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14H45 - lundi 21 novembre 2016

Il n’y a que des solutions… Vers un hammam durable au Maroc.

 

Chaque quartier marocain est doté d’une boulangerie, d’une mosquée et d’un hammam. Ces infrastructures sont essentielles à chaque habitant. Plus de 95% de la population marocaine visite le hammam une fois par semaine minimum. Pourtant, le hammam est énergivore en eau et en bois. Un problème qu’il est urgent de régler face à la raréfaction du bois au Maroc et du stress hydrique qui tenaille le pays. Rappelons que, selon le think-tank World Resources Institute (WRI), le Maroc pourrait commencer à manquer d’eau dès 2040.

Panneaux solaires installés sur le toit - Crédit photos : Stéphanie Petit

Panneaux solaires installés sur le toit – Crédit photos : Stéphanie Petit

En 2014, les ONG française GERES (Groupe Énergies Renouvelables, Environnement et Solidarités) et marocaine EnSen (Energie Solidarité et Environnement) lancent un programme de rénovation des hammams. Au cœur de la société marocaine, ces endroits hautement énergivores doivent alors trouver un nouveau modèle de fonctionnement énergétique pour continuer à accueillir le public.

Il existe environ 10 000 hammams traditionnels au Maroc. Ces derniers consomment entre 1  et 1.5 tonne de bois par jour pour environ 200 clients ainsi que plus de 26 M3 d’eau. Afin de préserver la tradition, tout en protégeant l’environnement, le projet de rénovation des hammams a vu le jour. Le projet, subventionné par le Fonds Français pour l’Environnement, a pour objectif de « lutter contre la déforestation, le réchauffement climatique et pour l’amélioration de la santé des employés et des habitants avoisinants qui respirent les fumées nocives émises par le hammam » explique Audrey Onillon, membre du GERES.

Ce projet de rénovation coûte au propriétaire du lieu entre 40 000 et 100.000 euros, un investissement remboursé entre 2 et 6 ans sans augmenter le prix d’entrée du hammam d’environ 12 dirhams (soit 1.20 euro). Le chauffage du bâti et de l’eau est ainsi fortement divisé : la chaudière à bois est remplacée par une chaudière à haute performance énergétique (HPE) – cf photo – qui fonctionne avec des déchets organiques tels que des grignons d’olives ou des coques d’argan. Par la même occasion, cette biomasse permet aux usines d’huile d’olive ou d’argan de valoriser leurs déchets.

Pour le préchauffage de l’eau, des panneaux solaires sont installés sur le toit et pour l’intérieur des salles de bains des planchers chauffants sont installés. A ce jour, cinq hammams pilotes ont été rénovés à Meknès, Casablanca, Marrakech et Rabat. Les deux ONG prévoient d’en rénover une dizaine à horizon 2018.

 

Quand écologie et économie vont de paire

Pour El Mehdi Khaldoun, propriétaire de l’un des hammams rénovés à Marrakech, l’envie de la rénovation du hammam est née de la volonté de ne plus avoir recours au bois en trouvant une énergie alternative.

Avec ce plan de rénovation écologique, les propriétaires des hammans réalisent des économies importantes. Alors qu’ils utilisaient auparavant une tonne de bois par jour, ils n’ont plus besoin que de 300 kilos de biomasse, au même tarif pour faire fonctionner le hammam. « Nous parions sur la biomasse et son développement. Le Plan Maroc Vert a permis la plantation de milliers d’hectares d’oliviers. Ces arbres vont encore produire des déchets pour les hammams. », ajoute Dénia El Haddaoui, coordinatrice chez EnSen.

Chaque jour, les exploitants du hammam durable font une économie de 70% de leur matière énergétique. Les besoins énergétiques deviennent aussi moins importants par l’installation des planchers chauffants. Dans un hammam traditionnel, il faut d’abord chauffer la terre avant de pouvoir chauffer la salle.

 « Le problème qui se pose aujourd’hui, c’est le financement que pourrait apporter l’Etat afin que les ONG s’effacent. EnSen en appelle aussi à une législation pour la construction des hammams à venir. » remarque Dénia El Haddaoui.

 

Visite en photo des rénovations du hammam durable de El Mehdi Khaldoun à Marrakech :

 

Journaliste