La représentation de la femme est devenue un enjeu crucial pour de nombreux médias. Première concernée : la télévision, accusée de véhiculer stéréotypes et préjugés. Le Forum Mondial Convergences, qui s’est tenu à Paris les 17, 18 et 19 septembre, a permis de s’interroger sur sa responsabilité dans la construction des stéréotypes hommes / femmes chez les enfants.
À l’international, des programmes « anti-stéréotypes » pour les 4-10 ans
Quelle est la place faite aux femmes dans les programmes jeunesse ? La problématique occupe une place de choix au sein des unités jeunesse des chaînes de télévision. Accusés d’accentuer les préjugés chez les plus jeunes, de nombreux médias tentent de se refaire une virginité en favorisant des programmes « anti-stéréotypes ».
Pour les accompagner dans cette démarche, la société The Wit a réalisé une étude portant sur un échantillon représentatif de programmes des chaînes publiques de 8 pays étrangers. Parmi ses conclusions, deux idées fortes : la lutte contre les stéréotypes hommes / femmes est un enjeu, parfois même une obligation dans ces pays, mais elle s’inscrit avant tout dans une logique de promotion de la diversité d’une manière générale.
La Suède fait figure de modèle en la matière. Il faut dire que le rôle de la télévision publique y est pris très au sérieux, notamment dans les programmes « pre-school » et chez les 6-10 ans. Illustrations de cet engagement : une série d’animation dans laquelle Dieu est une femme, une autre dont le héros a deux mamans, ou encore celle contant les aventures d’une bande de robots, en partie composée de filles et d’un robot n’ayant pas encore choisi son genre.
Identification et empathie pour mieux accepter l’altérité
Soucieuse de s’aligner sur les « best practices » des pays voisins, la France prend garde à ne plus véhiculer de stéréotypes indus sur ses chaînes de télévision. Néanmoins, il en reste encore quelques-uns à éradiquer chez les enfants.
Stéphanie Fourneraut, psychologue au sein de l’unité jeunesse de TF1, est chargée de superviser l’ensemble des programmes, qui s’adressent principalement aux 4-10 ans. Elle plébiscite ceux qui promeuvent la diversité et la mixité, et ceux qui incitent les jeunes spectateurs à se mettre à la place de personnages jugés « différents » : filles, roux, gros, handicapés…
Mais attention à ne pas accumuler les stéréotypes, sous peine de virer à la caricature. Tel ce personnage féminin, obèse, noir, s’habillant et se maquillant outrageusement, ayant été jugé « peu crédible ». « On travaille également sur la représentation physique des personnages, ajoute Stéphanie Fourneraut. On s’attache à atténuer les formes sexuées afin qu’elles se rapprochent davantage des critères physiques des enfants ». Des programmes qui misent donc sur l’identification et l’empathie pour mieux faire accepter l’altérité.
Les médias comme reflet des préoccupations politiques
Alors, pourquoi la France affiche-t-elle ce léger retard malgré ses efforts ? « En Suède, les dirigeants des partis politiques prennent à cœur la question de l’égalité hommes / femmes, qui est ensuite relayée par les médias » constate l’historienne Elisabeth Elgan, maître de conférences en Histoire à l’Université de Stockholm. Or, ce désir d’égalité manquerait cruellement chez les élus français. En reflétant les préoccupations des politiques, les médias contribueraient à véhiculer des stéréotypes de genre. CQFD.
La Suède reposerait donc sur un système pyramidal « top-down » avec, au sommet, des politiques acquis à la cause paritaire et qui influent sur les médias, sensibilisant ainsi la société dans son ensemble. Partant de ce constat, à quand un système français « bottom-up » dans lequel les valeurs d’égalité hommes / femmes, partant de la société elle-même, gagneraient par capillarité les pouvoirs politiques ?