Opinion Internationale : Madame Agnès Von der Mühll, vous êtes la nouvelle porte-parole du quai d’Orsay. Au Moyen-Orient, le conflit syrien s’enlise – on pensait que la chute de Daesh mettrait un terme au conflit, les rivalités entre l’Arabie Saoudite et l’Iran sont exacerbées, la résolution du conflit israélo-palestinien se résume à des initiatives unilatérales des Etats Unis et le Conseil de Coopération du Golfe est empêché par le blocus du Qatar. Est-ce vraiment l’heure des passerelles et des solutions ?
Agnès Von der Mühll : Plus que jamais, précisément parce que la zone est traversée par des conflits et des tensions, et que la France a une responsabilité singulière, d’abord de par son statut de membre permanent du Conseil de sécurité, mais aussi parce qu’elle a un intérêt, notamment de sécurité, dans la région. En outre, la France a dans la région des partenaires et des amis de toujours qui comptent sur elle, en particulier le Liban, qui subit de plein fouet les tensions et la guerre qui se déroule chez son voisin syrien.
Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, s’est rendu récemment à Téhéran, précisément parce que l’Iran est un acteur régional avec lequel nous partageons certaines préoccupations, mais avec lequel nous avons également des points de désaccord, notamment s’agissant de son action régionale qui est à certains égards déstabilisante et la poursuite de son programme balistique, non-conforme à la résolution 2231 . Nous sommes également attachés à la pleine mise en œuvre de l’accord sur le nucléaire iranien, ce qui constitue un point de convergence entre nos pays. Il en va de la crédibilité du Conseil de sécurité que ses résolutions adoptées à l’unanimité soient appliquées. La France y veille plus particulièrement, sur ce dossier comme sur le dossier syrien où la résolution 2401, adoptée à l’unanimité, doit être respectée par toutes les parties.
Lorsque le Premier ministre du Liban, Monsieur Saad Hariri, a été retenu contre son gré en Arabie Saoudite, le Président de la République française Emmanuel Macron est intervenu directement, jouant le rôle de facilitateur pour dénouer la situation. Ne pourrait-il pas en être de même dans le conflit qui secoue le Conseil de coopération du Golfe entre le Qatar d’un côté et l’Arabie saoudite, les Emirats et leurs alliés de circonstance de l’autre, d’autant que ces pays et la France ont des intérêts partagés ?
La France peut jouer un rôle en appelant les parties au dialogue. Car c’est par lui, et lui seul, que ce type de difficultés seront surmontées. Je ne trahis pas un secret en disant que nous sommes discrètement intervenus auprès des protagonistes pour les inviter à dialoguer.
On prête à Donald Trump la volonté d’organiser mi-avril un sommet réunissant les États-Unis et les pays du Conseil de coopération du Golfe, afin de régler ce différend. La France peut-elle s’investir davantage, étant déjà en relation avec toutes les parties ?
La France salue toutes les initiatives qui vont dans le sens d’un apaisement des tensions. Les Etats-Unis jouent un rôle positif à cet égard. . Nous réitérons également notre soutien aux actions du Koweït qui joue un rôle direct et constant de médiateur dans le conflit. Toutes ces initiatives traduisent la volonté de surmonter les différends afin de résoudre cette crise. Tous ces efforts sont donc les bienvenus et la France y prend également sa part. Nous passons à cet égard des messages d’apaisement et de dialogue à l’occasion des contacts que nous entretenons avec ces pays, car nous parlons à tous.
Propos recueillis par Michel Taube