Se mobiliser autrement ou braver carrément l’état d’urgence ? De nombreuses associations appellent la société civile à signifier d’une façon ou d’une autre leur engagement pour le climat le 29 novembre malgré l’annulation de la grande marche à Paris.
En septembre 2014, la marche mondiale pour le climat avait réuni à Paris, selon les sources, entre 5000 et 25.000 personnes. Cette année, une mobilisation encore plus importante pouvait être attendue : prévue à la veille de la date d’ouverture initialement prévue de la Conférence Paris climat (COP21), elle devait envoyer aux négociateurs le signal fort que la société civile est pleinement engagée dans la lutte contre le réchauffement climatique, quelque soient les décisions prises par les politiques, et qu’elle ne se satisferait pas de demi-mesures.
Son annulation, à la suite de la proclamation de l’état d’urgence pour une durée de trois mois, place la France dans une situation pour le moins paradoxale : alors qu’au moins 57 marches pour le climat auront lieu dans 157 pays du monde, il n’y aura personne dans les rues du pays qui doit accueillir les négociations visant à l’obtention d’un accord mondial devant limiter le réchauffement planétaire. Et qui est, qui plus est, mondialement réputé pour la réactivité de ses habitants dès qu’il s’agit de descendre dans les rues. Pour de nombreuses associations et personnalités engagées pour la protection environnementale, ce n’est tout simplement pas envisageable. Si donc, vous souhaitez, malgré l’interdiction de manifester, vous mobiliser pour le climat le 29 novembre, des solutions alternatives ont été mises en place.
La mobilisation symbolique
Comme l’indiquent désormais les affiches appelant à marcher pour le climat, placardées un peu partout dans Paris avant que la préfecture ait annulé la manifestation, le plus simple reste d’envoyer ses chaussures place de la République comme l’a proposé l’ONG de cybermilitantisme Avaaz.
Pour tous ceux qui trouvent cette mesure de substitution un peu légère et ne s’identifient pas à leurs bottes ou baskets au point de les envoyer manifester à leur place, un dispositif digital soutenu par Facebook, March4me a été mis en place afin de faire défiler le reste du monde au nom des Français : la plateforme doit permettre de mettre en relation ceux qui auraient souhaité défiler en France avec les manifestants d’Asie, d’Afrique, du reste de l’Europe ou des Etats-Unis. Ceux-ci les représenteront en inscrivant leur nom et en collant leur photo sur une pancarte.
Manifester en personne
Les associations Alternatiba et Coalition 21 Climat proposent, quant à elles, de former une chaîne humaine sans perturber la circulation piétonne ou automobile entre la place de la République et la station de métro Nation, de 13 à 14h le dimanche 29 novembre. Un symbole commun sera également proposé afin que chacun puisse montrer son engagement. L’appel, relayé entre autre par Attac, convoque, contre l’état d’urgence sécuritaire décrété par François Hollande, « l’état d’urgence climatique ». Il souligne également le caractère paradoxal du fait que les manifestations sportives et les marchés de Noël aient été maintenus.
Enfin, de façon plus radicale, de nombreuses personnalités dont le directeur de recherche au CNRS, Frédéric Lordon, appellent à braver carrément l’état d’urgence le 29, en se ralliant envers et contre tout place de la République à 14h : s’il y a bien selon eux une « valeur française » à défendre, comme le déclarent régulièrement les dirigeants depuis les attentats, c’est celle « d’avoir refusé depuis au moins deux siècles de laisser la rue à l’armée ou à la police ». Les signataires de l’appel dénoncent également les abus liberticides et les violences policières entraînées par la proclamation de l’état d’urgence. Ceux qui bravent l’interdiction de manifester en Île-de-France s’exposent cependant au risque d’encourir des sanctions pouvant aller jusqu’à six mois d’emprisonnement.
Bref, quoi que décident les autorités, il sera toujours possible de s’engager pour le climat le 29 novembre. Tout comme le 12 décembre, au lendemain de clôture de la conférence, date à laquelle une autre manifestation avait été prévue et qui restera une « une journée de mobilisation » selon Malika Peyrault, des « Amis de la terre ». Et tout comme les 364 autres jours de l’année.