International
10H11 - mardi 29 mars 2016

Obama et Macri affirment leur leadership sur l’Amérique latine

 

Dans la continuité de sa visite historique à Cuba, le président des États-Unis a confirmé son positionnement latino-américain en rencontrant le chef d’État argentin. Ce dernier, dans sa volonté de renouer avec le monde des grandes puissances, avait précédemment reçu Matteo Renzi et François Hollande. Alors que pendant des années les relations étaient tendues entre son pays et les États-Unis, Mauricio Macri a réussi à faire venir Obama cent jours seulement après le début de son règne. Un tour de force pourtant loin d’être salué par tous. L’opposition politique, les organisations des droits de l’homme et de nombreux citoyens critiquent la venue du représentant d’un pays qui a directement collaboré avec la dictature dans les années 1970-80. Analyse.

 

Mauricio Macri en compagnie de Barack Obama, le 23 mars 2016. Crédit photo: Casa Rosada / Wikimedia Commons

Mauricio Macri en compagnie de Barack Obama, le 23 mars 2016. Crédit photo: Casa Rosada / Wikimedia Commons

 

Obama pose les bases d’un « fresh-start » avec l’Amérique latine

En pleine période de primaires américaines, Obama s’est donné pour objectif de réinvestir la scène latino-américaine par des actions fortes. La même semaine, il actait à Cuba la fin du gel des relations américano-cubaines en rencontrant Raul Castro au moment où en Colombie John Kerry exhortait les Farc et l’État colombien à trouver une issue à leur conflit historique. Troisième étape de ce nouveau départ, mercredi dernier, alors qu’il rendait visite à Mauricio Macri et le désignait comme nouvel interlocuteur privilégié des États-Unis en Amérique latine.

Juliana Awada, première dame argentine, Barack Obama et Mauricio Macri trinquent lors d’un cocktail privé au Centre culturel Kirchner - Crédits : Casa Rosada / Wikimedia Commons.

Juliana Awada, première dame argentine, Barack Obama et Mauricio Macri trinquent lors d’un cocktail privé au Centre culturel Kirchner – Crédits : Casa Rosada / Wikimedia Commons.

 

Sous la gouvernance des Kirchner (2003 – 2015), toute rencontre bilatérale entre les chefs d’État argentin et américain était impossible à cause de l’anti-impérialisme radical du couple présidentiel. À son accession au pouvoir, le successeur néolibéral de « Cristina », Mauricio Macri, s’est, lui, au contraire, empressé d’inviter le président américain. Obama a rapidement choisi d’honorer son invitation car en affirmant son soutien au nouveau gouvernement d’Argentine, il réalise une opération à double-détente. Accompagné de 400 chefs d’entreprise, il entend tout d’abord réinvestir un pays qui lui était fermé. Mais, comme il le dit lui-même : « Il n’y a pas que le monde économique qui prend acte des changements en cours à Buenos Aires. Le monde observe. Sous la présidence de Mauricio Macri, l’Argentine reprend son rôle traditionnel de leader dans la région. » Par sa déclaration, Obama intronise véritablement le nouveau président argentin référent principal de la politique extérieure du sous-continent. L’Argentine détrône le Brésil voisin qui occupait une place privilégiée sur la scène internationale avant d’être décrédibilisé par sa crise politique actuelle. Cette actualité brûlante a d’ailleurs constitué l’un des premiers thèmes abordés par Obama et Macri, tous deux se posant bel et bien en décideurs de la région. Choisir d’accorder cette position de force au nouveau visage de l’Argentine peut relever également d’un calcul stratégique. Le président des États-Unis parie sur la tendance traditionnelle des phénomènes politiques argentins à se propager sur l’ensemble de l’Amérique latine pour espérer que le tournant néolibéral de cette puissance du Cône Sud enterre définitivement la tendance bolivarienne de nombreux gouvernements latino-américains de gauche apparus dans les années 2000. Il s’agit aussi pour lui de s’assurer le soutien d’un pays qui a montré qu’il pouvait se placer en opposant redoutable capable de liguer les autres pays contre les États-Unis, comme lors du sommet de Mar del Plata en 2005 où Nestor Kirchner avait anéanti le projet d’union économique panaméricaine – l’Alca – de George W. Bush.

 

Macri choisit son camp

Réunion de Mauricio Macri et Barack Obama dans le palais présidentiel argentin. Crédit photo : Casa Rosada/Wikimedia Commons.

Réunion de Mauricio Macri et Barack Obama dans le palais présidentiel argentin. Crédit photo : Casa Rosada/Wikimedia Commons.

Sous l’ère Kirchner, la politique étrangère se faisait sur le mode de l’idéalisme en relations internationales : les chefs d’État choisissaient de ne s’allier qu’à des pays dont ils partageaient les idées (le Venezuela, la Bolivie, l’Équateur, etc.) et qui, comme la Russie, dénonçaient l’hégémonie nord-américaine.

À rebours de cette conception, Macri privilégie, lui, une posture réaliste dans ses relations internationales en s’entourant d’alliés plus consensuels. Il souhaite redorer l’image de son pays auprès des puissances occidentales. Lors de sa visite, François Hollande avait d’ailleurs salué cette orientation qualifiant l’Argentine de « plus crédible sur la scène internationale ». Se rapprocher des États-Unis permet à Macri non seulement de valider sa politique auprès de la tête de file des puissances occidentales mais également de renouer une collaboration avec un partenaire économique de taille. Dans la perspective de la venue d’Obama, il avait d’ailleurs pris soin d’apurer la dette dite « des fonds vautours » en remboursant les prêteurs de 2001 quitte à contracter un emprunt colossal, et particulièrement risqué au vu de la situation financière actuelle du pays. Mais le chef d’État ne veut pas sacrifier l’éventualité d’investissements nord-américains qui lui permettrait d’augmenter les liquidités dont l’Argentine manque.

Enfin, au-delà des intérêts économiques réciproques, les deux dirigeants partagent les mêmes priorités politiques de sécurité et d’enrayement du narcotrafic, thèmes sur lesquels ils ont signé des accords de coopération lors de leur rencontre.

 

Les droits de l’homme s’invitent au mariage

Si les deux hommes ont trouvé facilement des zones d’entente, une partie de la population argentine, elle, n’a cessé, durant la visite, de marquer son opposition à cette nouvelle alliance. En effet, deux sujets cristallisaient les critiques à l’égard de la visite d’Obama.

Tout d’abord, cette entente économique a réveillé les craintes des Argentins quant à un retour possible du néolibéralisme sauvage des années 1990. Mis en place par le président de l’époque Carlos Menem et piloté par les États-Unis, il avait précipité le pays dans une crise économique sans précédent.

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Cortège de manifestants dénonçant l’entente entre Mauricio Macri et Barack Obama avec la pancarte « Macri Go Home » (« Macri, rentre chez toi » en anglais) et « Patria Grande » (« Grande Patrie » en espagnol), devise des tenants de la conception bolivarienne des relations internationales des pays latino-américains. Crédit photo : Juan Carlos Garassino/Opinion Internationale

 

Susanna Malcorra, ministre des Affaires étrangères, a tenté de rassurer sur les intentions du gouvernement quant à ses relations avec les États-Unis. Elles ne seront, selon elle, « ni dans l’opposition permanente du kirchnérisme, ni dans les relations fusionnelles du Menemisme ».

En second lieu, le président américain est arrivé au moment même où l’on commémorait, à travers d’importantes manifestations, les quarante ans du coup d’État militaire qui installa une dictature, responsable de milliers de morts. À cette occasion, de nombreux manifestants ont rappelé la participation directe des États-Unis à cette période sombre de l’histoire argentine. En réponse, le président Obama a demandé pardon au nom de son pays et promis de déclassifier les archives américaines concernant la mise en place du plan Condor, symbole de l’engagement américain aux côtés de la junte militaire argentine dans l’organisation de ce « terrorisme d’État ».

Si ses excuses ont été internationalement remarquées, le président Obama n’est en revanche pas parvenu à convaincre lorsqu’il a déclaré reconnaître les « contributions de Mauricio Macri pour la défense des droits de l’homme dans la région » alors même que ce dernier est accusé de les bafouer sur son propre territoire. En janvier, l’emprisonnement de l’activiste Milagro Sala avait été en effet durement condamné par les organisations argentines des droits de l’homme autant que par le pape François, Amnesty International, et l’Organisation des nations unies.

 

 

 

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