Après le vent de liberté qui a soufflé sur la Tunisie dans les semaines qui ont précédé et les mois qui ont suivi la chute de Ben Ali, il semble que le « printemps culturel » soit fortement menacé. Cet été, des artistes ont été intimidés et violentés, des manifestations culturelles ont été annulées sous la pression de groupes salafistes : le saccage de la salle de cinéma de l’hôtel Méridien à Tunis à l’occasion de la projection du film de la réalisatrice Nadia el Fani, « Ni dieu ni maître », l’attaque de la salle d’exposition de « Al Ebdellya » à La Marsa dans la banlieue nord de Tunis contre un tableau qui n’a finalement pas été exposé sont deux exemples d’un feuilleton d’attaques en règle contre des manifestations culturelles.
Les salafistes s’en sont aussi pris directement aux artistes : ainsi, le 14 août, le chanteur Lotfi Bou Chnak n’a pu se produire, sa troupe « soufi » ayant été empêchée d’accéder au lieu de son spectacle au prétexte que ce chant lyrique n’a pas sa place, selon les salafistes, pour les chiites en Tunisie. L’acteur et humoriste tunisien Lotfi Ebdelli a failli subir le même sort et, faute de voir la police le protéger, il a dû recourir à une société de sécurité privée pour protéger son spectacle « 100% halel » lors de sa présentation le 2 septembre à Kelibia dans la région du Cap bon.
Pour Toufik ben Brik, écrivain, chroniqueur et directeur du journal Contre le pouvoir, « ce que nous vivons sur le plan politique et culturel serait l’émanation directe de la politique de désertification intellectuelle empruntée par l’ancien régime. Les chaînes TV du golfe se chargent du reste. La religion rend la pauvreté tolérable diraient les marxistes… Alors, cherchez le coupable. »
Mondher Thabet
Correspondantde www.opinion-internationale.com à Tunis