Jean-Luc Mélenchon est certain de gagner son procès, bien qu’il le dénonce avec la virulence qu’on lui connaît dans son nouveau livre Et ainsi de suite qui paraît aujourd’hui : s’il est condamné, il déclarera que la démonstration du procès, voire du complot politique, est faite. S’il est relaxé, il en déduira que la preuve de la soumission du parquet au pouvoir est rapportée. Pourtant, un justiciable lambda se comportant ainsi lors d’une perquisition se verrait immédiatement passer les menottes.
Mais Mélenchon n’est pas un citoyen lambda. Il est l’homme du peuple. Il soutient que la vidéo intégrale de la perquisition ne révèle qu’une rébellion très ponctuelle, comme si ses phases de normalité éclipsaient ses accès éruptifs et rebelles, au sens de l’article 433-6 du Code pénal.
L’issue du procès n’occultera pas une autre réalité : politiquement, le patron des Insoumis est sur le déclin depuis l’élection présidentielle et la claque des Européennes en juin 2019, enfermé dans ses contradictions, victime de ses excès, parfois jusqu’à la bouffonnerie. Malgré les apparences, il n’est pas certain que ses lieutenants en soient bouleversés.
Opinion Internationale a consacré plusieurs articles aux dérives politiques de la justice, dérives qui ne concernent pas seulement le procès pénal impliquant des hommes politiques. Nous n’avions pas encore évoqué celui de Jean-Luc Mélenchon, qui s’est ouvert à Bobigny. Notre propos n’est pas ici de disserter sur le fond du dossier, de nous prononcer en lieu et place des juges sur l’éventuel délit commis par le fondateur de La France Insoumise, ni même sur le fait que ce procès puisse être politique. Jean-Luc Mélenchon, tout comme Nicolas Sarkozy ou François Fillon, n’a pas que des amis dans l’institution judiciaire, qui ne supporte pas qu’on puisse la critiquer.
Le comportement de Jean-Luc Mélenchon, qui lui vaut ce premier procès, a pour origine sa rébellion lors d’une perquisition des locaux de La France Insoumise. Il hurlait « la République, c’est moi ». Quelques semaines plus tard, alors que le mouvement des gilets jaunes sombrait dans la violence, il appelait à l’insurrection et déclarait son admiration pour le grand penseur politique Éric Drouet. Mélenchon aimerait-il faire tomber la République qu’il dit incarner ?
Depuis qu’il sait qu’il devra rendre des comptes à la justice, le leader de LFI, dont les lieutenants se préparent sous doute en coulisses à une guerre de succession, sombre dans le ridicule, notamment à l’occasion de son voyage quasi mystique en Amérique du Sud.
Comparer son sort parisien à celui de Lula, ancien président de la République condamné à douze ans de prison pour corruption et blanchiment d’argent et emprisonné depuis avril 2018 nous avait paru, pour tout dire, obscène !
Voyant que la mobilisation sociale ne lui profite pas (les élections européennes ont giflé LFI qui se croyait porté par le mouvement des gilets jaunes), Mélenchon a décidé, dans sa stratégie insurrectionnelle, de prendre la voie judiciaire : ce faisant, il contribue à son déclin et à celui de sa formation. Son radicalisme d’extrême gauche a durablement privé son parti de tout espoir d’accéder au pouvoir. Les Français ne veulent pas de son marxisme révolutionnaire et multiculturaliste, quand bien même se peindrait-il en vert.
Jean-Luc Mélenchon a eu ses heures de gloire. Lui qui avait bâti sa campagne présidentielle sur le thème du dégagisme devrait se demander si l’heure n’est pas venue qu’il se l’applique à lui-même, avant que ses ouailles ne soient tentées de pousser vers la sortie le grand leader maximo devenu gênant.
Michel Taube