Il pourrait s’enorgueillir d’être un des seuls ministres qui a donné son nom à deux lois. Même Emmanuel Macron n’a pas eu sa loi Macron 2 (mais il faut ajouter qu’il s’est rattrapé une fois élu président de la République) : Michel Sapin poursuit son engagement pour faire respecter l’éthique et la transparence dans la finance et dans l’économie.
Avec Michel Hunault, ancien député Nouveau Centre de Loire-Atlantique, ancien rapporteur des lois sur le blanchiment et celle de 2007 transposant la convention du Conseil de l’Europe en droit interne, Michel Sapin a créé l’association #StopCorruption dont le président d’honneur est François Hollande.
Pour Opinion Internationale, les deux Michel répondent à quelques questions d’actualité : loi PACTE, gilets jaunes, élections européennes, Brexit.
L’action de #StopCorruption s’inscrit dans le temps, et privilégie deux axes : être en lien constant avec l’enseignement, l’éducation, la recherche universitaire, notamment l’Institut d’Etudes Politiques de Paris, et organiser tous les deux ans un événement international permettant de promouvoir ses valeurs, tout en faisant montre d’exigence dans leur application. #StopCorruption n’a pas vocation à se substituer aux autres associations, notamment celles comme Transparency International et Sherpa qui saisissent la justice dans des cas d’espèce.
Son rôle premier est de contribuer à une plus large appropriation des valeurs qu’elle défend, notamment auprès de la jeunesse. Les deux hommes politiques concentrent ainsi leurs efforts sur la recherche et la sensibilisation des jeunes diplômés dont ils constatent combien, selon Michel Hunault, « ils veulent donner du sens à leur engagement professionnel en s’assurant des efforts de leur prochain employeur en matière d’éthique et notamment de traçabilité des fonds employés ».
Selon l’ancien député de Loire-Atlantique, « la France est aujourd’hui dotée d’un cadre juridique et réglementaire parmi les plus exigeants au monde pour faire respecter l’éthique et la transparence dans les mondes économiques et financiers. » Et Michel Sapin d’ajouter : « le cadre est fixé. L’heure est venue de la mise en œuvre. »
Michel Sapin et Michel Hunault martèlent l’idée que la transparence, l’éthique et la régulation peuvent et doivent être des facteurs de compétitivité. La contrainte seule n’y suffit pas. Il faut aussi convaincre les entreprises que la mise en œuvre d’outils anticorruption est un atout économique. C’est un point fondamental. C’est le combat des deux Michel et de #StopCorruption.
L’actualité offre des opportunités de le rappeler : la loi PACTE de Bruno Le Maire, mais aussi les élections européennes… Les deux dirigeants ne peuvent que se réjouir du renforcement de la coopération au sein de l’Union Européenne, notamment avec la création de listes noire et grise des paradis fiscaux [Opinion Internationale organisait le 4 avril une conférence sur les allers-retours des Emirats arabes unis sur cette liste noire].
C’est un axe qui doit permettre à l’UE de s’affirmer et de gagner en crédibilité. Il est vrai que l’Europe est confrontée au Brexit, dont certains craignent qu’il transforme le Royaume uni en un nouveau paradis fiscal. Néanmoins, Michel Sapin souligne que les Britanniques ont toujours été en pointe dans la lutte contre la corruption. La difficulté provient de ce que les circuits sont communs à la corruption, à la fraude fiscale et au blanchiment. Un Brexit dur, sans accord, n’est pas sans risque, mais l’éthique étant profondément ancrée dans les élites britanniques, il devrait être maîtrisé.
La nécessité de l’éthique dans les affaires est aussi politique : une partie importante de la population, que le mouvement de gilets jaunes a mise en exergue, ne fait plus confiance aux élites, en partie parce qu’elle leur reproche un grave défaut de probité.
C’est aussi le pacte social et politique qui se joue derrière les enjeux de transparence de la finance et de l’économie.
Michel Taube
Images : Guillaume Asskari