De plus en plus nombreux sont ceux qui, dans la foulée de nombreuses stars, se proclament « noglu »(adepte du régime sans gluten) et en vantent les bénéfices sur leur bien-être. Alors, info ou intox ? Véritable problème de santé publique ou simple lubie de personnes qui cherchent à se démarquer ou même à vendre leurs produits miracles ? Au-delà des modes, il n’est pas inutile de démêler le vrai du faux sur ce sujet pour avoir une opinion éclairée et faire ses choix en conscience.
Le gluten est un terme générique qui désigne un groupe de protéines présentes dans certaines céréales (blé, orge, seigle, kamut, épeautre, froment) capables, après hydratation, de former un réseau avec d’autres constituants du grain. Sa présence donne aux aliments qui en contiennent élasticité et volume. Grâce à lui, la mie du pain est belle et aérée, les gâteaux et brioches sont bien gonflés. Il est aussi très utilisé par l’industrie agroalimentaire pour épaissir et donner du liant aux préparations et plats cuisinés.
Une faible proportion de la population (0,2% au Canada, un peu plus en Europe du nord), essentiellement de très jeunes enfants, présente des réactions de type allergique après consommation de blé ou de préparation contenant des dérivés du blé. Les symptômes se manifestent, dans ce cas, juste après la consommation du produit et on peut détecter alors des immunoglobulines spécifiques lors d’une prise de sang. L’allergie au blé des jeunes enfants disparaît souvent en grandissant.
Environ 1% de la population souffrirait d’intolérance auto-immune au gluten. Ce sont des personnes atteintes de maladie cœliaque. Chez elles, le gluten provoque des inflammations et des ulcérations de l’intestin qui endommagent la muqueuse, peuvent entraîner des diarrhées chroniques et une malabsorption des nutriments avec des conséquences graves sur l’état général. Le diagnostic se fait par recherche d’anticorps spécifiques et exploration endoscopique de l’intestin. Pour ces personnes, il est impératif de suivre un régime sans gluten strict et à vie.
Enfin, environ 13% de la population présenterait une sensibilité digestive au gluten d’origine non immunitaire. Chez ces personnes, il s’agit de symptômes allant de l’inconfort digestif aux maux de tête, troubles cutanés ou articulaires, voire troubles de l’humeur. Cette sensibilité est la plupart du temps « dose-dépendante » et souvent due à une probable consommation excessive de gluten, pas toujours consciente (gluten caché). Ces personnes peuvent vivre mieux en réduisant le gluten.
Pour la grande majorité de la population, le gluten ne pose pas de problème particulier.
Pour résumer, le gluten est un réseau protéique qui peut être difficile à digérer et, comme nous ne sommes pas des clones, la dose de tolérance est variable d’une personne à l’autre. A chacun de trouver l’équilibre qui lui permet d’aller bien.
Sur le plan nutritionnel, le gluten ne fait pas partie des nutriments essentiels et s’en priver ne provoque pas de carrence particulière, le seul problème étant de lui faire la chasse car il est présent dans la plupart des aliments industriels : toutes les pâtes levées (pain, pizza, brioches, gâteaux…), mais aussi jambon, sauces, épices, glaces, yaourts, chocolat, plats cuisinés, produits « allégés » et une grande partie des produits céréaliers…
Si on se nourrit uniquement d’aliments non transformés (viandes, poissons, légumes et fruits frais, fromages et laitages artisanaux), que l’on supprime le pain et que l’on remplace les pâtes par du riz ou du quinoa, ce n’est pas réellement compliqué. Mais ne pas déguster un bon plat de pâtes quand on peut le digérer sans problème, c’est tout de même fort dommage… D’autant que manger doit rester un plaisir et que le plaisir est un élément primordial pour la santé.
De plus il est important de savoir que les produits industriels sans gluten ont une liste d’ingrédients beaucoup plus longue que leurs homologues « avec » et renferment quantité d’additifs. Ils sont aussi plus gras et sucrés donc plus caloriques. Mauvais plan pour qui veut maigrir ou manger plus sain ! Ils sont aussi beaucoup plus chers, et ça, c’est mauvais pour le porte-monnaie !
Françoise Rosenpick
Docteur en pharmacie