Alors que de nombreux secteurs sont touchés de plein fouet par la crise économique, le marché du bio, particulièrement florissant en France, a longtemps résisté. Pourtant, selon une étude du cabinet Xerfi, cette bonne santé devrait finalement s’essouffler cette année.
Selon une analyse d’octobre 2011 de l’agence Bio (un groupement d’intérêt public chargé de la promotion de l’agriculture biologique), le marché des produits alimentaires bio a dû rapporter près de 4 milliards d’euros en 2011 soit une hausse supérieure à 10 % par rapport à 2010.
Un secteur qui plaît aux Français
A noter que ce succès porte sur l’ensemble des grandes familles de produits bio avec, en premier lieu, les œufs et le poulet (+18 %), ensuite le beurre (+11 %) et finalement le lait (+10 %). En plus de cela, le bio est apparu dans des secteurs dont il était globalement absent ou dans lesquels il était faiblement implanté, tels que les plats cuisinés, les compotes en conserve, les pâtisseries pré-emballées, les laits infantiles ou encore les céréales pour le petit déjeuner.
Cette tendance du bio dans l’ensemble des produits alimentaires de base explique la croissance remarquable de ce marché depuis 2006. En effet, les Français, de plus en plus attachés à manger sainement, se tournent souvent vers les produits bio lorsqu’ils ont le choix. De ce fait, tous circuits de distribution confondus, ce sont les produits d’épicerie qui rapportent le plus de succès auprès des consommateurs (20 % des achats bio des Français), viennent ensuite les fruits et légumes (17 %), le lait et les produits laitiers (15 %) puis finalement le pain, la farine et le vin à égalité (10 %).
Cependant, et malgré l’intérêt des Français pour ce secteur, les produits bio restent largement importés en France. Le Grenelle de l’environnement qui prévoyait un objectif de 6 % de la surface agricole réservée au bio d’ici fin 2012, ne sera jamais atteint. On sera sans doute plus proche des 4 %. Ceci s’explique notamment par une disparité régionale manifeste. Alors que dans certaines zones telles que la région PACA et le Languedoc-Roussillon les terres réservées au bio représentent plus de 6 %, elles atteignent durement les 1 % pour les régions Champagne-Ardenne, Haute-Normandie, Nord-Pas-de-Calais ou Picardie.
Un essoufflement temporaire
La bonne tenue du marché bio va toutefois devoir faire face à la baisse du pouvoir d’achat des ménages qu’a engendré la crise économique. Selon l’étude du cabinet Xerfi début 2012, les ventes ne devraient progresser que de 5 % en 2012, 2014 et 2015 avec un sursaut de 8 % en 2013, marquant ainsi une rupture avec la période 2006-2010 et sa croissance de 10 à 20 %.
En effet, les atouts incontestés du bio, au rang desquels on trouve la santé, l’éthique ou la protection de l’environnement ne suffisent plus à rendre attractifs des produits qui restent globalement plus chers pour des consommateurs dont le portefeuille a nettement diminué. Le bio doit, par ailleurs, se mesurer au « locavorisme », c’est-à-dire au succès grandissant des produits locaux qui deviennent de sérieux concurrents.
Malgré ce ralentissement, le marché du bio reste performant. La grande distribution ne devrait donc pas lâcher le filon mais bien accroitre sa part de marché de 47 à 50 % d’ici 2015, entraînant parallèlement une chute de la filière spécialisée de près de 30 % sur la même période.
Cette dernière devrait tout miser sur l’éthique pour s’affirmer comme l’acteur le plus fiable de la filière. Concrètement, si la conjoncture économique se stabilise, le chiffre d’affaire du marché bio devrait s’élever à 4,5 milliards d’ici fin 2015, illustrant un net ralentissement mais aussi une santé qui suffirait à beaucoup d’autres secteurs en perdition.
Laurie Mathy