Lors du terrible tsunami qui a balayé la côte nord-est du Japon le 11 mars 2011, le taux de mortalité a été 2 fois plus élevé parmi les personnes handicapées. C’est la conclusion d’une étonnante étude menée par le quotidien Mainichi Shimbun, qui apporte un éclairage nouveau sur cette tragédie.
Au moment où la vague meurtrière atteignait les côtes, la plupart des victimes handicapées physiques, mentales ou atteintes de troubles psychiatriques, se trouvaient chez elles et non dans un institut spécialisé. Le journal rapporte que la plupart de ces personnes ont sans doute été incapables de comprendre ce qui arrivait ou de se mettre à l’abri.
Prisonniers de leur handicap
Le Mainichi Shimbun a mené l’enquête dans 33 municipalités touchées par la catastrophe. A elles seules, elles ont perdu plus de 13 000 habitants, soit 0,9 % de leur population. Le décompte minutieux des victimes a fait apparaître que 1 568 handicapés avaient trouvé la mort (soit 2 % de la population présentant un handicap sérieux). Un taux de mortalité 2 fois supérieur à celui de la population dite « normale ».
Dans la ville côtière d’Ishinomaki (préfecture de Miyagi), durement touchée par la vague, le taux de décès des handicapés atteint même 7 %. Incapables de se mettre rapidement à l’abri, de nombreuses personnes n’ayant plus l’usage de leurs jambes ou souffrant de troubles visuels ou auditifs, n’ont rien pu faire contre le tsunami qui approchait. Dans la petite ville voisine d’Onagawa, un effrayant pic de mortalité de 14 % a même été comptabilisé chez les non-valides.
Malaise face à l’inégalité des chances de survie
Plus que l’effet d’annonce morbide, l’étude dérange l’opinion publique japonaise, qui pensait son système de prise en charge efficace et protecteur. « Ces chiffres montrent la réalité cruelle à laquelle les victimes handicapées ont dû faire face. » déclare le président du forum Japon Handicap, Katsunori Fujii, dans le Mainichi Shimbun, « Nous ne pouvons plus repousser le débat sur notre système de protection sociale –ou les stratégies de reconstruction– sans regarder d’abord la réalité en face. Les autorités se doivent de lancer une étude approfondie du sujet. »
La vulnérabilité des handicapés est patente face à une catastrophe naturelle. Cette prise de conscience crée un malaise dans un Japon qui veut, en 2012, se tourner vers la reconstruction. Un nouveau tremblement de terre semblant inévitable, il est indispensable de se prémunir au mieux pour l’avenir.
Le tsunami du 11 mars 2011 a officiellement fait plus de 15 800 victimes auxquelles se rajoutent 3 500 disparus sur le sol japonais.
Damien Durand