ajoutées afin d’être encore plus efficaces. 

Verdict ? 

L’épreuve de triathlon masculine devait avoir lieu le 30 juillet, mais les seuils ont forcé le premier plan de secours à entrer en action et l’épreuve a été déplacée au lendemain. Les résultats de la qualité de l’eau sont tombés durant la nuit et ils étaient bons ! Hier matin, sous les encouragements d’un large public français, les athlètes masculins comme féminins ont bien pu plonger dans l’eau parisienne sous le pont Alexandre III. Tous les efforts de ces dernières années ont été récompensés par le retentissement de la Marseillaise avec la victoire de la Française Cassandre Beaugrand puis par la médaille de bronze de Léo Bergère. 

Les épreuves du marathon de natation et paratriathlon devraient elles aussi avoir lieu dans la Seine dans les semaines à venir. 

Les efforts ne se stopperont pas, comme l’a déclaré Pierre Rabadan, l’adjoint au maire chargé du sport. “Notre objectif est un héritage olympique” et des points de baignade devraient être à la disposition de tous en île de France dès l’été prochain. 

Les jeux de Paris 2024 ont ainsi été l’accélérateur d’un projet rêvé depuis longtemps. Ils ont aussi permis d’intégrer la Seine comme élément central des festivités et de renforcer la beauté de ce symbole parisien à travers le monde. Il ne reste plus qu’à attendre l’été prochain pour s’assurer que la Seine soit toujours baignable et peut-être témoin des premiers barbotages des prochaines générations de nageurs olympiques.

 

Mathilde Chardon, Journaliste Rubrique Opinion Paris 2024