Les vœux des ministres des Affaires étrangères, de la Défense, et enfin du président de la République se succèdent et l’on finit par comprendre quelle est la politique étrangère de la France : avancer la démocratie et faire face au terrorisme partout et au nom de tous. Les trois hommes ont parlé de la joie de vivre, de la vitalité culturelle, de notre bouillonnement intellectuel — la nuit des Idées du 27 janvier qui sera organisée au Quai d’Orsay en est le énième exemple. La France est au service du monde, la France fait face à l’ennemi djihadiste au Sahel, au Levant, dans les rues de Paris.
Le ton est sans cesse plus martial, à commencer par Jean-Yves Le Drian qui fait figure de grand commandant en pleine guerre. Pour ses vœux, qui ne sont plus précisément des vœux à la presse mais des « vœux » tout court, dans les locaux Grand Siècle de l’école de santé du Val-de-Grâce, le ministre a d’abord présidé une prise d’armes, avec fanfare, comme pour une cérémonie. Puis il s’est lancé dans un discours martial, rappelant la place des armées françaises dans le monde et au cœur de la nation. Au Sahel, au Levant, au Liban, en Centrafrique, au Burkina Faso, dans les profondeurs de l’océan. L’acquisition de nouveaux matériels, assortis de nouveaux budgets, et le renforcement de la réserve opérationnelle nous mènent tout droit à un rappel de la part de Le Drian : le président de la République souhaite créer une Garde nationale.
Bref, nos armées sont partout, pour défendre nos intérêts mais aussi, et peut-être encore davantage, notre démocratie et notre mode de vie. Ces deux éléments sont à proprement parler des biens de l’humanité, et le Président n’a-t-il pas fait comprendre, par ses vœux que la marche vers la démocratie était irrévocable partout dans le monde ? Ces vœux 2016 marquent le début de la politique étrangère de la démocratie armée, cuirassée, casquée. La joie de vivre sous protection militaro-policière. La fédération du monde entier autour de cette avancée vers la culture, la science, la fête, la liberté. Tout cela revêt un arrière-goût de peuple joyeux en armes, car pour la première fois depuis plus d’une génération, le lien est fait entre démocratie et protection de celle-ci. On danse démocratiquement, et le terroriste qui déteste tout cela est tenu en respect par le militaire. C’est la nouvelle formule française en ce début d’année 2016. On ne peut que suivre dans l’espoir de ne pas subir de nouveaux attentats. Or on a compris le lien entre Rakka et le 11e arrondissement. Encore faut-il se demander jusqu’où et comment veut-on bien se casquer et s’armer, et puisque nous sommes en guerre, quelle sera donc la condition de la victoire ? C’est beaucoup à faire pour un gouvernement arrivé au pouvoir dans une optique très différente. La menace terroriste est désormais l’ennemi principal de notre démocratie. Le risque d’une installation d’un système policier trop intrusif n’a pas été évoqué. Il le sera forcément, un jour prochain.