Afriques demain
05H16 - jeudi 8 mars 2018

L’agriculture, un challenge pour le co-développement euro-africain. Retour sur la rencontre de Stéphane Travert avec ses homologues africains et le Groupe Interacadémique pour le Développement

 

Le Salon international de l’Agriculture a fermé ses portes à Paris dimanche dernier, dépassant l’affluence de la précédente édition. Ce n’est pas seulement la plus grande ferme du monde que les plus de 670.000 visiteurs ont pu parcourir pendant dix jours… Comme son nom l’indique, c’est aussi un événement international de promotion du modèle agricole français, parmi les meilleurs au monde, malgré les souffrances que connaissent les agriculteurs, que Paris a accueilli.

Ainsi, le 23 février dernier, à l’occasion du Salon, à l’initiative du GID (Groupement Interacadémique pour le Développement), Stéphane Travert, ministre de l’agriculture et de l’alimentation, a réuni, ses homologues africains, en partenariat avec et à l’Académie d’Agriculture de France. France et Afrique ont ainsi réfléchi ensemble pour trouver des solutions pour l’amélioration de l’emploi des jeunes africains dans secteur de l’agriculture.

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Cette rencontre interministérielle s’inscrivait dans le cadre général du programme GID-Agri. Le lancement de ce programme et le forum d’échanges organisé en novembre 2017 à Abidjan avaient permis d’identifier les problèmes et les contraintes que rencontrent les porteurs de réussites agricoles.

Il s’agissait de donner une plus grande attractivité aux métiers liés à l’agriculture en proposant aux jeunes ruraux africains des exemples de réussite de systèmes agricoles cautionnés par les académies africaines et françaises, pour les inciter à s’engager dans ces métiers sur des bases solides. Rassemblés sur une plateforme Internet accessible au plus grand nombre, ces exemples conduiront notamment à la création de réseaux de fermes-écoles et d’entreprises-écoles dans le monde rural africain. Les remontées du terrain et la force de « la pédagogie par l’exemple » sont les moteurs de ce programme, soutenu par les ministres africains et français de l’agriculture et de l’élevage.

L’année dernière, à l’occasion du Salon de l’Agriculture et des Ressources Animales (SARA) d’Abidjan, le GID avait déjà organisé un Forum d’échanges pour l’amélioration de l’emploi des jeunes dans l’agriculture en Afrique subsaharienne. Ce forum avait réuni une centaine d’acteurs et de décideurs de haut niveau, en étroite collaboration avec les Académies françaises (Académie d’Agriculture, Académie des sciences, Académie des Technologies, Académie des Sciences d’Outre-Mer) et africaines (Académie des Sciences, des Arts, des Cultures d’Afrique et des Diasporas Africaines de la Côte d’Ivoire, Académie des Sciences du Cameroun, Académie Nationale des Sciences, Arts et Lettres du Togo, Académie Nationale des Sciences, Arts et Lettres du Bénin, Académie Nationale des Sciences et Techniques du Sénégal, Académie Nationale des Sciences, des Arts et des Lettres du Burkina Faso, Académie Hassan II des Sciences et Techniques du Maroc), portant respectivement à 11 et 16 le nombre total d’Académies et d’académiciens d’Europe et d’Afrique représentés.

L’entrepreneuriat était au centre de ce forum, au cours duquel 14 témoignages de réussites agricoles africaines ont été présentés par leurs jeunes promoteurs, originaires de 8 pays (Sénégal, Mali, Burkina-Faso, Côte d’Ivoire, Bénin, Togo, Cameroun, Maurice), allant de la petite production au champ, à la seconde transformation de produits agricoles.

Trois tables rondes ont permis de focaliser des premières réflexions sur des problématiques importantes, notamment pour surmonter les obstacles à la réalisation de ces entreprises : l’accès au financement, les structures de formation et l’utilisation des TIC (e-agriculture).

Les défis restent toutefois considérables. Le continent africain détient 65% des terres arables non cultivées dans le monde. Le potentiel est immense mais l’exploitation du territoire doit encore faire face à certains problèmes. L’accès au numérique, par exemple, est un des principaux enjeux étudiés lors de cette rencontre interministérielle. Ainsi, le GID, centre euro-africain de réflexion et d’action présidé par François Guinot, président honoraire de l’Académie des technologies, s’est penché sur les moyens donnés aux jeunes pour s’installer en zone rurale.

Le Secrétaire perpétuel de l’Académie Nationale des Sciences, Arts et Lettres du Bénin, Monsieur Mansourou Moudachirou a témoigné de cette prise de conscience avec des mots très forts : « en cultivant du coton par exemple, on fait une agriculture de rente que l’on a pu développer grâce à la mondialisation et c’est primordial. Mais il faut aussi mettre l’accent sur l’emploi des jeunes. Au Bénin, l’agriculture se porte bien mais elle doit se tourner encore plus vers les exportations. Surtout avec un voisin comme le Nigeria, cette puissance de 180 millions d’habitants qui a besoin de nos exportations. »

D’autres thèmes ont été abordés comme les questions de financement des infrastructures, de qualité de l’eau et de formations. Bâtir une agriculture pour résoudre les problèmes de l’alimentation tout en créant des richesses, voici un enjeu de taille pour des pays en voie de développement. Un enjeu que les membres du GID souhaitent relever avec leurs homologues africains.

 

Entretien express avec Michèle Gendreau-Massaloux, vice présidente du GID et conseillère de Catherine Bréchignac, Secrétaire perpétuelle de l’Académie des Sciences qui est une académie fondatrice du GID

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Quel était pour vous l’objectif de cette rencontre des ministres africains de l’agriculture avec leur homologue français, sous l’impulsion du GID ?

Il est important pour nous de mettre en commun des savoirs, entre les Académies d’Afrique, de Méditerranée, d’Europe et de France. Notre principe d’action est la co-construction partagée entre l’Afrique et l’Europe, qui aide à mener à bien des projets qui vont aider les pays à valoriser leurs propres ressources de développement.

Les sciences sont-elles assez mobilisées pour prendre en charge les grands chantiers du co-développement de l’Afrique ?

Pour l’instant, les grandes prises de décisions se prennent sans référence explicite à nos projets. Mais avec cette rencontre, les sciences, – je dis bien LES sciences car nous allions sciences exactes et humaines, sont au coeur du développement. Le co-développement n’est pas que l’histoire du monde politique et des entreprises. Les scientifiques souhaitent y apporter leur pierre et ont avec l’Afrique une vraie humanité partagée.

 

Propos recueillis par Michel Taube. Avec Rebecca Birna

Pour mieux connaître le GID : http://g-i-d.org//

Déjà paru dans Opinion Internationale : https://www.opinion-internationale.com/2017/11/17/entretien-avec-francois-guinot-ou-les-academies-au-service-du-co-developpement-euro-africain_52224.html

Directeur de la publication