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11H06 - mardi 5 novembre 2013

De nouveau concepts pour un entre deux mondes : de « Lost in Translation » à la Disruption

 

 

Le film de Sofia Coppola est sorti en 2003.

Le film de Sofia Coppola est sorti en 2003.

Nous sommes entre deux mondes.

D’un côté, le monde économique et financier actuel qui ne fait plus ses preuves, qui prend l’eau de toute part et qui se raidit pour ne pas tomber, de l’autre côté un nouveau monde économique et social basé sur le collaboratif, sur une plus juste répartition des richesses et une beaucoup plus forte prise en compte des difficultés environnementales de notre petite, toute petite planète.

 

Alors justement, de quoi pourrait être fait demain, disons les trois prochaines années ?

Les prévisions sur les plans de l’économie, de la finance, du climat social, de l’environnement, des ressources énergétiques, des ressources en eau et en alimentation ne sont pas optimistes, loin s’en faut. Nos anciens repères sont en train de voler en éclat. C’est un peu comme si nous étions « Lost in Translation » – cf. le très sensible film de Sophia Coppola, mais ici je le traduis tout à fait littéralement par « nous sommes perdus dans cette translation, dans cette transmutation »… Nos anciens repères ne correspondent plus à rien, alors que les nouveaux commencent timidement à arriver. Car c’est à nous de continuer à les faire émerger, c’est à nous de prendre la mesure de tous les bouleversements mondiaux qui nous attendent prochainement et de reconstruire un autre système, une autre vision, voire une disruption*, un nouveau New Deal.

 

Un petit exemple pour illustrer mon propos : les querelles autour du changement climatique ont fait rage ces trois dernières années. Pourtant, que les experts soient d’accord ou non entre eux, le résultat est le même et il est de plus en plus visible. Réchauffement climatique ou pas, le journal de 20 heures nous montre de plus en plus souvent des images de centaines de villages, de territoires et de personnes submergés par la montée du niveau de la mer, par des typhons, des tremblements de terre, etc. Mais tant qu’en France nous ne subissons pas d’impact direct, ce n’est pas si grave, penseront certains… Car nous sommes liés à la théorie de la proximité. Ce qui se passe près de chez nous nous touche beaucoup plus que ce qui est au loin. Un tremblement de terre en Italie nous touche davantage émotionnellement que le même au Japon. Nous sommes loin d’avoir anticipé suffisamment les modifications profondes du climat en cours. Or, ces modifications climatiques ont de mois en mois un impact global dans l’économie que nous sous-estimons beaucoup, en négligeant l’effet papillon.

Nous sommes en ce moment en train de vivre une période sans précédent de déconstruction du système économique et financier mondial et nous serons très bientôt confrontés à des problématiques lourdes impactant notre quotidien et obligeant à reconstruire une autre économie, un autre mode de vie et un autre rapport à la consommation. En témoigne par exemple la préoccupation grandissante autour de l’eau et de l’accès à l’eau.

 

Un excellent travail de réflexion a été mené par l’Ordre des Experts-Comptables sur les marchés du futur 2008-2012, sous la direction du prospectiviste René Duringer. Je propose de le poursuivre dans le temps et de se projeter sur quelques tendances plausibles à l’horizon 2017 :

 

– Le pouvoir d’achat va décliner davantage :

Les solutions de location vont se multiplier pour aider les ménages à gérer : location de véhicules à plusieurs familles, développement du recyclage des produits de la vie courante. On va aller aussi vers une explosion des produits low-cost et des produits conçus et commercialisés pour la Base de la Pyramide (Bop).

 

– Les études de santé vont signaler de plus en plus les dangers d’une alimentation industrielle :

Le bio va continuer de croître et surtout les AMAP, qui seront une forte alternative d’approvisionnement aux grandes surfaces. Le « consommer local » va se développer. Les consommateurs ne supporteront bientôt plus du tout les colorants, les additifs, etc.

 

– L’isolement social va exploser, le repli sur soi, sa famille, sa tribu risque de se renforcer, ainsi que le sentiment de solitude malgré la profusion des modes de connexions virtuelles :

Nous aurons besoin de développer des lieux de lien social, pour tous ceux qui sont temporairement en marge du système – en priorité les demandeurs d’emplois et les personnes âgées. Bientôt, on constatera une saturation du phénomène des réseaux sociaux, pour revenir à davantage d’événements physiques organisés.

 

– La gestion des personnes âgées du 4ème âge :

Vu nos statistiques démographiques, cette gestion va nécessiter la création de très nombreuses infrastructures spécialisées de prise en charge à domicile et d’utilisation d’outils de gérontechnologie, étant donné la réduction drastique des temps d’hospitalisation.

 

– Le système éducatif va devoir se mettre en phase avec la réalité des entreprises et s’ouvrir au monde :

Le premier pas réalisé en ce sens est l’intégration très prochainement dans les programmes d’éducation au collège et au lycée d’une nouvelle discipline : la création d’entreprise. Les MOOC (cours en ligne ouvert et massif) sont en train de révolutionner l’enseignement et de nous permettre d’étudier à distance dans le monde entier.

 

– Les individus seront  de plus en plus conscients des enjeux écologiques pour la planète :

Cette prise de conscience est liée à la génération Y, qui représentera un salarié sur 2 en 2020, et qui sait qu’elle vit sur une planète dont les ressources ne sont pas extensibles à l’infini. Il y aura urgence à développer dans toutes les entreprises des pratiques écologiques et durables, et pas seulement dans les grands groupes, et à redonner du sens à la valeur travail.

 

– La défiance envers les institutions et systèmes financiers, et la mondialisation à tout crin ne fera qu’augmenter, tandis que l’encouragement à la création d’entreprise sera de plus en plus fort :

Certains entrepreneurs sont déjà passés à l’étape des « bogsentreprises », les « entreprises beyond organizational and governmental systems », avec l’essor des communautés d’entrepreneurs et des coopératives d’activités. Ce mouvement va s’accélérer dans les années à venir, propulsant enfin une économie plus sociale et solidaire.

 

Comme vous le constatez, cette liste est loin d‘être exhaustive. Et si nous la complétions ensemble ?

A vous de jouer !

 

Valérie Weill

Consultante en création d’entreprise

 

 

* Disruption

Stratégie créative inventée par Jean-Marie Dru de l’agence BDDP dans les années 1990. Ce modèle créatif brise les conventions établies pour repositionner les marques et les produits selon un processus en trois phases :

Convention : inventaires de tous nos préjugés, opinions, stéréotypes sur ce que doit être un produit, une marque, bref sur tout ce qui emprisonne notre manière spontanée de percevoir.

Exemple pour Mac : Apple est une marque qui ne fait pas le poids face aux PC. Elle devrait se positionner en rival du PC.

Disruption : travail de repositionnement de la marque ou du produit, en déstabilisant justement les conventions établies, voire en les brisant, quand elles sont devenues trop limitantes.

Exemple pour Mac : un ordinateur n’est pas qu’un assemblage technologique, il peut aussi véhiculer des valeurs, une philosophie de l’innovation.

Vision : il s’agit de donner un nouveau sens à la marque ou au produit et d’imaginer une vision à long terme en laissant de la place à l’imagination et au rêve.

Exemple pour Mac : les valeurs d’Apple sont la créativité, l’innovation et l’anticonformisme : « Think different ».

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