La rubrique « A votre santé », animée par Raymond Taube, rédacteur en chef d’Opinion Internationale et directeur de l’IDP – Institut de Droit Pratique, vous propose chaque semaine (hors vacances scolaires) des conseils bien-être pour une santé équilibrée. Une chronique de Françoise Rosenpick, docteur en pharmacie.
Régulièrement, surtout au printemps ou après les fêtes, la cure détox arrive en une des magazines et en tête de gondole de la parapharmacie. Ces cures nous promettent un nettoyage de notre organisme avec, à la clé, bien-être, forme, belle peau et pourquoi pas perte de poids.
Qu’en est-il réellement ? Ces cures sont-elles vraiment bénéfiques ou bien n’est ce qu’un business florissant ?
Quelle que soit la cure proposée, l’objectif revendiqué est toujours de « débarrasser l’organisme des toxines accumulées ». Mais quelles toxines ? Si on analyse bien les argumentaires, les « toxines » à éliminer ne sont jamais clairement identifiées, ni d’ailleurs les mécanismes par lesquels se fera l’élimination. Cela rend l’efficacité difficile à prouver…
Et d’ailleurs de quoi parle-t-on ? Une toxine est par définition « une substance toxique élaborée par un organisme vivant auquel elle confère un pouvoir pathogène ».
Le terme « toxines » utilisé par les fabricants se réfère-t-il aux polluants, aux métaux lourds, aux médicaments, aux mauvaises graisses ? Ces imprécisions ont, à défaut d’apporter de la crédibilité, l’intérêt de multiplier les indications : que vous souhaitiez faire une pause après les fêtes, perdre du poids, améliorer vos performances sportives, vivre plus longtemps, mieux dormir, avoir une belle peau…, la cure détox est faite pour vous…
Essayons d’y voir plus clair. Comment fonctionne naturellement notre organisme pour assurer son « nettoyage » ? Les deux acteurs principaux sont le foie et les reins.
Le foie, par l’action de la bile qu’il fabrique, va émulsionner les graisses et conjuguer les substances toxiques présentes dans le système digestif avec les sels biliaires pour qu’elles soient ensuite éliminées dans les selles.
Les reins éliminent les déchets toxiques présents dans le sang, qu’ils proviennent du fonctionnement de l’organisme (acide urique, urée, créatinine) ou qu’il s’agisse de médicaments ou autres substances chimiques qui auraient échappé à l’action du foie.
En plus de ces fonctions de nettoyage, le foie participe à l’absorption des nutriments par le système digestif, à la régulation de la glycémie et de la coagulation. Les reins, quant à eux, assurent le maintien de l’équilibre en eau et en minéraux, maintiennent un pH sanguin neutre, assurent la régulation de la pression artérielle, la production de globules rouges et de vitamine D.
Le tandem foie-reins est donc bien plus qu’une simple « station d’épuration ». Ce sont deux organes vitaux qui constituent un système extrêmement complexe. S’ils fonctionnent mal, la santé est très vite gravement altérée.
Par conséquence, notre organisme n’a pas réellement besoin de cures de nettoyage et il est surtout important de ne pas faire n’importe quoi pour ne pas risquer d’abîmer notre belle mécanique.
Des bénéfices bien compris
Pour autant, il n’est pas non plus obligatoire de tout rejeter et la phytothérapie a tout de même quelques bénéfices à nous apporter.
En général, les aliments ou compléments proposés durant une cure détox contiennent une quantité appréciable d’antioxydants. La force de ces anti-oxydants ? Ils protègent nos cellules des radicaux libres (molécules instables provoquant des dégâts cellulaires) qui accélèrent le vieillissement des cellules et dont la concentration augmente sous l’effet de diverses agressions comme le stress, la pollution, le tabac, les rayons du soleil etc… Ces radicaux libres peuvent être à l’origine de cancers, de maladies cardio-vasculaires ou de maladies neurodégénératives. Pas inintéressant, donc de se faire une petite cure d’anti-oxydants de temps en temps.
D’autre part, certains végétaux aident de façon notable le foie à faire son travail. Ce sont les plantes cholérétiques (qui stimulent la production de bile) ou cholagogues (qui favorisent la sécrétion de la bile) qui vont donc faciliter la digestion. Certaines sont aussi hépato protectrices et vont, dans une certaine mesure, protéger les cellules du foie.
Enfin, la plupart des cures détox s’accompagnent (ou se composent) de tisanes ou jus de plantes, ce qui n’est pas plus mal car beaucoup d’entre nous ne s’hydratent pas suffisamment. Le défaut d’hydratation n’entraîne pas à court terme une baisse de la filtration rénale mais provoque par contre une augmentation de la concentration des urines en déchets et une irritation des reins qui peut entraîner à long terme une insuffisance rénale.
Pour résumer, la cure détox n’est pas magique, elle ne compense pas d’éventuels excès. Utilisée ponctuellement et de façon modérée, elle peut apporter un petit bénéfice. Mais attention aux extraits de plantes : en surdose, ils peuvent aussi entraîner des effets indésirables.
Par contre, il est vivement conseillé de faire très régulièrement une « cure détox » de son garde-manger et de son frigo pour les vider des aliments trop gras, raffinés, sucrés et salés et de les remplir d’aliments sains.
Mieux vaut prévenir que guérir. Si on ne fait pas d’excès, pas besoin de les compenser et les végétaux ont toutes leurs propriétés lorsqu’ils sont dans notre assiette. Et boire un litre et demi d’eau tous les jours est très recommandé tout le temps pour protéger ses reins.
Toutes les gélules et extraits végétaux du monde ne remplaceront jamais une alimentation saine et équilibrée. Et franchement, l’artichaut est bien meilleur en vinaigrette qu’en ampoule !
Pour rester en bonne santé, on mange sainement, on boit de l’eau plate, on bouge et surtout on y prend plaisir !
Bonne semaine !
Françoise Rosenpick
Docteur en pharmacie