Europes
09H55 - mardi 28 mai 2019

Games of Throne européen !

 

Les tractations pour désigner les nouveaux dirigeants des institutions européennes vont commencer mardi entre les chefs d’Etat et au Parlement européen, engagés dans une lutte de pouvoir à l’issue incertaine.

Le président du Conseil, le Polonais Donald Tusk, va lancer ces consultations au cours d’un sommet extraordinaire organisé pour tirer les leçons des élections européennes. Il aura moins d’un mois pour trouver un accord avec le Parlement avant le sommet des 20 et 21 juin.

« Games of Throne va commencer pour désigner qui va obtenir telle fonction », a commenté dimanche soir un des prétendants à la présidence de la Commission européenne, le Néerlandais Frans Timmermans, chef de file des Socialistes.

La référence est de mauvais augure, car la série télévisée est un récit de trahisons, de complots et de massacres dont le surprenant dénouement a déçu les fans.

Les positions affichées avant le sommet pourraient lui donner raison.

La droite pro-européenne du Parti Populaire Européen (PPE) revendique la présidence de l’exécutif bruxellois pour son prétendant, le Bavarois Manfred Weber.

« Nous avons gagné les élections et ce sera le +Spitzenkandidat+ (chef de file, ndlr) du PPE, Manfred Weber, (qui sera) président de la Commission », a soutenu dès dimanche soir Joseph Daul, le président du PPE, lors de la soirée électorale.

Le PPE va réunir ses instances et sept des huit chefs d’Etat et de gouvernement de la famille pour afficher son soutien à Weber, avant le sommet extraordinaire.

« Manfred Weber est en position de leader et nous l’aiderons à obtenir une majorité au Parlement européen », a annoncé lundi la présidente du parti conservateur allemand CDU, Annegret Kramp-Karrenbauer.

 

Eviter une crise

 

Mais le PPE est affaibli. Il a perdu 40 sièges, dont 29 abandonnés par la CDU-CSU, et le chancelier autrichien Sebastian Kurz a été renversé lundi. Suspendu par le parti, le huitième dirigeant, le Hongrois Viktor Orban, est pour sa part hostile à la désignation de Manfred Weber.

 

Plusieurs dirigeants vont tenter de convaincre le PPE de renoncer à son candidat pour éviter une crise. Le Français Emmanuel Macron mène la rébellion, mais il est lui aussi sorti affaibli de l’élection européenne. « Macron a perdu son combat contre Marine Le Pen », ont commenté plusieurs responsables du PPE, interrogés par l’AFP sur cette opposition.

Emmanuel Macron compte sur les soutiens des huit chefs d’Etat et de gouvernement de la famille libérale et il va chercher l’appui des cinq dirigeants socialistes.

Leur chef de file est le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez. Il a été reçu à dîner lundi soir à Paris par Emmanuel Macron et il s’entretiendra mardi avec Angela Merkel avant le sommet européen.

« Un certain nombre de chefs d’Etat vont chercher à torpiller un spitzenkandidat, mais pas le système des spitzenkandidat », a confié un haut responsable européen.

Un vote au conseil est en revanche exclu. « Vous n’allez pas faire voter la France contre l’Allemagne. Ce serait un signe de crise », a-t-il expliqué.

Le Parlement européen se prépare lui aussi à la confrontation. Grands vainqueurs des élections européennes, les Libéraux et les Verts contestent l’automaticité de la désignation du candidat du groupe le plus fort. Mais ils ne veulent pas se faire imposer un candidat choisi par les dirigeants européens.

Le successeur du Luxembourgeois Jean-Claude Juncker à la présidence de la Commission européenne devra obtenir la majorité absolue des suffrages du Parlement soit 376 voix. Or cette majorité est impossible sans le PPE.

Les chances de Frans Timmermans et de la candidate des libéraux, la Danoise Margrethe Vestager, sont donc nulles si le PPE maintient Manfred Weber.

S’il se retirait, un accord serait nécessaire entre les socialistes et les libéraux pour faire élire un de leurs champions. « Mais aucune alliance n’a été conclue entre libéraux et socialistes », remarquent les dirigeants du PPE.

Cinq institutions de l’UE vont changer de têtes au cours des prochains mois: le Parlement début juillet, la Commission, le Haut Représentant pour la diplomatie et la Banque Centrale Européenne en novembre, le Conseil début décembre.

« Une négociation va s’ouvrir pour la répartition des postes et au final, si tout le monde est satisfait, alors l’accord sera fait », a assuré à l’AFP un dirigeant du PPE.

 

Par Christian SPILLMANN – Bruxelles (AFP) – © 2019 AFP

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