C’est Audrey Azoulay, la nouvelle directrice de l’UNESCO elle-même, qui l’a annoncé le 10 avril 2018 : l’organisation des Nations Unies prévoit de lancer un programme complet de prévention primaire de la radicalisation et de l’extrémisme violent, notamment au Maroc. Les autres pays concernés sont la Libye, la Jordanie et la Tunisie.
En lançant un plan transnational qui va de de la Jordanie à la Libye, en passant par le Maroc et la Tunisie, l’UNESCO contribue à créer une dynamique Euromed qui manque bien trop souvent aux initiatives locales et nationales des Etats-membres de l’UE.
Or, la question du terrorisme est une affaire transnationale, que les Etats seuls ne peuvent parvenir à juguler. C’est donc avec le Bureau de lutte contre le terrorisme des Nations Unies qu’Audrey Azoulay a lancé un vaste projet « autour de la culture, des arts, du sport, (car) il y a des espaces de dialogue à créer, même dans les situations les plus tendues, (et) ces formes d’activité transcendent la violence, permettent de mobiliser la jeunesse en ouvrant le dialogue».
Ce projet prévu sur deux ans doit s’inscrire dans la durée : en effet, la prévention de la radicalisation n’est pas une affaire de court terme et il faut laisser le temps aux projets multiples de s’installer. Ce programme vise surtout, en partenariat avec les Ministères concernés des différents pays, de permettre d’offrir à des milliers de jeunes, par une approche inclusive, la possibilité de développer des projets culturels, éducatifs, cognitifs censés les intégrer à leur société, les ouvrir à l’esprit critique et à l’éducation aux médias, les former à devenir citoyens, les sensibiliser aux dérives possibles de la religion et son instrumentalisation.
Priorité Maroc
Le Maroc fait l’objet d’une attention particulière. Il est fortement touché par la radicalisation et beaucoup de jeunes Européens d’origine marocaine ont malheureusement été à l’origine de plusieurs attentats de filières, notamment en France et en Belgique.
Ceci dit, la relation privilégiée qui unit la France et le Maroc en termes de lutte contre le terrorisme a non seulement fait ses preuves lors des attentats de Paris en 2015 et de la traque d’Abdelhamid Abaaoud à Saint Denis, mais la réflexion autour d’une coopération euroméditerranéenne sur la prévention des dérives sectaires de l’islam doit être soutenue et mise en avant autour notamment de l’axe Paris-Rabat.
Au final, il ne faut pas oublier que l’UNESCO n’a pas que pour mission les vieilles pierres, mais que sa devise est aussi « construire la paix dans l’esprit des hommes et des femmes ».
Sébastien Boussois
Docteur en sciences politiques, chercheur Moyen-Orient relations euro-arabes / terrorisme et radicalisation, enseignant en relations internationales, collaborateur scientifique du CECID (Université Libre de Bruxelles) et de l’OMAN (UQAM Montréal)