2 journalistes tués par semaine : c’est le bilan de l’année 2011 dressé par l’ONG Presse emblème campagne (PEC).
Publié le 19 décembre 2011, le rapport fait état de 106 journalistes tués dans 39 pays. 68 morts ont eu lieu dans des pays en situation de guerre ou d’instabilité, dont 20 dans le contexte du Printemps-arabe.
Mexique et Pakistan : les plus meurtriers
Comme en 2010, le Mexique et le Pakistan sont les 2 pays les plus dangereux, où respectivement 12 et 11 journalistes ont trouvé la mort dans l’exercice de leur métier, suivis de l’Irak et de la Libye, qui comptabilisent chacun 7 décès. Les reporters sont majoritairement le fait d’attaques ciblées, liées au contexte de guerre civile et de forte instabilité politique.
Au Mexique, il s’agit de représailles de la part des cartels de la drogue. Ces assassinats de journalistes, qui ont osé dénoncer lesdits cartels, se sont produits dans différentes régions du pays. A noter qu’à ce chiffre s’ajoutent les décès de plusieurs »cyber-citoyens ». Les médias en ligne prennent en effet le relais des médias traditionnels, qui se gardent souvent de dénoncer le trafic de stupéfiants, par peur des représailles. Dans les villes moyennes comme Culiacàn et Nuevo Laredo, bastions du trafic de drogue, des blogueurs et activistes des réseaux sociaux ont été retrouvés méconnaissables tant les conditions de leur mort étaient atroces.
L’Amérique Latine arrive donc en tête des régions les plus meurtrières, avec 35 journalistes tués.
Le Brésil et le Honduras sont les pays les plus dangereux après le Mexique, comptabilisant 6 morts chacun. Les journalistes y ont été victimes d’assassinats liés à leurs engagements politiques. Au Brésil, il s’agit de dénonciation de corruption des autorités locales.
Quant au Honduras, les journalistes morts cette année étaient des opposants au régime. La situation des professionnels de la presse s’est dégradée depuis le coup d’Etat de 2009. De plus, les assassinats n’ont pas été suivis d’enquêtes. Le gouvernement avait pourtant déclaré aux Nations unies, en mars dernier, qu’il mettrait en place des mesures pour améliorer la liberté d’expression et protéger les journalistes.
L’absence d’Etat de droit est aussi meurtrier que les guerres. L’impunité accordée à certains groupes criminels ou politiques porte gravement atteinte à la liberté de la presse.
Printemps-arabe : violences assénées aux femmes journalistes
28 décès de journalistes ont été rapportés pour la région du Maghreb et du Moyen-Orient. 20 d’entre eux sont liés aux événements du Printemps-arabe. « Une centaine d’autres envoyés spéciaux ont subi des violences ou ont été arrêtés », comme le souligne le secrétaire de la PEC, Blaise Lempen.
Ces violences ont été en partie le fait de la répression des régimes autoritaires en place. Leur chute et l’entrée dans un processus de transition démocratique n’a pas forcément stoppé les violences. En Egypte, le Conseil suprême des forces armées (CSFA), chargé d’assurer l’interim, réprime la population de façon brutale, notamment dans le contexte des manifestations liées aux élections législatives.
Les femmes ont été en particulier la cible de violences sexuelles. Parmi les plus célèbre, l’égypto-américaine Mona Eltahawy et la française Caroline Sinz, reporter pour France 3. Cette dernière a été agressée sexuellement en pleine rue le 24 novembre.
Mona Eltahawy, fut arrêtée le 23 novembre au cœur de la manifestation et battue par la police. Les deux bras dans le plâtre, elle avait alors témoigné des violences sexuelles qu’elle avait subies lors de la nuit passée en prison.
Elle a souligné que ce traitement ne concerne pas seulement les journalistes. Selon elle, d’autres femmes, moins susceptibles de témoigner dans les médias internationaux, souffrent davantage.
Suite à ces événements, l’ONG Reporter sans frontières a appelé à la prudence, recommandant aux rédactions de prendre des mesures de protection particulières lors d’envois d’équipes. Ces derniers jours, les violences ont repris dans le contexte du 2e tour des élections législatives, alors que le 20 décembre le CSFA « a exprimé ses regrets » face aux atteintes dont sont victime les femmes.
Carine Dréau