Congo
15H53 - mardi 9 février 2016

L’Éducation n’est gratuite que pour l’État

 

La grogne sociale au Congo n’épargne pas le domaine de l’enseignement qui est durement frappé par le manque d’investissement de l’État.

 

Salle de classe à Brazzaville - Crédit photo : congo-liberty.com

Salle de classe à Brazzaville – Crédit photo : congo-liberty.com

 

Depuis des années, les parents d’élèves congolais sont largement mis à contribution pour soutenir la scolarité de leurs enfants : paiement du matériel scolaire, des outils pédagogiques, voire des enseignants eux-mêmes.

La gratuité de l’école congolaise ne semble plus être qu’un leurre.

Avec une cagnotte budgétaire de 4 milliards de francs CFA pour l’année 2015-2016, les établissements scolaires du pays (du préscolaire aux lycées) devaient voir leurs frais de gestion assurés. Un fonds de soutien à l’alphabétisation et à la rescolarisation, financé par la taxation des sociétés extractives et forestières, avait même vu le jour en septembre 2015 sous l’impulsion d’Anatole Collinet Makosso, ministre de l’Enseignement.

 

Mais la réalité est autre.

 

Antoine Mobendza, directeur du collège d’enseignement général de Tongo, une localité du département de la Cuvette, dresse un constat chargé d’amertume.

Son établissement dont l’unique bâtiment est en état de délabrement dispose d’un seul enseignant, professeur d’éducation physique et sportive, qui assure les cours de toutes les matières, de la sixième à la troisième, pour 140 élèves. De plus, par manque de tables-bancs, la plupart des collégiens doivent s’asseoir par terre.

La situation paraît la même dans tous les villages de l’intérieur du pays, et la capitale congolaise n’est pas mieux lotie.

Réunis en assemblée générale le 30 janvier 2016 à Brazzaville, le collectif des enseignants vacataires de l’ENMA (École nationale moyenne d’administration) et de l’ENI (École normale des instituteurs) a décidé de suspendre les cours et toute autre activité pédagogique au sein de ces deux établissements jusqu’au paiement des arriérés de traitement, heures supplémentaires comprises.

 

L’abandon des pouvoirs publics

Pour résorber le déficit en personnel enseignant, l’État congolais mise, depuis le début des années 1990, sur l’intégration de milliers de volontaires sous l’autorité du ministère de l’Enseignement primaire et secondaire, de l’Alphabétisation, de la Jeunesse et de l’Éducation civique.

Ces bénévoles de l’enseignement, souvent plus nombreux que les enseignants titulaires, ne sont pas intégrés à la fonction publique. Ils sont pris en charge par les parents d’élèves, et ce jusqu’à 1 000 francs CFA par élève. En raison de l’absence de contrat avec l’État et du caractère aléatoire de leur rémunération, aucun contrôle d’assiduité ou de formation ne peut être exercé sur ces bénévoles.

Choisissant de les renommer « enseignants communautaires », le ministère de l’Enseignement primaire et secondaire avait promis qu’à partir d’octobre 2013 il prendrait en charge leur rémunération, mais ces promesses n’ont pas été suivies d’effet.

Depuis le 1er février 2016, un programme de volontariat a été lancé par les autorités avec l’appui du PNUD (Programme des Nations unies pour le développement) pour permettre de pallier les carences en postes d’enseignants. Près de trois cents jeunes ont été formés au maniement des programmes scolaires, à la déontologie professionnelle et à la pédagogie générale dans le cadre du plan national de développement.

Le gouvernement congolais choisit donc de privilégier le bénévolat dans la fonction publique éducative alors que les résultats observés aux examens d’État prouvent déjà que les objectifs pédagogiques sont loin d’être atteints.

Chroniqueur Congo