Maplecroft, cabinet de recherche spécialisé dans l’aide aux investisseurs, vient de publier sa dernière étude. Les résultats sont alarmants : le Bangladesh est le pays le plus vulnérable face aux bouleversements climatiques, devant l’Inde et Madagascar. Avec une élévation d’un mètre du niveau de la mer d’ici la fin du siècle, 35 millions de personnes seront déplacées. Le pays pourrait perdre 20 % de ses terres d’ici 2050. Portrait d’une nation en danger.
Blotti entre la chaîne de l’Himalaya et le golfe du Bengale, le Bangladesh est particulièrement fragile face au changement climatique. Albert Fischer, membre de la Commission océanographique de l’UNESCO l’explique « le Bangladesh est un pays de delta de très basse altitude ».
« Le pays delta »
Des variations naturelles aux bouleversements climatiques
Moussons, inondations, cyclones… certes, le Bangladesh est depuis toujours confronté à ces variations naturelles. Il faut les distinguer des effets du changement climatique pour se rendre compte de la gravité de la situation.
Albert Fischer le sait, « le climat est la moyenne des phénomènes météorologiques, qui peuvent se manifester par des situations extrêmes – moussons, inondations, cyclones. Ces conditions météorologiques sont impactées par le réchauffement climatique et ces événements extrêmes augmentent ».
Au Bangladesh, les signes ne trompent pas, la fréquence des cyclones s’est accélérée depuis 30 ans. Autrefois, un cyclone tous les 20 ans, aujourd’hui, ils surviennent tous les deux ou trois ans. Le dernier en date, Nargis, a tué 50 000 personnes. Les inondations augmentent en nombre et en intensité. Lorsque l’eau se retire, certaines rivières suivent un nouveau cours, obligeant des populations entières à fuir leur région.
Des milliers de réfugiés climatiques
Atiq Rahman, co-auteur du dernier rapport du GIEC, estime, dans une interview donnée à La Revue Durable, que ces évolutions climatiques ont déjà poussé 500 000 personnes à se réfugier à Dacca, la capitale. Il s’alarme « depuis les années 1980, le Bangladesh connaît, selon les années, une sécurité alimentaire toute relative. Or, c’est bien ce progrès-là que le réchauffement du climat est en train de balayer ». Le GIEC le confirme. La production de riz déclinerait de 8 % et celle du blé de 32 % d’ici 2050, sans parler de l’augmentation de la population à cette date.
Alors qu’en Occident on dépasse souvent les 10 tonnes de dioxyde de carbone par an, les Bangladais en produisent à peine 0,3. Leur responsabilité dans le réchauffement climatique est quasi-nulle, pourtant ils le subissent de plein fouet.
Pour un peuple qui a assuré sa sécurité alimentaire et réussi à envoyer ses enfants à l’école, la montée des eaux pose un problème de justice. Poussés par le changement climatique, les réfugiés arriveront par millions dans les villes, où violence et criminalité se développent.
Tôt ou tard, la colère de ce peuple pourrait se retourner contre les véritables auteurs du changement climatique. Il est encore temps de l’éviter. Le Sommet mondial de la Terre se tiendra au mois de juin prochain, il représente un espoir pour les pays victimes, comme le Bangladesh, du réchauffement climatique.
Agathe Clerc