Rizana Nafeek a été exécutée cette nuit, décapitée en Arabie saoudite. A l’âge de 17 ans, à peine arrivée du Sri-Lanka, elle est accusée d’avoir tué un bébé qu’elle gardait dans une riche famille saoudienne. Détenue depuis 2005 à la prison de Dawadmi, une ville située à l’ouest de la capitale, Riyadh, elle craignait une exécution annoncée de longue date. Le 16 juin 2007, Rizana Nafeek avait été condamnée à mort. La Cour suprême de Riyadh a confirmé la condamnation à mort de Rizana Nafeek le 25 octobre 2010. Le jugement a ensuite été transmis au roi Abdallah pour ratification. La famille du nourrisson décédé a refusé d’accorder son pardon à la jeune fille.
Malgré un procès inique où Rizana Nafeek n’a pu se défendre équitablement, malgré les doutes qui pèsent sur sa culpabilité, malgré les (trop rares) protestations internationales, sinon trop tard, l’Arabie saoudite a, une nouvelle fois, exécuté un mineur au moment des faits.
Depuis plusieurs mois, le nombre d’affaires judiciaires où des étrangers sri-lankais, bangladais et d’autres pays asiatiques sont accusés de meurtres ou de crimes en Arabie saoudite, explose. La logique du bouc-émissaire marche à plein régime.
Amnesty International a rappelé que, « en tant qu’État partie à la Convention relative aux droits de l’enfant, l’Arabie saoudite n’a pas le droit d’appliquer la peine de mort à des personnes qui avaient moins de 18 ans au moment des faits qui leur sont reprochés. »
Dans un pays où le roi a toute autorité sur la justice, où le régime politique repose sur une famille régnante, il est pertinent de s’adresser directement au roi pour protester avec la plus grande fermeté contre l’application cruelle, inéquitable parce que sélective, de la peine de mort. Seuls 3 pays dans le monde exécutent encore des mineurs. Quant au mode d’exécution, la décapitation, elle constitue un acte d’une violence inouïe qu’il faut dénoncer.
Contrairement à la Chine, à l’Iran et aux Etats-Unis que l’opinion internationale ne manque pas de sermonner lorsque ces pays appliquent la peine de mort, l’Arabie saoudite bénéficie d’une sorte de silence coupable de la communauté internationale. A part de rares manifestations de ressortissants de la communauté sri-lankaise dans le monde, ce fut : silence radio. Plusieurs diplomates avaient recommandé des actions discrètes pour Rizana Nafeek, comme s’il ne fallait pas risquer de froisser l’orgueil mal placé des autorités saoudiennes.
En souvenir de Rizana Nafeek et de ces centaines de victimes de la justice saoudienne, il serait temps que la pression augmente sur la première puissance pétrolière du Golfe et qu’une vraie campagne internationale dénonce publiquement cette justice qui tue.
Michel Taube