Les conséquences des fuites de pétrole de la compagnie Royal Dutch Shell dans le delta du Niger témoignent de l’urgence de la mise en place d’une législation conduisant à la responsabilité sociétale des entreprises (RSE).
Rappel des faits
En août et en décembre 2008, 1640 barils de pétrole, au minimum selon Shell, se sont écoulés à Bodo dans le delta du Niger. La société Shell Petroleum Development Company, filiale de la multinationale Royal Dutch Shell, était en charge (et c’est toujours le cas!) du transport du pétrole au Nigeria. Selon Amnesty International, « des esperts consultés par un cabinet d’avocats au Royaume-Uni ont estimé que la quantité de pétrole déversé jusqu’ à ce que la fuite soit stoppée, le 7 novembre 2008, pouvait atteindre 4000 barils par jour » soit 636 000 litres par jour ! A la fin du mois d’aout 2008, l’origine de l’incident technique avait été identifié : un « problème de soudure » sur l’oléoduc trans-Niger. Malgré cela, les hydrocarbures se sont répandus pendant des semaines dans l’eau et dans le sol. La filiale nigeriane de Shell a affirmé que des actes de vandalisme auraient été à l’origine de cette catastrophe humaine et environnementale. Cependant, l’entretien des infrastructures, pour quelque motif que ce soit, incombe à la multinationale.
Un besoin de justice
David Vareba, de passage à Paris, était l’un des invités-témoins du colloque « Devoir des états – Responsabiliser les multinationales: prévenir et remédier aux violations des droits humains et de l’environnement » qui s’est tenu le jeudi 13 décembre 2012 à l’Assemblée nationale. Militant pour le Centre pour l’environnement, les droits humains et le développement (CEHRD) et représentant de la communauté de Bodo, il réclame justice. Il a réaffirmé son désir de voir Shell « indemniser les victimes ».
La vie de la commune des 69 000 habitants de Bodo a diamétralement changé. Avant le mois d’aout 2008, beaucoup vivaient de la pêche et des fruits de la terre. Aujourd’hui les ressources naturelles ont disparu et l’écosystème est mort. Les habitants ne sont plus à même de produire leur nourriture et ont perdu dans le même temps leurs activités professionnelles.
Une première enquête a été menée sous la direction de l’entreprise et la multinationale a reconnu sa responsabilité. Toutefois, les mangroves, le fleuve et les sols restent souillés par le pétrole et la qualité de vie à Bodo demeure très difficile.
Le 2 mai 2009, selon Amnesty International, Shell aurait fait livrer de nuit par le biais des employés de leur filiale une aide alimentaire comprenant 50 sacs de riz, 50 sacs de haricots, 50 sacs de garri (aliment proche du tapioca), 50 cartons de sucre, 50 cartons de lait entier, 50 cartons de thé, 50 cartons de tomates et 50 boites d’arachides. Cette aide, les habitants l’ont refusé.
Afin d’obtenir réparation, David Vareba et sa communauté ont saisi la justice au Nigeria. Le résultat a été sans appel, ils ont été déboutés. Aujourd’hui David Vareba poursuit son combat auprès de la justice britannique. Il espère une dépollution des zones sinistrées.
Stéphanie Petit
Marée noire au Nigéra, témoignage de Celia et Emmanuel