Les enjeux franco-iraniens de la négociation sur le nucléaire.
Cette semaine décisive qui pourrait aboutir à un accord historique sur la question nucléaire – et le premier anniversaire de la présidence Rohani prévu le 1er août sont l’occasion de formuler le vœu d’une meilleure compréhension entre Iraniens et Français.
Il faut remonter quinze ans avant son déclenchement pour comprendre le processus qui a conduit à la Révolution islamique en Iran en 1979. C’est en effet à partir de 1964, lorsque le régime Pahlavi décide d’exiler l’imam Khomeiny vers la Turquie, l’Irak puis finalement vers la France en 1979, que commence véritablement cette Révolution.
Après cent seize jours passés à Neauphle-le-Château, près de Paris, une ville très respectée des Iraniens, l’imam Khomeiny quitta Paris pour Téhéran. Les événements qui suivirent mirent fin à 2500 ans de royauté dans le pays.
Une République religieuse
En organisant un référendum deux mois tout juste après la victoire de la Révolution islamique, les Iraniens ont répondu largement en faveur de l’établissement de la République Islamique en tant que modèle républicain basé sur la démocratie religieuse.
Ce système est à l’origine d’acquis et de progrès de tous bords dans le pays au cours des trente-cinq dernières années, évolutions souvent incomprises en Occident.
Contrairement à la France, qui est un pays laïc, en Iran, ce sont les valeurs et les principes islamiques qui fondent la République. La majorité du peuple iranien est croyante et suit et pratique les valeurs issues de l’Islam.
Lacompréhension de cette réalité religieuse conditionne la compréhension de la République islamique, ainsi que les politiques et les actions de l’Iran.
Un pays islamique et moderne
Depuis 1979, et en dépit des challenges comme huit ans de guerre menée par l’Irak de Saddam Hussein, soutenu par les Occidentaux, contre l’Iran et aussi les sanctions économiques qui ont affecté durement l’Iran ces dernières années, de nombreux progrès ont été réalisés dans différents domaines comme la science, la médecine, l’énergie nucléaire, le laser, les nanotechnologies, les industries militaires, la culture, le lancement des satellites, les droits, l’éducation, le système de santé…
Tous les présidents de la République ont été démocratiquement élus avec une alternance exemplaire entre rivaux. Que veut dire la démocratie ? L’Iran est une démocratie. L’actuel président Rohani est sorti vainqueur de l’élection présidentielle de juin 2013 avec une différence de 3% de vote.
La France et l’Iran à l’aube d’une amitié nouvelle
Aujourd’hui, c’est dans l’intérêt de tous de résoudre les problèmes, et encore davantage depuis l’accord de Genève sur le dossier nucléaire. Les élections présidentielles iraniennes ont créé de nouvelles opportunités, notamment pour comprendre les réalités de l’Iran.
Dans de nombreux domaines économiques, scientifiques et culturels, comme l’environnement, la lutte contre la drogue, la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme, la médecine, l’art iranien, le pétrole et le gaz notamment, l’Iran et l’Occident pourront convenablement développer et suivre leurs coopérations réciproques.
La France, notamment en tant que pays hôte et pays qui a chaleureusement accueilli l’Imam Khomeiny sur son sol lors de exil, a depuis toujours fait l’objet de respect de la part des Iraniens et nous devons préserver vif et manifeste ce respect.
L’Iran, comme puissance régionale, et la France, l’un des cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU, ont de nombreux intérêts à partager au Moyen-Orient et peuvent développer leur coopération et leur dialogue.
Certes, durant le mandat du Président Sarkozy, les relations bilatérales n’étaient pas au mieux, mais on peut garder l’espoir que suite aux évolutions positives après l’accord de Genève, les deux pays puissent adopter une nouvelle approche dans leur coopération bilatérale.
Il est vrai que cela n’apparaît pas comme une évidence à de nombreux Iraniens pour qui l’intransigeance française manifestée lors des récentes négociations suscite de la méfiance, mais rien ne pourra diminuer les relations historiques entre les deux pays, connus pour la grandeur de leurs civilisations, de leurs cultures et de leurs histoires riches d’événements constructifs.
Il est temps que les deux pays évitent les malentendus et démarrent une nouvelle phase basée sur l’amitié et renforcent davantage leurs relations bilatérales.
Seyed Mohammad Sadatinejad
Chercheur en relations internationales
Diplomate