Les stars françaises Catherine Deneuve et Juliette Binoche, à l’affiche d’un drame familial du Japonais Hirokazu Kore-Eda, ouvriront mercredi soir une 76e Mostra de Venise prometteuse mais controversée, en raison notamment de la sélection du « J’accuse » de Roman Polanski.
« La Vérité », en compétition pour le Lion d’or, et dans lequel joue également Ethan Hawke, marque le retour derrière la caméra de Kore-Eda, un an après sa Palme d’or à Cannes pour « Une Affaire de famille ». Pour son premier film tourné en France, il met en scène Catherine Deneuve dans le rôle d’une grande actrice qui entretient des relations compliquées avec sa fille, jouée par Juliette Binoche, entre vérités cachées et rancoeurs inavouées.
La cérémonie d’ouverture lancera à 19H00 (17H00 GMT) la compétition d’un festival qui ne manquera pas de stars, de Robert De Niro à Johnny Depp en passant par Penélope Cruz et Antonio Banderas. Cette 76e édition, avec 21 films qui seront départagés par un jury présidé par la réalisatrice argentine Lucrecia Martel, fera la part belle aux productions hollywoodiennes, confirmant l’histoire d’amour entre Venise et les Etats-Unis. La Mostra s’est ces dernières années affirmée comme une rampe de lancement dans la course aux Oscars pour des films comme « Gravity » d’Alfonso Cuaron ou « La la land » de Damien Chazelle, couronnés ensuite par plusieurs statuettes.
Cette année, ce sont les très attendus « Ad Astra », odyssée spatiale de James Gray, ou « Joker », film de super héros de Todd Phillips, qui pourraient reprendre le flambeau.
Brad Pitt incarne dans le premier un astronaute qui s’aventure aux confins du système solaire à la recherche de son père disparu, tandis que Joaquin Phoenix campe dans le second le célèbre ennemi juré de Batman.
Autre film américain en lice, le thriller « The Laundromat » de Steven Soderbergh, l’un des deux films Netflix en compétition, se penchera sur la crise des Panama Papers, avec Meryl Streep, Gary Oldman et Antonio Banderas. « Marriage story » de Noah Baumbach, autre film Netflix, racontera l’histoire d’une rupture amoureuse, avec Adam Driver et Scarlett Johansson.
Indifférence délibérée ?
Mais alors que la plateforme américaine avait occupé l’an dernier le devant de la scène à Venise, avec le Lion d’or remis à « Roma » d’Alfonso Cuaron, c’est cette année davantage la sélection en compétition de Roman Polanski, pour son film « J’accuse », qui suscite la controverse.
Plusieurs voix se sont élevées pour critiquer la présence de ce thriller historique consacré à l’Affaire Dreyfus, avec Jean Dujardin.
Un choix qui indigne les féministes, alors que le cinéaste franco-polonais de 86 ans, exclu de l’Académie des Oscars l’an dernier, est toujours poursuivi par la justice américaine pour le viol d’une adolescente en 1977.
Autre sujet polémique, la présence dans une section parallèle d' »American Skin », le nouveau film du réalisateur américain de « The Birth of a Nation », Nate Parker, acquitté en 2011 du viol d’une étudiante. Cette affaire avait pris de l’ampleur en 2016 après la révélation du suicide de cette dernière.
« Nous savons tous que le monde a changé après #MeToo », a déclaré à l’AFP la fondatrice du groupe de pression Women and Hollywood, Melissa Silverstein. « La question que je pose est +est-ce un manque de conscience ou une indifférence délibérée ? ».
Le Festival a également été attaqué sur le faible nombre de femmes en compétition: seulement deux, la Saoudienne Haifaa Al-Mansour (qui avait présenté « Wadjda » à Venise en 2012) avec « The Perfect Candidate » et l’Australienne Shannon Murphy avec « Babyteeth ».
Parmi les grandes signatures du cinéma présentes sur le Lido, le Français Olivier Assayas viendra de son côté présenter « Wasp Network », sur l’histoire vraie de cinq espions cubains pendant la période castriste.
Son compatriote Robert Guédiguian sera là avec « Gloria Mundi », avec Ariane Ascaride et Jean-Pierre Daroussin.
Cette 76e édition de la Mostra, qui se tiendra du 28 août au 7 septembre, accueillera également le Canadien Atom Egoyan pour « Guest of Honor », le Colombien Ciro Guerra pour « Waiting For The Barbarians », avec Johnny Depp, et le Chinois Lou Ye pour « Saturday fiction », avec Gong Li.
Sophie LAUBIE