L’association franco-américaine BlueEnergy, fondée en 2003 par Mathias Craig, a pour vocation d’aider au développement énergétique de populations isolées dans les pays pauvres. Mais elle ne se contente pas d’apporter une aide d’urgence et privilégie une approche durable : elle fonde son action sur la nécessité d’apprendre aux peuples à se développer par eux-mêmes, notamment grâce au transfert de compétences.
Le Nicaragua est le pays le plus pauvre d’Amérique Centrale. Dans la ville de Bluefields, sur la côte caribéenne, 92% de la population n’a pas accès à l’eau potable. Dans cette région, les nappes phréatiques sont très fortement contaminées par toutes sortes de bactéries et pathogènes. Il n’existe aucun service d’assainissement. Cela pose de graves problèmes de santé publique, notamment concernant les enfants. C’est donc là-bas que BlueEnergy a décidé de s’installer afin de lutter pour l’accès à ce droit vital et de fournir de l’électricité aux populations locales.
Pour vous faire une idée générale de leur action, voici quelques mots de Mélissa Cran, coordinatrice de projet assainissement chez BlueEnergy, qui revient d’une mission au Nicaragua.
Dans cette région, BlueEnergy implante des puits, mais pas seulement. En s’associant à l’organisation canadienne Center for Affordable Water and Sanitation Technology (CAWST), elle a développé un programme de filtres à eaux écologiques, durables et faciles à concevoir. En effet, ils utilisent des matériaux communs qui se trouvent partout et se bonifient avec le temps. Les filtres Biosand se composent d’une simple enveloppe de béton contenant plusieurs couches de sable et de graviers qui piègent et éliminent les sédiments, pathogènes et autres impuretés de l’eau. En 3 semaines, une couche bactériologique se forme au sommet des couches de sables et détruit les bactéries pathogènes. Plus le temps passe, plus cette couche biologique est efficace.
Mais la force de BlueEnergy est de ne pas se contenter de fournir aux habitants un dispositif technique. L’équipe locale est composée d’employés nicaraguayens formés par l’association, de volontaires internationaux, et appuyée par des bénévoles en missions solidaires. Ensemble, ils proposent des ateliers pour apprendre aux populations comment les fabriquer, les utiliser et les entretenir, afin de diffuser cette compétence au plus grand nombre. L’équipe nicaraguayenne entreprend également des actions d’éducation sur les considérations pratiques sanitaires et d’hygiène, ainsi qu’une sensibilisation aux énergies renouvelables.
La production d’une énergie verte et autonome est également un enjeu primordial pour ces populations qui ne peuvent compter sur les infrastructures de l’Etat – inexistantes ou extrêmement vétustes – du fait d’un échec de la politique d’électrification rurale comme cela est souvent le cas dans les pays pauvres. BlueEnergy se propose donc de fournir des équipements solaires afin de mettre en place un système d’alimentation durable de batteries électriques pour alimenter les écoles, les centres sociaux, les établissements de santé ainsi que les maisons particulières grâce au micro-crédit.
Avant de passer au tout-solaire, l’association utilisait un système hybride qui combinait éolien et solaire. « Nous ne faisons plus d’éolien parce que le coût de la maintenance s’est révélé trop lourd. Les problèmes étaient fréquents à cause d’orages très violents dans la région et ne pouvaient pas être réparés par les populations sur place » explique Michèle Grégoire, la présidente France de BlueEnergy.
Là encore, l’association ne se contente pas de livrer un besoin d’urgence dans une région en cruel manque de développement. Les installations sont construites sur place par les habitants, ce qui permet de nouveaux transferts de compétences et de relancer l’emploi sur place. L’enseignement technique est un aspect majeur de l’action de BlueEnergy sur la côte caribéenne, car il permet un auto-développement et une autogestion des populations qui améliore considérablement et durablement leurs conditions de vie. « C’est la base de la philosophie de notre action. On a déjà quelques raisons de satisfaction, on a constaté depuis dix ans la reprise en main par les habitants de leur destin et une évolution des pratiques » se félicite Michèle Grégoire.
L’organisation a ensuite tenté de s’associer à l’Instituto Nacional de Technologia (INATEC), un institut national de formation technique et professionnelle, avec lequel elle travaillait à la mise en place d’un cursus dédié aux énergies renouvelables et à l’électrification rurale. Cet accord n’ayant pas pu aboutir, BlueEnergy s’occupe désormais seule de ce projet. « On assure ce rôle en recevant experts et chercheurs, mais sous forme non-officielle » confie Michèle Grégoire. « Nous sommes aussi un centre de Recherche & Développement. Nous avons réalisé une étude sur le mode de latrines le mieux adapté au climat et aux populations. Deux types on été testés avec eux. Nous avons finalement recommandé des latrines sèches en milieu urbain et des latrines avec fosse septiques et évacuation des eaux usées en milieu rural » ajoute-t-elle.
« Nous fournissons un gros travail d’enseignement sur la gestion de l’eau et de l’énergie, et la meilleure utilisation à faire des installations. Un programme se consacre aux jeunes des communautés rurales confrontés au changement climatique pour adapter les pratiques agricoles, de pêche et de conservation de l’environnement. De nouveaux programmes pour un développement plus global des familles vont être prochainement étudiés, notamment en terme d’indépendance alimentaire. Depuis quelques années, nous travaillons à la sensibilisation des populations aux problématiques environnementales, pour une moindre consommation du bois de cuisson et en terme de traitement des déchets, avec notamment un bio-digesteur pour l’abattoir de Bluefields qui permettra aussi de produire de l’eau chaude pour l’abattage des porcs, du compost et plus tard de l’électricité. Nous souhaitons aussi utiliser de plus en plus la Biomasse, qui combinée au solaire permettrait de distribuer l’énergie et de l’utiliser avec le moins de gaspillage possible » conclut Michèle Grégoire.
Une initiative éco-responsable et innovante pour le développement de populations isolées et démunies qu’on aimerait voir grandir. Finalement, pas besoin de s’appeler ACF ou la Croix Rouge pour avoir un impact significatif sur des milliers de vies.
André-Jean Guérin, ce Héros
La Course aux Héros se tiendra dimanche 22 juin au Parc de Saint-Cloud. Pour la 4ème année consécutive, le principe n’a pas changé : chaque personne qui y participe s’engage pour une association et tente de récolter le maximum de dons. André-Jean Guérin, membre du Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE) pour la Fondation Nicolas Hulot pour la nature et l’homme, représentera BlueEnergy dans cette course. Soutenez-le ICI.
« Si j’ai choisi de courir dimanche, c’est d’abord pour faire connaitre cette petite association que j’accompagne et soutiens depuis ses débuts en France. Ce qu’ils font est remarquable, c’est une véritable cause humanitaire et humaniste. En outre, leurs moyens de développement préservent l’environnement, ils prônent une utilisation durable et responsable des ressources. Mais ce qui me parait crucial, c’est leur volonté de confier les clés des associations locales aux populations sur place, d’autant que leurs initiatives attirent nombre de jeunes qualifiés qui viennent en mission solidaire apporter de nombreuses compétences au Nicaragua, ce qui est également bénéfique pour eux, tant que le plan professionnel qu’humain » explique André-Jean Guérin.