Samedi 7 septembre, des milliers de Cambodgiens défilaient dans la capitale du royaume pour protester contre les résultats des élections législatives de juillet.
« Dans une situation post-électorale toujours sensible […], il est recommandé à nos compatriotes d’éviter tout rassemblement publique et de s’informer de l’évolution de la situation » affichait sobrement ces derniers jours le site de l’ambassade française au Cambodge. Non que le Cambodian National Rescue Party (CNRP), le parti d’opposition, organisateur de la manifestation massive annoncée samedi 7 septembre, se soit fait particulièrement menaçant ou belliqueux, bien au contraire. Dans la semaine qui précédait la manifestation, la publication d’un code d’éthique énumérant les expressions verbales proscrites, afin d’éviter tout dérapage. Jeudi et vendredi dernier, des « entraînements à manifester » donnant à voir, à Phnom Penh, des acteurs jouant les policiers comme les protestataires, et enseignant à une foule attentive et silencieuse l’art d’un défilé calme et sans accrocs. Pas d’armes, pas de cris, pas d’insultes, mais du silence et des lotus, des bougies et de l’encens. « Nous prierons et resterons courtois », soulignait encore jeudi dernier l’opposant et président du CNRP Sam Rainsy dans le Cambodia Daily.
L’objet de la douce et bouddhiste colère de ce dernier ? Les résultats des élections législatives du 28 juillet dernier, donnant vainqueur le parti au pouvoir, le Cambodian Nationality Party (CNP) et son dirigeant depuis 1985, Hun Sen, avec 68 sièges sur les 123 existants. Le CNRP s’estime floué d’une dizaine de sièges par les malversations du CNP et défile donc, dans le calme, pour réclamer sa victoire confisquée.
Une douceur de procéder qui n’a pas empêché les rues de Phnom Penh de s’emplir des forces anti-émeutes, ni les escouades de police de la capitale du royaume de fouiller tous les véhicules en mouvement. C’est que Hun Sen est nerveux ; en face de lui, une opposition unie qu’il ne parvient plus à briser. Après avoir fait condamner Sam Rainsy à 11 ans de prison et l’avoir forcé à l’exil en 2005, il le fait gracier par le roi et lui autorise un retour au Cambodge, espérant d’une part conserver les atours d’une démocratie pluripartite chère à ses interlocuteurs occidentaux et caressant d’autre part le projet d’une coalition avec son rival. Mais Sam Rainsy ne cède pas.
Toutefois, si la manifestation s’est déroulée dans le calme, le Conseil Cambodgien n’a fait qu’entériner les résultats de juillet. Hun Sen garde donc à ce jour une main de fer sur le Cambodge, auquel les élites politiques et commerciales restent inféodées par un maillage serré de mariages et d’alliances familiales. Sam Rainsy a fait part samedi, au Cambodia Daily, de son projet de procès contre le CNP, sans en préciser la date.