Connected Citizens
11H52 - mardi 24 mai 2016

La souveraineté numérique : un combat d’arrière-garde ?

 

La souveraineté numérique est considérée par certains comme un débat de vieux schnock… Appréciation qu’ils argumentent en général très faiblement, voire pas du tout.

Crédit photo : NASA

Crédit photo : NASA

Et pourtant, la souveraineté numérique est plus qu’un concept, plus qu’une problématique d’intellectuels, plus qu’une nouvelle mode vintage. C’est un enjeu de la société d’aujourd’hui et surtout de demain.

Ce n’est pas un débat entre anciens et modernes, mais plutôt une différence de conscience entre « connexion individualiste » et « connexion citoyenne ».

Le connecté-individualiste considère sa seule liberté (immédiate et probablement éphémère). Satisfait et ravi par les nouveaux usages que lui offre la multitude d’espaces numériques, il se plaît à y « e-gambader »… Il défend le principe d’une société ouverte, certes « open » car d’apparence étendue, mais clairement sujette à un risque de monopole, voire de contrôle direct, des géants du web en train de consolider leurs territoires… Il n’y a qu’à observer les mouvements et repositionnements stratégiques de ceux qu’on appelle les Gafa (acronyme de Google, Apple, Facebook, Amazon).

Le connecté-citoyen s’intéresse quant à lui à la conséquence possiblement contraignante de ces usages (fussent-ils plaisants), de ces choix techniques (fussent-ils économiquement avantageux), de ces interactions entre internautes (fussent-ils sécréteurs d’adrénaline). Il se sent concerné par l’impact sur le collectif des nouveaux espaces numériques et de leur gouvernance stratégique.

Le connecté-individualiste, quant à lui, ne s’intéresse pas à la gouvernance stratégique. C’est pour lui un archaïsme que de mener ce type de réflexion. Il en arrive à friser un quasi-fanatisme pour les opérations immédiates, se moquant de leurs conséquences même si elles ressemblent parfois à une prise d’otages de ses données : un fournisseur lui ayant fait accepter, en échange de services affichés comme gracieux, des CGU (Conditions générales d’utilisation) qui elles le sont peu. Il n’a que faire de ces élucubrations. Il se contente d’être autocentré sur sa seule expérience numérique, son petit confort de proximité. Il donne carte blanche aux prémices d’une dictature des algorithmes qui s’invite sans ménagement aucun à la gouvernance du monde de demain.

Plusieurs personnalités essaient d’alerter sur le sujet, de nos jours, en France. On peut citer, entre autres, l’auteur de l’ouvrage La Souveraineté numérique, Pierre Bellanger, Bernard Benhamou de l’Institut de la souveraineté numérique, ou la sénatrice Catherine Morin-Desailly. Mais les points de vue ne sont pas alignés et les stratégies préconisées restent, sur certains aspects, divergentes.

Les pouvoirs publics se positionnent petit à petit sur le sujet et mettent en place les outils institutionnels permettant de promouvoir cette approche. Ainsi est décidée l’instauration d’un Commissariat à la souveraineté numérique.

Ce projet a ses détracteurs et les tribunes et échanges « anti » sur les réseaux sociaux ne sont pas rares. D’aucuns sacrifient, à l’autel de leur révulsion pour les approches jacobines, la nécessité de penser stratégiquement le devenir numérique des citoyens.

Deux segments de population restent à convaincre : celui des internautes aveuglés par le confort induit par les nouveaux usages (nouvelle plèbe ?) et celui des décideurs techniques devenus soldats malgré eux des Gafa & Co (nouvelle gent de la Res Publica ?).

« Science sans conscience n’est que ruine de l’âme », écrivait Rabelais. Il va falloir probablement créer des compléments de formation pour accompagner les connectés-individualistes dans leur devenir connectés-citoyens. Cet effort de formation est certainement un des leviers de la transformation numérique citoyenne.

 

Omar SEGHROUCHNI, Associé fondateur de StragIS, spécialiste des architectures des systèmes d’information.

 

 

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