Opinion Amériques Latines
09H15 - samedi 5 octobre 2024

Tarsila do Amaral, une anthropophage brésilienne au Musée du Luxembourg à Paris. L’actu culture des Amériques latines, par Laurent Tranier

 

L’Amérique latine est de retour. L’éclipse n’en était pas vraiment une, tant la musique, la littérature, le cinéma, en réalité la culture et l’art de vivre latinos sont très présents en France, et pas seulement à Paris. Qu’y a-t-il de commun entre l’exposition « Mexica, des dons et des dieux au Templo Mayor » qui a illuminé l’été du Musée du Quai Branly Jacques Chirac et celle consacrée à « Tarsila do Amaral, Peindre le Brésil moderne » que propose, sous la tutelle du Sénat, le Musée du Luxembourg jusqu’au 2 février 2025 ? Peu de choses, en réalité, sinon l’éclatante confirmation que du Mexique précolombien au Brésil moderne, le continent dans la diversité de son histoire – de ses nombreuses histoires entremêlées – et de sa créativité sans complexes a tellement à nous offrir.

Les 150 œuvres réunies au Musée du Luxembourg par le Grand Palais Rmn et le Musée Guggenheim Bilbao (où on les retrouvera en 2025) constituent la première grande exposition hors du Brésil pour cette figure de la peinture moderne brésilienne qui bénéficie d’une forte reconnaissance dans son pays. Tarsila do Amaral (1886-1973), issue de la haute société blanche et caféicultrice, s’est confrontée aux avant-gardes artistiques à Paris dans les années 1920, passage obligé pour toute ambition intellectuelle d’Amérique latine et signe supplémentaire de la proximité et de l’influence réciproque entre la France et cette région du monde.

Associée au modernisme brésilien, au mouvement « Pau Brasil » (1924-1925), elle se reconnaît aussi dans l’« Anthropophagie » (1928-1929). Rassurons-nous, « faisant référence à la pratique indigène du cannibalisme comme « dévoration de l’autre » dans le but d’en assimiler ses qualités, ce courant décrit, métaphoriquement, le mode d’appropriation et de réélaboration constructive, de la part des Brésiliens, des cultures étrangères et colonisatrices. » Nulle chair humaine là-dessous mais bien une source d’inspiration métissée qui produit « des paysages aux couleurs vives et aux lignes claires alternant avec des visions oniriques et mystérieuses conduisant à un réalisme à forte vocation sociale dans les créations des années 1930, un gigantisme onirique dans les années 1940 ou une géométrie presque abstraite de certaines compositions tardives » selon le catalogue de l’exposition.

Un univers exotique et coloré rassemblé en une magnifique exposition par la commissaire Cecilia Braschi. À ne pas manquer, du 9 octobre 2024 au 2 février 2025, au Musée du Luxembourg, 19 rue de Vaugirard, 75006 PARIS.

https://museeduluxembourg.fr/fr

 

Laurent Tranier
Rédacteur en chef Opinion Internationale, chef de rubrique Amériques latines, fondateur des Editions Toute Latitude