Un ami vient de nous quitter, il était Libanais et avait connu depuis sa jeunesse les tumultes de son pays. Il est mort en exil sans pouvoir revenir sur cette terre si proche et pourtant éloignée de la France. Devant son cercueil qui allait enfin lui permettre de rentrer au pays me revenaient les paroles que chantait Majida El Rumi « Ya Beirut » et les larmes me montaient aux yeux.
Français, souvenons-nous qu’il existe de l’autre côté de la Méditerranée une terre où depuis un siècle cohabitent trois communautés, aux portes du chaudron de ce Moyen-Orient si compliqué. Certes ce ne fut pas sans conflits, mais toujours l’étrange équilibre permettant aux communautés chrétiennes et musulmanes de vivre ensemble a pris le dessus. Aux portes d’Israël et des zones de conflits de Syrie, ce pays a accueilli successivement les réfugiés Palestiniens puis Syriens. Il est comme un exemple de ce que la survie d’un peuple est lié à sa capacité à croire en lui et ses valeurs fussent-elles la coexistence et l’acceptation, parfois difficile de l’autre.
Cette terre libanaise a un lien si profond avec notre pays et notre langue depuis des siècles que ce peuple phénicien continuait il y a peu à appeler la France « notre mère ». Chaque fois qu’un conflit éclatait, la France était là. Elle y a laissé beaucoup de ses fils, en 1983 l’attentat du Drakkar à lui seul en prit 58. En 2006, c’est l’intervention de la France au Conseil de Sécurité qui permit de sortir Israël d’une malheureuse opération et grâce au renforcement de la force de l’ONU (FINUL) sur le terrain avec 12 000 soldats dont un tiers de Français de rétablir un fragile équilibre aux frontières nord d’Israël.
Au moment où la marmite boue au Moyen Orient, où le drame de la Syrie touche à sa fin dans l’indifférence générale, souvenons-nous de ce qu’aux portes de l’Europe mais aussi aux portes du malheur il existe une ouverture : celle-ci s’appelle le Liban. Il a besoin de notre soutien. Si par malheur il venait à disparaître, emporté par la fureur des combats du Sud comme de l’Est, c’est un peu de notre âme qui viendrait à disparaître, de notre capacité à envisager la coexistence pacifique des peuples. Si près de la terre Sainte, « le Liban est petit mais il est grand dans mon cœur » comme disaient les élèves à l’école.
Merci Samir de m’avoir fait connaitre le cœur de ton pays et bon retour chez toi.
Dominique Trinquand