La déforestation massive qui sévit en Amérique Latine et notamment au Brésil, est un sujet de préoccupation environnementale majeur. Pourtant, en 2008 les pays développés se sont mis d’accord pour créer un « Fonds Amazonie » pour financer les initiatives visant la protection de la forêt. Quatre ans après où en est-on ? Le Brésil a-t-il sauvé sa forêt ?
Le 1er aout 2008 l’ex-président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva signait à Rio un décret portant création du « Fonds Amazonie », dont le but serait de financer des projets de protection de la forêt amazonienne.
Un Fonds pour protéger la forêt
Capable de percevoir jusqu’à 21 milliards de dollars d’ici à 2021 et géré par la Banque nationale du développement économique et social (BNDES), le Brésil s’engageait ainsi à assumer toutes ses responsabilités dans la protection de l’Amazonie. Le fonds, dont les dons proviennent avant tout des pays développés mais également des banques et de certaines entreprises, permettait au président Lula de mettre à contribution les pays riches qu’il a toujours considérés comme les pilleurs des ressources naturelles de son pays ; mais aussi de faire du Brésil un géant dans les sommets environnementaux, car particulièrement actif dans la protection des espaces naturels.
De ce fait, la BNDES s’est vue confier les missions de perception et d’administration des ressources, ainsi que la charge du suivi des projets. Les autorités brésiliennes ont également tenu à affirmer que les donations étaient volontaires et qu’aucune ingérence de la part des donateurs sur l’utilisation des ressources ne serait tolérée. Et d’ajouter que les dons ne s’accompagneraient pas d’exemption d’impôt, de crédit carbone ou de tout autre avantage. Le message était clair : fini la déforestation à tout va, le Brésil s’occupe de ses forêts, de ses ressources naturelles et entend bien trouver sa place dans le débat mondial sur l’environnement, pourtant quatre ans après, le bilan est loin d’être tout vert.
Des résultats controversés
Depuis 2009 le Fonds a reçu près de 370 millions d’euros, mais seulement 30 millions ont été dépensés pour financer 23 projets, soit à peine 10 % des dons reçus. Autant dire que l’impatience des donateurs se fait sentir, au premier rang desquels la Norvège. Il faut dire que le pays Scandinave a déjà signé des contrats avec la BNDES pour un montant total de 332 millions d’euros et s’est engagé pour 771 millions d’euros.
Il n’est, dès lors, pas étonnant que le malaise norvégien s’exprime ouvertement dans la presse nationale et que des interrogations soient soulevées quant à l’utilisation de l’argent. Sans parler du fait qu’entre 2010 et 2011 le montant des projets financés a diminué de moitié, alors que les dons eux sont en hausses. En effet, en 2010 la banque a signé 8 contrats pour un montant de 95 millions de dollars alors qu’en 2011 elle signait 11 contrats pour 31 millions de dollars.
L’inexploitation des fonds semble s’expliquer par la lourdeur administrative qui sévit au sein de la BNDES, assimilant une levée de fonds aux 12 travaux d’Hercule. C’est notamment ce que déplore le directeur du musée de l’Amazonie qui n’a reçu les ressources nécessaires pour l’implantation du celui-ci qu’un an et demi après l’approbation du projet par la BNDES. L’épopée que représente une demande de ressources en a découragé plus d’un. De manière générale, il faut entre un an et demi et deux ans pour une obtenir une approbation par la banque et encore autant pour se voir attribuer l’argent.
En 2011, devant la gronde croissante des donateurs et l’incompréhension des initiateurs, le Comité d’orientation du fonds Amazonie (COFA) a adopté de nouvelles procédures visant à faciliter la libération des ressources et favoriser la mise en œuvre de projets durables. Mais les résultats tardent toujours à se faire sentir et le Brésil est en train de perdre une partie de sa légitimité dans le dialogue environnemental planétaire.
Le Brésil, pour instigateur de la protection de la forêt amazonienne, paraît pris en défaut.
Laurie Mathy