Les tensions, exacerbées par la récente vague d’attentats, ne peuvent en rien justifier les actes criminels quels qu’en soient les auteurs. Rester intransigeant face aux débordements et maintenir le cap, en termes de droits humains et de démocratie, la société israélienne tente de relever ce défi.
Union morale des forces de droite et de gauche
Victime il y a deux ans d’un attentat à l’arme blanche qui faillit lui coûter la vie, le rabbin Yehuda Glick est une figure connue de la droite israélienne – certains disent extrême droite. Surnommé « l’activiste du mont du Temple » – il revendique le droit des Juifs à y prier alors que les musulmans, qui l’appellent pour leur part Esplanade des mosquées, leur en refusent l’accès –, il est entré au Parlement au mois de mai dernier en remplacement du ministre démissionnaire de la Défense Moshe Ya’alon. Glick que certains admirent, même parmi les Palestiniens, et que beaucoup dénigrent, même parmi les Israéliens, s’est uni à Tamar Zandberg, députée du parti Meretz – que certains disent d’extrême gauche – pour demander l’interdiction de la vente d’armes israéliennes à des pays qui pratiquent « la torture, les punitions cruelles et la détention prolongée sans charge », en d’autres termes aux pays dont on sait qu’ils violent les droits humains.
Glick et Zandberg, ces deux extrêmes, qui généralement s’affrontent et en particulier au sujet de la stratégie sécuritaire du pays, se sont rencontrés sur ce point et ont déjà ensemble obtenu la signature de nombreux autres députés, de droite comme de gauche.
Selon la loi qu’ils proposent, les Affaires étrangères devront obligatoirement fournir à la Défense les informations concernant le respect des droits de l’homme dans les pays auxquels Israël souhaitera vendre des armes.
Pour Glick, l’obligation morale précède les intérêts économiques : « Le peuple juif est retourné en terre d’Israël pour constituer un exemple de justice et d’intégrité. Si nous sommes obligés de produire des armes, c’est pour protéger des vies et non pour en prendre. » Et Zandberg de compléter : « Nous ne pouvons continuer à jouer les aveugles alors que des produits israéliens sont utilisés pour commettre des crimes graves et notamment contre des civils innocents ».
La loi cite une enquête selon laquelle, fin 2013, Israël exportait des armes vers 130 pays dont peu de démocraties. Parmi eux figuraient le Tchad, le Rwanda, le Congo, le Kenya, le Honduras…
La justice sous haute surveillance
Israël sera jugé sur le verdict que rendra la justice militaire dans l’affaire al-Sharif.
Au mois de mars dernier, deux Palestiniens attaquaient des soldats israéliens en poste à Hébron. L’agression était contenue et l’un des assaillants, Abdel Fattah al-Sharif, à terre, légèrement blessé, lorsque le sergent Azaria, infirmier militaire, était accouru sur place. La suite, filmée par la caméra d’une ONG israélienne, B’Tselem, a fait depuis le tour du monde et des réseaux sociaux. Azaria abat l’homme à terre d’une balle dans la tête. Le porte-parole de l’armée avait réagi aussitôt déclarant cette action en « contradiction totale avec l’esprit de Tsahal et ce qu’elle attend de ses soldats et officiers ».
Elor Azaria, appelé de dix-neuf ans, est actuellement jugé par un tribunal militaire. Au cours de son procès, son commandant de compagnie, le major Tom Na’aman a témoigné à charge. Il a accusé le soldat d’avoir agi de sang-froid. En effet, rien ne justifiait une telle intervention, a affirmé le major qui a interrogé le sergent juste après les faits pour lui demander des comptes. « Le terroriste était vivant et il devait mourir », aurait répondu Azaria.
Depuis le début de l’enquête, l’accusé a changé plusieurs fois sa version de l’affaire. Il se tient désormais à celle selon laquelle il craignait que le terroriste active une ceinture explosive. Son supérieur, pour sa part, estime pourtant que rien ne pouvait le laisser supposer, étant donné qu’al-Sharif portait des vêtements ajustés.
Après son témoignage, jeudi dernier, le 15 juin, le major Na’aman a été la cible de pressions et menaces. En effet, il s’en trouve dans la société israélienne pour approuver le geste du sergent Azaria, certains le justifiant par la légitime défense. Mais de nombreux hauts gradés et leaders politiques ont publiquement exprimé leur soutien au major. L’ex-ministre de la Défense Moshe Ya’alon a lui aussi personnellement condamné ces méthodes d’intimidation et campagnes de dénigrement sur les réseaux sociaux.
Pour la suite de la procédure et afin de prévenir à l’avenir pareils débordements, l’identité des témoins sera tenue secrète.
Visas pour Jérusalem
Chaque semaine, environ 300 Gazaouis se voient délivrer un visa pour Jérusalem. En général, leur nombre augmente pour la période du Ramadan. Cette année, en raison de l’attentat sanglant perpétré au premier jour de la grande fête musulmane dans le marché Sarona de Tel Aviv, les autorisations supplémentaires d’entrée en territoire israélien ont été annulées. Cependant, 53 000 Palestiniens de Cisjordanie ont pu aller prier à la mosquée Al-Aqsa dans le courant de la semaine dernière. Et ils étaient 10 000 pour la seule journée de vendredi. L’Esplanade des mosquées a par ailleurs accueilli samedi quelques invités de marque. En effet, en accord avec les autorités israéliennes, le Premier ministre de l’Autorité palestinienne, Rami Hamdallah, le chef des renseignements généraux, Majed Faraj, et le chef de la sécurité préventive, Ziad Hab al-Rieh, s’y sont rendus ensemble. Alors que la nomination d’Avigdor Lieberman, chef du parti nationaliste Israel Beteynou, au ministère de la Défense, faisait craindre un regain de tension entre l’Autorité palestinienne et l’État d’Israël, cette visite s’est déroulée dans un climat apaisé.