Le bateau de l’ONG Woman on Waves pour aider les femmes à avorter au large des côtes marocaines se voit refuser l’accès au port de Smir au Maroc.
L’arrivée jeudi dernier d’un navire de l’ONG néerlandaise Women On Waves proposant durant une semaine une aide à l’avortement a suscité bien des polémiques au Maroc, l’avortement y étant interdit. Bien que la pratique soit répandue dans le pays, elle reste en effet toujours illégale.
Des peines lourdes pour punir le crime d’avortement
Pour le Maroc, l’interruption volontaire de grossesse n’est pas seulement un sujet tabou mais aussi un crime, de ce fait puni par la loi. L’article 449 du Code pénal punit de un à cinq ans de prison et d’une amende de 200 (18 €) à 500 dirhams (45 €) toute personne ayant provoqué, ou tenté de provoquer un avortement, avec ou sans l’accord de l’intéressée. La peine est portée à 20 ans de réclusion en cas de décès et est doublée si la personne ayant effectué l’avortement est récidiviste.
Pour les femmes qui avorteraient par elles-mêmes sans assistance, l’article 454 les punit de 6 mois à 2 ans de prison. Enfin, l’article 455 punit de deux mois à deux ans les personnes complices d’aider à l’avortement, notamment les intermédiaires ou les vendeurs de produits abortifs. Les seules exceptions tolérées par la loi sont l’avortement spontané ou celui opéré lorsque la vie de la mère est en danger. L’Association marocaine de lutte contre l’avortement clandestin demande qu’il soit en plus autorisé en cas de viol, inceste et malformation grave du fœtus.
Une pratique dangereuse et coûteuse pour les femmes
Au Maroc, l’avortement se pratique clandestinement par 600 à 800 femmes par jour selon les estimations. Elle provoque la mort de centaines de Marocaines chaque année : d’après Rebecca Gomperts, fondatrice de Women on waves, 78 femmes mourraient chaque année au Maroc des suites d’un avortement clandestin, et «seules les femmes qui en ont les moyens bénéficient de la qualité de soins requise», propos rapporté par l’AFP. Les conditions d’hygiène pour l’opération ne sont en effet pas garanties pour celles qui n’en ont pas les moyens financiers.
Pour l’ONG néerlandaise, la vie de ces femmes passe avant tout. Bien que le bateau ait frayé pour la première fois au large des côtes d’un pays musulman, cette opération de Woman on waves avait déjà eu lieu dans plusieurs pays où l’IVG est totalement interdit comme l’Irlande, la Pologne, le Portugal et l’Espagne. Elle propose des avortements médicamenteux hors des eaux territoriales dans des pays où l’avortement est illégal. Chaque fois, leurs actions entraînent des protestations de groupes opposés à l’avortement. A défaut d’un vrai succès, le navire n’ayant pu rester, cette opération au Maroc reste néanmoins un symbole.
Nirina Rasoanaivo
Voir : l’intervention des autorités dans le port de Smir contre le navire de Woman on Waves