Selon l’ONU, 500 millions de personnes pourraient migrer d’ici 2050 pour diverses raisons : inondations, dégradation des sols, catastrophes naturelles ou encore déforestation et accidents industriels. Autant dire que la question des réfugiés climatiques est devenue un enjeu politique et juridique majeur.
Malgré une absence de consensus, le Programme des nations unies pour le développement (PNUE) définit les réfugiés environnementaux comme « des personnes forcées de quitter leurs habitations, d’une façon temporaire ou permanente, à cause d’une dégradation nette de leur environnement (d’origine humaine ou naturelle) qui bouleverse gravement leur cadre de vie et/ou qui déséquilibre sérieusement leur qualité de vie ».
Les naufragés de la Terre
A l’heure du réchauffement climatique et de la croissance effrénée des géants, comme la Chine et l’Inde, les causes de déplacement des populations sont nombreuses. Mais la montée des eaux reste la cause majeure.
Conséquence directe du réchauffement, la fonte des glaciers himalayens et le recul des glaces aux pôles ont déjà entrainé la disparition de certains territoires, notamment 4 îles de l’archipel Sundarbans (situé dans le Delta du Gange). Beaucoup d’autres sont également menacés, tels que l’archipel Tuvalu dont les experts estiment la disparation totale d’ici 2050.
Les préoccupations touchent également le Bangladesh, dont la moitié de la population vit à moins de 5 mètres au-dessus du niveau de la mer. On craint la disparation de 20 % du territoire et le déplacement de 20 à 40 millions d’habitants. De la même manière, en Afrique, la Convention cadre des nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) estime que « près de 30% des infrastructures côtières seraient à risque », menaçant d’inondations d’ici 2080, 70 millions d’Africains.
Les pays développés ne sont pas en reste. Si New York , Shanghai et Londres sont concernées, les Hollandais sont particulièrement conscients de la menace qui pèse sur leurs extensions territoriales en polders, uniquement protégés par des digues. Ils ont d’ailleurs développé un important programme de lutte contre ce genre de risque en cherchant notamment de nouvelles technologies assurant la flottaison des maisons. L’injustice face à la menace devient vite évidente : le Bangladesh n’est pas prêt de développer ce genre de technologies.
A la montée des eaux s’ajoute la désertification. Pour exemple, le désert de Gobi avance de 3 kilomètres par an, prenant la place de terres arables et obligeant les populations à se déplacer, tout comme la déforestation à l’origine de la migration de centaines de tribus autochtones notamment en Amérique latine.
Le néant juridique
En plus de devoir quitter leur maison, leur environnement et leur pays, les réfugiés climatiques vivent un second drame : aucun texte de droit international ne reconnaît officiellement leur existence, en leur accordant un statut juridique. Le droit des réfugiés est a vu le jour le 28 juillet 1951 avec la Convention relative au statut des réfugiés, appelée plus communément « Convention de Genève ».
A l’époque cependant, encore loin des problématiques environnementales, seul le statut des réfugiés politiques y est établi. Pourtant, ce ne sont pas les appels pour la reconnaissance d’un statut juridique qui manquent.
Depuis longtemps, l’ONU appelle les Etats à se pencher sur la question. Il en est de même pour de nombreuses ONG menées par Amis de la Terre, Greenpeace et WWF qui ont créé le programme « Climate justice » qui lutte pour l’établissement de nouvelles règles pour une justice climatique. Sans parler de la Fondation LISER créée en 2002 qui aide les réfugiés à être entendus. Mais, au-delà du problème juridique, c’est bien un problème politique qui se pose.
Il est évident qu’à l’heure actuelle, les Etats peu développés, qui sont souvent les plus concernés, ne sont pas prêt à reconnaître de tels d’immigrés. En effet, cela impliquerait la réinstallation des populations et le coût financier qui va avec, la mise en place de programmes de prévention pour les zones à risques, voire l’accueil de milliers de personnes émanant d’un pays dévasté.
Dès lors, cette situation semble arranger tout le monde. Elle permet de considérer les populations qui n’ont pas franchi de frontières comme de simples « déplacés », les privant potentiellement des droits que leur conférerait un statut juridique de réfugiés.
Alors que la guerre de l’eau est imminente et que la famine due à la sécheresse est en marche, il est certain que le nombre de réfugiés climatiques n’est pas prêt de diminuer, il est donc temps pour chaque gouvernement de se pencher concrètement sur cette question.
Laurie Mathy