Israël-Turquie, une entente formelle
C’est officiel, la brouille entre Israël et la Turquie appartient au passé. Un accord de réconciliation a été signé hier, mardi 28 juin, entre les deux pays. La crise diplomatique aura duré six ans. Mais est-ce vraiment la fin ?
Tout avait commencé avec l’arraisonnement du Mavi Marmara, le 31 mai 2010, par un commando de l’armée israélienne. Ce navire participait à une flottille, dite de la liberté, qui tentait de briser le blocus de Gaza. Au cours de l’affrontement qui s’était ensuivi, dix militants turcs avaient trouvé la mort. Depuis, les relations entre Israël et la Turquie étaient au plus mal.
Après des mois de tractations, les deux délégations sont parvenues à s’entendre sur les points de conflit et bientôt – « dans les plus brefs délais », selon les dires du Premier ministre turc, Binali Yildirim –, les deux États échangeront leurs ambassadeurs, et leurs représentations diplomatiques à Ankara (pour Israël) et Tel Aviv (pour la Turquie) pourront rouvrir leurs portes. Cependant, et alors que le secrétaire général de l’Onu, Ban Ki-moon, se félicite de cette issue, la saluant comme un « important signal d’espoir pour la stabilité de la région », elle ne satisfait pas tout le monde en Israël, loin s’en faut. En effet, selon un sondage, ils sont 56 % de la population (65 % des Juifs et 16 % des Arabes) à rejeter cet accord, tout comme certains membres du Cabinet de sécurité dont le ministre de la Défense récemment nommé, Avigdor Lieberman, qui a annoncé publiquement sa décision de voter contre lors de la réunion qui ce tient ce matin, 29 juin, depuis l’aube.
Bien que les termes exacts n’en aient pas été publiés, l’opinion publique israélienne reproche à cet accord son « unilatéralité ». Ayant déjà présenté ses excuses officielles en 2013, l’État hébreu s’est engagé à verser 20 millions de dollars (18 millions d’euros) de dédommagement aux familles des dix Turcs tués dans l’assaut du Mavi Marmara. Il a par ailleurs accordé à la Turquie d’acheminer vers Gaza une aide humanitaire de 10 000 tonnes, qui devra cependant transiter par le port d’Ashdod sous contrôle israélien.
Mais Israël a reculé sur des points essentiels. La fermeture de la représentation officielle du Hamas à Istanbul lui a été refusée tout comme la restitution des corps de deux soldats tombés à Gaza en 2014 et la libération de deux autres, qui y sont retenus prisonniers. En contrepartie, la Turquie s’est engagée à prévenir les activités anti-israéliennes du Hamas depuis son territoire.
Quelques heures seulement après la conclusion de l’accord, le président Erdogan affirmait au cours du dîner de l’Iftar – rupture du jeûne du ramadan –, qui se tenait dans son palais, qu’il continuerait à soutenir les Palestiniens, sujets à des pratiques « pratiques illégales à Jérusalem et à al-Aqsa » de la part des autorités israéliennes.
Aujourd’hui, le Cabinet de sécurité du gouvernement israélien devra se prononcer pour ou contre l’accord. Quelle que soit l’issue de ce vote, on peut dire de façon certaine qu’entre Israël et la Turquie le rapprochement est timide.
Dernière minute : Le Cabinet de sécurité israélien a approuvé l’accord en début d’après-midi, mercredi 29 juin. Les ministres de la Défense, de l’Éducation et de la Justice, Avigdor Lieberman, Naftali Bennett et Ayelet Shaked, se sont prononcés contre comme ils l’avaient promis.
Le mont du Temple interdit aux Juifs
Ces dernières années, les autorités israéliennes, en accord avec les instances religieuses musulmanes, interdisaient aux Juifs l’accès au mont du Temple – ou esplanade des Mosquées –, pendant le mois sacré du ramadan. Cette année, la tentative a été faite de ne pas interrompre les visites touristiques ou religieuses de non-musulmans sur ce site. Mais les fidèles musulmans ont, pour certains violemment, manifesté leur mécontentement à ce sujet. Au cours de ces émeutes qui ont duré plusieurs jours, une femme juive de soixante-treize ans, priant non loin de là, au mur des Lamentations, a été blessée par un jet de pierre. Les autorités israéliennes, dans un souci d’apaisement, ont décidé d’en revenir au statu quo passé, fermant aux Juifs l’esplanade et ce jusqu’à la fin du grand jeûne musulman.
La police israélienne, ayant annoncé qu’elle réprimerait tous les contrevenants, a demandé en retour aux leaders arabes locaux et au Waqf jordanien, en charge de ce site, d’y prévenir tout trouble de l’ordre public.
Du sang versé au nom de Dieu
« Tu ne tueras point. » Yshaï Shlissel, Juif orthodoxe de quarante ans, aurait dû le savoir, lui qui se réclame de Dieu et ses commandements. Pourtant il a pris sur lui, le 30 juillet 2015, d’attaquer au couteau des jeunes qui fêtaient leur fierté dans les rues de Jérusalem. Il avait déjà, en 2005, ensanglanté la gay pride, mais sans causer la mort, et purgé pour cela une peine de dix ans de prison. Quelques jours seulement après sa libération, il était reparti dans sa mission punitive, avait blessé six personnes et tué Shira Banki, une jeune fille âgée de seize ans.
Au cours des différentes audiences, l’assassin n’a pas exprimé le moindre repentir, et a même au contraire revendiqué son crime. Le parquet de Jérusalem a opté pour un verdict lourd : la perpétuité, dont 31 ans de détention, et une amende de 2,64 millions de shekels (environ 616 000 euros).
Pour la directrice de la maison ouverte LGBT de Jérusalem, cette condamnation est rassurante car il s’agit actuellement « d’endiguer l’affreuse vague d’homophobie » qui monte dans la société israélienne, pourtant généralement tolérante dans ce domaine.
Cette affaire a entraîné une série de limogeages, dans les rangs de la police, vivement critiquée pour n’avoir su anticiper ni empêcher la récidive de cet individu dangereux.
Le cannabis, dans toutes les bonnes pharmacies
C’est fait ! Le gouvernement israélien, réuni dimanche dernier, 26 juin, en Conseil des ministres, a voté à l’unanimité la réforme du cannabis proposée par Yakov Lizman, ministre de la Santé. Mais qu’on ne s’y trompe pas, il ne s’agit pas là de légalisation.
C’est dans la plus grande discrétion que fut posée la première pierre du Centre national de recherche en cannabis le 5 juin dernier, au cœur de l’institut Volcani, spécialisé dans la recherche agricole. Et ce alors que la réforme du cannabis médical n’était pas encore approuvée. Il s’agissait, affirment certains, de mettre les législateurs devant le fait accompli.
Depuis, la situation a été régularisée. Et le cannabis sera désormais accessible en pharmacie « aux personnes qui en ont besoin ». Enfin ! se réjouissent les lobbyistes qui depuis des années ont milité en Israël pour le développement de la culture du cannabis à usage thérapeutique, de son enseignement aux praticiens et pharmaciens. Les fervents partisans de la « feuille verte » et ses vertus regrettaient qu’Israël, à la pointe de la recherche médicale en la matière, reste à la traîne dans le domaine de sa législation et son exportation.