Le 4 juin, les États-Unis ont entériné de nouvelles sanctions à l’encontre de l’Iran, l’objectif étant d’affaiblir sa monnaie, le rial, qui a déjà perdu plus de 15 % de sa valeur par rapport au dollar. Le casus belli concerne le programme nucléaire auquel Téhéran ne souhaite absolument pas renoncer.
Pour la première fois depuis que le pays est soumis à des sanctions internationales, la monnaie est particulièrement ciblée : L’objectif est qu’elle devienne inutilisable hors d’Iran. Précédemment, les mesures avaient concerné les exportations de pétrole, qui avaient atteint en juillet 2012 le minimum historique de 930 000 barils/jour, avant de se reprendre entre la fin de l’année 2012 et les premiers mois de 2013 grâce au déplacement vers les consommateurs asiatiques (Japon et Corée du Sud), mais sans améliorations significatives.
Le poids des sanctions économiques
Comment se traduit concrètement l’embargo pour les citoyens iraniens ? Il signifie que le prix des biens de consommation augmente de 30 %. Ainsi, en mars 2013, l’inflation a atteint 41 %. Le prix des denrées alimentaires a bondi en un an, le prix du poulet a triplé et certains médicaments sont devenus inaccessibles, surtout ceux permettant de traiter le cancer et le diabète. Le parlement iranien essaie d’enrayer le malaise populaire en contenant les prix des biens de première nécessité, comme l’huile, le pain, le riz et le sucre, et en consacrant 2 milliards de dollars d’aide aux familles aux revenus faibles.
Toutefois, la classe moyenne est celle qui a fait les frais de cet embargo : fonctionnaires, retraités et petits entrepreneurs ont vu en un an la valeur de leurs économies réduite de moitié. Une mauvaise nouvelle pour Washington, car paradoxalement, c’est la classe qui aurait pu être à l’origine d’un changement social et politique qui a été touchée. Le secteur automobile qui, en 2010, a fabriqué plus de 1,6 million de véhicules, travaille désormais à capacité réduite, et la production 2012 a baissé de 36 %.
Voilà un an, l’Ayatollah Ali Khamenei avait décrit la dépendance iranienne du pétrole comme un phénomène dangereux. Pour M. Khamenei, la solution réside dans ce qu’on appelle « l’économie de la résistance », c’est-à-dire dans la capacité de se diversifier en misant sur la production industrielle et sur l’innovation technologique. Une bonne idée, selon les analystes, mais difficile à mettre en place tant que les sanctions perdureront, dont les effets concernent tous les secteurs de l’économie.
En effet, diversifier exige des investissements qui, à leur tour, nécessitent de l’argent, c’est-à-dire ce même argent qui manque actuellement dans les caisses de l’État suite aux sanctions.
C’est un peu comme le serpent qui se mord la queue. L’embargo empêche les banques d’utiliser le réseau bancaire SWIFT pour effectuer des transactions financières. L’embargo a également imposé aux autres pays de ne pas acheter de pétrole à Téhéran, et il a incité de nombreuses entreprises internationales à interrompre leurs approvisionnements manufacturiers de la théocratie. « Dans chacun de nos mouvements, on rencontre un obstacle extérieur. Chaque jour, les États-Unis se liguent contre nous, » a commenté plusieurs fois le ministre de l’Industrie, du Commerce et des Mines, M. Mehdi Ghazanfari.
Mais comme la crise économique mondiale le montre, pour donner une dose d’oxygène à l’économie, des réformes sont nécessaires, réformes qui, selon Hossein Askari, professeur de Commerce international à l’université George Washington, doivent être structurelles avant d’être économiques. Qu’est-ce que cela signifie ? Qu’il n’est pas possible de créer des institutions efficaces avec une corruption à tous les niveaux. En effet, avant d’obtenir une économie saine, l’état de droit et le respect de la loi doivent être en place.
Serena Grassia, journaliste italienne