Développement durable
12H37 - lundi 19 décembre 2011

Pékin : quand la course à la croissance
se transforme en drame écologique

 

Recouverte par un épais brouillard, la ville de Pékin s’est retrouvée contrainte d’annuler des centaines de vols et fermer des axes routiers majeurs. Alors que les autorités chinoises ne s’alarment pas face à cette « pollution légère », l’ambassade des Etats-Unis parle au même moment sur son site internet « d’un niveau dangereux » pour la santé.

 

Pollution: les masques deviennent indispensables pour circuler à Pékin (DR)

Avec ses 20 millions d’habitants, ses chantiers d’agrandissement permanents et ses 240 000 nouvelles voitures par an, Pékin est le reflet du développement effréné chinois.

 

Le prix de la croissance

Ce sont de loin les poussières émises par les centrales thermiques à charbon (elles produisent 80 % de l’électricité et du chauffage) qui rendent l’atmosphère irrespirable. Pourtant, les curseurs des mesures officielles semblent continuellement bloqués sur une qualité d’air « bonne » ou « assez bonne ».

Il faut dire que le Bureau de l’environnement se borne à prendre en compte les particules de 10 microns –relativement épaisses– là où les appareils américains mesurent les microparticules d’un diamètre égal ou inférieur à 2,5 microns. Ces dernières sont les plus dangereuses pour la santé, car capables de pénétrer jusqu’aux alvéoles pulmonaires. Ce « débat sur les microparticules » a été soulevé par le Huanqiu Shibao (Global Times) qui révélait, dans son édition papier, que les autorités pékinoises avaient bien mis en place plus de deux douzaines de stations de surveillance pour mesurer les microparticules de 2,5 microns. Cependant, comme le confesse le directeur du contrôle de la qualité de l’air au Bureau de l’environnement de Pékin, « les standards nationaux n’incluent pas les microparticules 2,5. Nous ne pouvons donc pas publier ce que l’on ne nous demande pas de publier ».

Dès lors, la pollution mesurée se révèle 3 à 4 fois supérieure au seuil d’alerte européen et Pékin se voit attribuer par l’ONU le titre de « cité la plus polluée du monde ».

 

Le ras-le-bol des Pékinois

Shanghai : après une trêve pendant l'expo, la pollution atmosphérique repart de plus belle ? (DR)

Si le plan quinquennal 2011-2015 accorde une large place à la lutte contre la pollution et au développement d’une économie verte, les habitants de Pékin ne voient toujours pas les changements arriver.

Ils sont plus de 4,5 millions à avoir déposé des messages sur Sina Weibo, principal serveur de microblogage du pays dénonçant l’hypocrisie des autorités et leur manque d’ambition dans la lutte contre ce fléau.

Chose marquante, les internautes ne se sont pas gênés pour railler le gouvernement qui a installé pas moins de 200 batteries de purificateurs d’air dans les bâtiments officiels.

Il est devenu évident que les quelques mesures prises par les autorités de la ville sont insuffisantes (mise en place d’un système de circulation automobile alternée, restrictions d’achats de véhicules neufs ou encore délocalisation des usines les plus polluantes). Elles n’ont d’ailleurs pas satisfait la population, inquiète de voir les cas de cancers du poumon faire un bond de 60 % en 10 ans à Pékin, alors que la consommation de cigarettes n’a pas augmenté, selon le journal officiel China Daily.

Malheureusement, ce ne sont pas les deux mesures mises en place par Pékin (prise en compte des microparticules de 2,5 microns –mais seulement à partir de 2016– ou la construction d’une nouvelle station de mesure (mais à 70 kilomètres de la capitale), qui vont mettre fin à l’indignation générale.

Laurie Mathy

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