La Chine d’aujourd’hui n’est pas comme celle d’il y a 50 ans : l’orthodoxie communiste, la dictature du prolétariat, la société uniformisée, le tout-puissant Etat interventionniste… Tout cela a été enseveli dans l’histoire du 20e siècle et s’est atténué dans la mémoire de l’ancienne génération. Depuis les années 1980, avec les réformes de libéralisation, les ONG se développent rapidement et constituent un moteur important de la formation de la société civile chinoise.
Des ONG en développement permanent
Les ONG en Chine ont émergé à la suite de la présence d’organismes internationaux, tel l’ONU et ses branches, et ont copié le modèle des ONG internationales. Elles ont pu se développer grâce à deux éléments nouveaux, la réforme libérale et des politiques plus tolérantes. D’une part, le gouvernement a favorisé la transformation des départements peu efficaces aux ONG afin de simplifier les structures administratives ; d’autre part, les ONG formées directement par le peuple peuvent être très diverses grâce à la « liberté de réunion » garantie par les nouvelles politiques. D’ailleurs, l’installation massive des ONG internationales en Chine a beaucoup encouragé l’apparition d’ONG locales ; et la couverture médiatique a rendu l’opinion publique favorable à leur émergence.
Le développement des ONG en Chine est toujours remarquable, et on constate ces dernières années un élan de plus en plus fort. Si les ONG locales sont principalement actives dans le domaine caritatif, elles connaissent aujourd’hui une grande diversité et opèrent dans des champs aussi variés que l’environnement, l’éducation, l’art, ou les échanges culturels. Elles ont également un fonctionnement plus innovateur et participatif, et attirent de plus en plus de bénévoles de tous âges et professions. Ainsi, l’association pour l’éducation ‘1kg’ a créé dans un village montagneux défavorisé une activité appelée « un kilo de plus ». Elle a demandé à chaque alpiniste d’apporter un kilogramme de livres pour les enfants qui habitent à la montagne et qui n’ont accès ni aux livres, ni à l’éducation. Cette activité a connu un grand succès et a été reprise dans beaucoup de régions en Chine.
Mais à l’image déjà ternie
Malgré leur développement remarquable, les ONG en Chine ont des problèmes non négligeables et se trouvent dans un environnement complexe. Les études relatives à ce type d’organisations restent élémentaires et seules les premières années du cycle supérieur s’y intéressent. Peu de spécialistes font référence dans ce domaine. En outre, beaucoup d’ONG locales se bornent à imiter le modèle des ONG occidentales, ignorant les spécificités locales, ce qui les rend rigides et peu populaires. Comme la législation en la matière n’est pas développée, il est souvent difficile pour les ONG d’obtenir leur légitimité et des subventions étatiques – sans lesquels leur fonctionnement est très limité.
Quelques ONG se trouvent même dans une situation précaire. Malgré l’assouplissement des politiques, certaines organisations, tel Amnesty International, sont interdites en Chine. Il s’agit principalement de celles qui traitent des droits de l’homme, qui restent un sujet sensible pour le gouvernement. Par ailleurs, le manque de transparence et la corruption des ONG font scandale. Ce fut le cas de la Croix Rouge Chinoise en 2011, dont les scandales à répétition ont provoqué une méfiance contre l’ensemble des ONG et suscité une crise des relations publiques.
La société civile est la grande gagnante
Aujourd’hui, la Chine se trouve dans une période de transition. Elle cherche une société civile forte pour que le gouvernement évolue d’un « gouvernement tout puissant » à un « gouvernement de service ». Comme l’a mentionné le nouveau président Xi Jinping dans l’un de ses discours, la Chine entend suivre son agenda vers un « petit gouvernement et grande société ». Dans ce cas-là, les ONG vont assumer plus de responsabilités civiles et jouer un rôle de plus en plus important dans la société.
La présence des ONG impose un contrepoids au gouvernement et aux institutions existantes. La libre réunion dans la société inspire le pluralisme et l’autonomie, qui constituent les éléments importants de la démocratie et qui atténuent l’influence du monopartisme et d’une éventuelle dictature.
En outre, les ONG en Chine se trouvent à l’avant-garde du civisme, en introduisant le bénévolat, l’écologisme, la construction communautaire et le pluriculturalisme. Dans un pays en plein développement, où les entreprises cherchent la richesse et le gouvernement la stabilité, ces valeurs donnent sans doute un nouveau souffle à la société.