Les Japonais auraient-ils trouvé en Kotoshogiku le digne successeur de Taiho, vainqueur de 32 tournois dans les années 1970 et disparu en 2013 ?
Si les spécialistes se préservent de tout faux espoir, cette victoire arrive à point nommé. Lauréat du tournoi du Nouvel An à Tokyo le 24 janvier dernier, le natif de Fukuoka a en effet mis fin à dix années d’attente, caractérisées dans le même temps par une domination des lutteurs mongols.
Au début des années 1990, il y avait eu déjà l’avènement de deux Hawaïens, connus au Japon sous les noms de Musashimaru et Akebono. En 1993, ce dernier devint le premier non-Japonais promu au rang de yokozuna (« grand maître »), le plus haut grade chez les sumotoris. Il sera suivi par son compatriote en 1999… Et plusieurs années après, par quatre « demi-dieux » mongols : Asashoryu, Hakuho (35 tournois glanés !), Kakuryu et Harumafuji.
En 2005, le Bulgare Kotooshu (de son vrai nom Kaloyan Mahlianov) avait lui aussi provoqué une minirévolution en devenant le premier ozeki (« champion », le grade actuel de Kotoshogiku) européen, avant de remporter la très prestigieuse Coupe de l’Empereur en 2008. Il y a eu aussi l’Estonien Baruto (de son vrai nom Kaido Höövelson), le Tchèque Takanoyama (né Pavel Bojar) et le Hongrois Masutoo (Attila Toth) pour confirmer l’arrivée en masse d’excellents lutteurs d’Europe de l’Est, et même d’Amérique du Sud avec le Brésilien Kaisei.
Quarante ans après l’arrivée des premiers rikishis (« lutteurs ») étrangers dans l’archipel, la donne a donc changé : aujourd’hui, ce sont les lutteurs japonais qui courent après la reconnaissance. Une situation forcément embarrassante pour un pays empreint de traditionalisme et qui, il y a encore trente ans, se levait fier de ses représentants.