C’est inévitable, la production de viande devra augmenter pour satisfaire les besoins d’humains de plus en plus nombreux et qui exigent de plus en plus de produits carnés dans leurs assiettes. Le système productiviste pense avoir trouvé la solution en enfermant des centaines de millions d’animaux dans des « fermes-usines » où ils subissent des conditions de vie désastreuses. Ne peut-on envisager une alternative ?
Les dérives de l’agrobusiness
La surface de la Terre n’est pas extensible. Il est nécessaire d’augmenter les rendements pour parvenir à répondre à la demande de la population. « Au cours de ces cinquante dernières années, les méthodes de production de type « chaîne de montage » ont transformé l’agriculture en agrobusiness » écrit Peter Singer, philosophe et professeur de bioéthique à l’université de Princeton. « Les animaux sont considérés comme des machines, qui convertissent du fourrage de faible valeur marchande en chair de haute valeur marchande » ajoute-t-il. Et malheureusement pour les poules, la viande de volaille est la moins chère à produire. Réduire les coûts tout en augmentant la production, l’équation est simple pour les industriels : il suffit d’enfermer le plus d’animaux possible, dans des cages les plus petites possibles.
Bien qu’ils prétextent que l’industrialisation de la production de viande est nécessaire pour réduire la faim dans le monde, les industriels ne cherchent pas éradiquer la famine mais bien à gagner de l’argent. Et on compte toujours plus de mal-nourris sur Terre.
La souffrance est ce qui est le mieux partagé
Les animaux souffrent des conditions de vie, et de mort, déplorables qu’on leur impose. « Le développement industriel va de pair avec un développement de la destruction. Les animaux sont détruits aussi vite qu’ils sont produits. Si la matière animale n’est pas conforme, ils sont massacrés sans tenir compte du fait que ce sont des animaux » commente Jocelyne Porcher, chargée de recherche à l’INRA (Institut National de la Recherche Agronomique), en référence aux abattages massifs de centaines de milliers d’animaux lors des crises sanitaires ou économiques. Certains éleveurs ne se reconnaissent plus dans ce système productiviste : « la souffrance est ce qui le mieux partagé dans ces systèmes industriels » constate Jocelyne Porcher.
A la recherche de l’agroécologie
L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) déplore également les dysfonctionnements de ce mode de production de viande : « Dans de nombreuses régions du monde, la transformation du secteur de l’élevage se traduit par une mauvaise utilisation des ressources naturelles et à une dégradation de la santé publique » peut-on lire dans un rapport de 2009. Si elle est nécessaire pour répondre aux besoins futurs, l’augmentation de la production animale, telle qu’elle est envisagée par les acteurs de l’agrobusiness, est insuffisante. « Le plus important est de prendre des mesures qui facilitent la transition vers un type d’agriculture à faible émission de carbone, économe en ressources et qui bénéficie aux agriculteurs les plus pauvres » affirme Olivier De Schutter, rapporteur spécial des Nations Unies pour le droit à l’alimentation. Ce sont les bases de l’agroécologie, alternative vers une agriculture plus respectueuse de l’environnement, des hommes et des animaux.
On produit suffisamment de nourriture pour les 868 millions de personnes sous-alimentées, mais cette nourriture est trop chère pour les mal-nourris. L’agroécologie peut permettre aux pays du Sud de connaître le développement agronomique dont ils sont exclus jusqu’à présent.