Edito
20H45 - mardi 1 mai 2018

Le coup de com’ permanent ou Emmanuel Macron selon Arnaud Benedetti. L’édito de Michel Taube

 

A quelques jours du premier anniversaire de son élection, « le coup de com’ permanent » d’Arnaud Benedetti nous révèle l’art de la communication qui façonne le président de la République. L’édito de Michel Taube

 

altOn connaissait le coup d’Etat permanent. Voici le coup de com’ permanent qui pourrait bien devenir le sceau de la présidence Macron. On le sait, François Mitterrand dénonça le coup d’Etat permanent du général de Gaulle. Dans un ouvrage alerte, dense, littéraire et aux analogies historiques parfois inquiétantes, Arnaud Benedetti décrypte le coup de com’ permanent de notre cher et (trop ?) jeune Président.

L’ouvrage nous en apprend tout d’abord sur son auteur. Nous le pressentions, son dernier opus achève de nous en convaincre… Arnaud Benedetti est un littéraire passionné, un historien de la France égaré dans le monde de la communication. Sont-ce ses deux longues vues, la littérature et l’histoire, qui lui permettent de se pencher sur l’histoire des hommes et ainsi mieux nous dévoiler les vérités que la communication cherche à nous cacher ?

Car on n’attend pas a priori d’un communiquant ni même d’un professeur en communication, aussi brillant soit-il, qu’il nous dévoile la vérité des choses. A moins que dans ce monde, la vérité se love justement dans la communication que les personnages publics nous imposent… C’est un peu ce que nous enseigna en son temps un Guy Debord : communication et techné seraient les vérités de notre monde.

For de ses armes, Arnaud Benedetti ose affronter la vérité du personnage Macron. Il nous dresse le portrait d’un homme que l’auteur voudrait romanesque, littéraire, historique mais que son analyse réduit à ce qu’il est peut-être seulement : le roi de la com’.

Qui est Emmanuel Macron, à presque un an de son 18 Brumaire ? Cet animal politique serait un maître en communication. Tout cela et rien de plus. Un imposteur, en somme ? L’auteur ne va pas jusque-là mais il nous interroge, sème le doute.

La lecture de l’ouvrage est un moment salutaire à la veille de deux derniers coups de com’ annoncés par le château : Pernaut le 12 avril sur TF1, Bourdin et Plenel le 15 sur BFMTV et Mediapart. Un grand écart télévisuel, une surabondance de présence présidentielle – pour terrasser la grogne sociale – dont le livre d’Arnaud Benedetti nous expliquer l’audace, la furie, la paranoïa parfois.

Le livre d’Arnaud Benedetti est à lire absolument. Pour le plaisir de son verbe. Pour une raison politique aussi : sans prêter le flanc aux extrêmes, voilà un amoureux de la France qui se risque à la critique du monarque. Pour l’auteur de cet édito qui se dit aisément « macronien critique », qui croit dans la sincérité et la vision libérale, humaniste et européenne d’Emmanuel Macron, il est toujours salutaire d’entretenir l’esprit critique, surtout lorsque l’on se doit de souhaiter pour la France et face à la montée des extrêmes la réussite du Président de la République.

Arnaud Benedetti nous donne donc à lire son Macron. Il le dépeint comme plus conservateur que révolutionnaire, chantre de la technostructure plutôt qu’adepte du demos. L’auteur se garde bien d’analyser de l’intérieur les nombreux discours du président et, ce qui est l’essentiel au fond, la part entre ses discours, ses promesses de campagne aussi, et les actes réels du quinquennat. Macron fait-il vraiment la révolution ? On se souvient qu’en 1981 Mitterrand avait été élu sur une promesse impossible : changer la vie. Macron nous a fait croire qu’il ferait la révolution ? La réponse est peut-être dans le livre d’Arnaud Benedetti.

Comme l’écrit ce dernier, « Macron écrit une histoire qui vise à faire croire que le temps de l’action est revenu. » Et de trancher malheureusement : « la révolution est bien plus lexicale que politique ». Le talon d’Achille de Macron serait sa posture performative… « Je vous dis qu’avec moi, dire, c’est faire », tel pourrait être l’ordre de ralliement de Macron à ses troupes de fans et de groupies.

Mais Arnaud Benedetti nous le rappelle, et il nous réveille en ce sens d’une atonie dangereuse : il n’y aura jamais de révolution qui ne tienne que dans le verbe. Surtout de la part d’un président qui vit dans l’empire et sous l’emprise de l’image. La prolixité du verbe macronien (la longueur de ses discours en atteste) ne serait-elle qu’une façon d’endormir le peuple pour mieux faire triompher le règne de son image ? Monsieur le président, tel Narcisse, attention à ne pas vous perdre, et avec vous la France, dans votre image…

« Macron est un monde en soi », nous alerte Arnaud Benedetti. En tout cas, l’avenir proche nous dira si la France voulue par Macron se limite à Macron lui-même. Auquel cas il vaudrait mieux que la République abdiquât au profit d’une monarchie macronienne… Un nouveau 18 Brumaire en somme…

 

Michel Taube

Pour aller plus loin :

 

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