Cruciale dans les économies occidentales comme en développement, l’agriculture promet d’être omniprésente lors des débats de la COP22, en novembre prochain au Maroc. Guénaël Le Guilloux, directeur d’Agropol, une association qui regroupe les principaux organismes de la filière oléagineuse française, dont le groupe Avril qui investit massivement au Maroc, s’est confié à Opinion Internationale.
Quelles sont les activités d’Agropol ?
Cette structure interprofessionnelle a été créée dans les années 1980 par l’ensemble des acteurs clés de la filière : producteurs, semencier et industrielles… L’objectif principal étant d’appuyer le développement de filières oléagineuses dans les pays partenaires. Face aux besoins de plus en plus fort en huiles et protéines végétales comme animales, les pays en recherche de solutions s’intéressent au schéma de la filière française qui a fait ses preuves.
La structure s’appuie essentiellement sur les ressources et compétences françaises. Les producteurs sont fortement impliqué dans la gouvernance d’Agropol.
Le Maroc a lancé un plan de développement de son agriculture en 2009, le plan « Maroc Vert », avec le soutien d’Agropol. Quel est le rôle d’Agropol aux côtés des Marocains ?
Nous avons une démarche d’accompagnement de la filière oléagineuse marocaine sur les plans organisationnel et technique. Parallèlement, le groupe Avril a pris en 2013 une part importante au capital de Lesieur Cristal, le principal huiler marocain. Avec l’appui de cet investisseur convaincu de l’importance d’un approvisionnement national, Lesieur Cristal a impulsé le développement de l’amont agricole de la filière. Couplée avec le cadre institutionnel de Maroc Vert, cette stratégie a eu un résultat détonant et positif : en trois ans, nous sommes passés de 3.000 à 55.000 hectares d’oléagineux au Maroc. Cela a permis la substitution d’une partie des huiles importées. Ces cultures ont aussi permis au secteur de l’élevage un accès direct aux protéines végétales nécessaires à l’alimentation des animaux. L’implication d’un industriel disposant déjà d’une unité de transformation a été déterminant, puisqu’il n’y avait pas besoin d’en créer une de toutes pièces.
Quel fut l’impact de cet essor sur l’environnement ?
L’alternance oléagineux et céréales sur les parcelles permet d’améliorer la productivité globale des cultures tout en diminuant les coûts et les applications de produits phytosanitaires. En effet, la rotation des cultures diminue la prolifération des insectes et mauvaises herbes spécifiques aux céréales.
Cet impact également économique améliore la résilience des exploitations et de l’économie agricole national face aux différentes contraintes. L’engagement du gouvernement marocain a été déterminent via les subventionne les investissements en matériel et le soutient les prix des oléagineux le temps pour les rendements de progresser suffisamment pour que ces cultures soient plus rentables que les précédentes.
Quelle est la politique de votre association en termes de pesticides et d’agriculture bio ?
Notre approche est basée sur l’utilisation raisonnée des intrants, dans un souci de préserver l’environnement et la performance économique des producteurs dans un juste équilibre et faire en sorte que les produits issus de cette filière soient sains et accessibles. La production Bio à toute sa place, mais dire que la filière doit être uniquement bio serait aberrant, puisque ce mode de production ne peut répondre à la totalité des besoins au niveau planétaire, sans compter que cela aurait un coût pour les consommateurs. Nous avons donc une position équilibrée, à la recherche d’une solution qui préserve l’environnement tout en répondant aux besoins.
Quelles sont vos attentes principales à l’approche de la COP22 ?
Les agricultures semblent remises en avant, et c’est clairement un point positif. Il sera important de souligner l’importance de l’agriculture africaine pour répondre à la fois aux enjeux d’approvisionnement pour nourrir le monde et répondre aux enjeux du changement climatique en particulier la résilience des exploitations, la fertilité des sols, le bilan carbone…. Il faudra donc réfléchir à la façon dont l’Afrique et ses partenaires doivent concevoir une agriculture productive et soucieuse de son devenir environnemental.
Plus globalement, quels sont vos attentes concernant le développement de l’agriculture autour de la Méditerranée ?
Il faut dynamiser et accentuer les échanges au niveau de cette zone qui a de nombreux enjeux communs. Ce sont les engagements réciproques multiples qui permettent une dynamique économique, au-delà des simples relations bilatérales.
Après le Maroc, vers quels pays se tourne votre structure ?
Les résultats obtenus au Maroc peut constituer une référence pour les pays du Maghreb et plus au sud dans d’autres pays africains. C’est pour nous une démonstration de ce qui peut être fait, à savoir qu’il ne faut pas importer à tout prix et que des filières nationales sont aussi des solutions performantes pour autant qu’il y ait un cadre politique volontaire et un partenariat entre le monde agricole et les agro-industriels.