Le système est sous tension : du 115 qui peine à orienter les patients aux couloirs surchargés des hôpitaux, de l’hiver rude à l’été qui s’annonce caniculaire, il est urgentissime d’aider les urgences à répondre à une demande croissante.
Les solutions existent ! Et pour certaines d’entre elles, les pouvoirs publics, l’ensemble des acteurs du système de santé, mais aussi les citoyens, ne les voient guère. Une voix s’exprime pourtant depuis quelques semaines… Lamine Gharbi, président de la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP), le dit à qui veut l’entendre : les cliniques privées pourraient accueillir 3 millions de patients supplémentaires dans leurs services d’urgences, et ce aussi bien et au même coût que l’hôpital public.
Alors que le nombre de patients se rendant aux urgences a doublé au cours des dix dernières années, passant de 10 à 20 millions par an, l’hôpital public est saturé. Or on ne peut pas accepter que d’autres d’accidents se produisent, comme celui du décès d’une femme de 70 ans, à Reims en mars dernier, qui attendait des soins depuis près de 2h30. Selon Samu-urgences de France, la mortalité augmente en effet de 30% sur les personnes malades en raison d’urgences saturées. On ne peut pas accepter non plus que sur une centaine d’établissements, chaque nuit, des centaines de patients dorment sur des brancards, dans des situations parfois indignes. Ces exemples mettent en lumière la situation dramatique dans laquelle se trouvent bon nombre d’hôpitaux.
Le problème est double. D’un côté, les patients souffrent d’une attente parfois interminable, pouvant aller jusqu’à 4h30, selon une enquête menée par Capital, et perdent confiance dans le système de santé, de l’autre, le personnel de santé est confronté à des situations de stress et de débordement anormales, qui poussent fatalement aux erreurs de jugement.
Les causes de l’engorgement sont multiples. Structurellement, on l’explique par un manque de moyens et de prévention. Conjoncturellement, il est aussi la conséquence du vieillissement de la population, d’un hiver qui a vu les cas de grippe se propager à grande vitesse. Mais à l’heure où l’été approche, période durant laquelle les services d’urgences sont le plus sollicités, la situation s’annonce déjà critique.
Propositions concrètes avant refondation…
Lamine Gharbi, président de la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP), nous alerte sur un problème méconnu : si l’écrasante majorité des personnes se rendent aux urgences des hôpitaux publics, c’est parce que la plupart de nos concitoyens ignorent que les cliniques et hôpitaux privés ont, eux aussi, des services d’urgence. De plus, les Français s’imaginent qu’ils vont payer plus cher dans les urgences privées. Pourtant, il n’en est rien. La réglementation interdit une tarification supérieure, et en réalité c’est le même prix que les citoyens paient en allant dans le public. Enfin, la régulation médicale, assurée par le SAMU, a le réflexe quasi-systématique de se tourner vers les établissements publics.
Manque d’information, mauvaise orientation des personnes, préjugés culturels aussi disons-le clairement à l’endroit de la chose privée… Résultat : les services d’urgence des établissements privés sont sous-utilisés.
Selon la FHP, les hôpitaux et cliniques privés disposent de 124 services d’urgence répartis sur l’ensemble du territoire français. Ces derniers accueillent aujourd’hui près de trois millions de patients par an. Ils pourraient en accueillir 6 millions ! Certes, cela ne règlerait pas tout le problème mais contribuerait largement à soulager la saturation à laquelle fait face l’hôpital public.
Dans ce même esprit, la FHP, qui se défend de ne représenter que les intérêts du privé mais qui se dit au contraire au service du public et de l’intérêt général, a annoncé le 17 mai dernier une série de propositions visant à réformer le système. Une des mesures phares consisterait à créer des centres de premier secours sur tout le territoire. En même temps qu’ils permettraient de lutter contre le problème des déserts médicaux, ces établissements aideraient à désengorger les urgences.
Cette main tendue du privé au public arrive au bon moment… Agnès Buzyn, ministre de la santé, regrette l’immobilisme de ses prédécesseurs selon l’AFP. Aujourd’hui, le temps est à l’action ! Et, loin des querelles entre public et privé, et au lieu d’envisager une complète révolution du système de santé que, tout de même, le monde entier nous envie, tous les acteurs se disent prêts à travailler ensemble, nous assure la FHP. Alors, espérons que le message passera à des millions de Français qui seront amenés à se rendre aux urgences.
Raymond Taube
chef de rubrique “Droits pratiques” et directeur de l’Institut de Droit Pratique
avec Gaspard Velten