Cette première phrase du chapitre « L’Orient » des Mémoires de guerre du Général de Gaulle est aujourd’hui plus que jamais d’actualité.
La Turquie, allié des Russes dans le combat en Syrie, en particulier dans la zone d’Idlib, attaque les Kurdes de Syrie dans la région de Rojava. Ces Kurdes du YPG viennent d’obtenir le soutien de l’armée syrienne de Bachar El Assad, lui-même soutenu par la Russie. Cette triangulation met une fois de plus la Russie au centre du jeu en Syrie.
La France a des soldats des forces spéciales sur le terrain qui coopèrent avec les Kurdes mais surtout les Américains lesquels viennent de lâcher en pleine campagne ceux par qui Daesh a été vaincu dans la zone. Ces Kurdes qui gardaient des djihadistes (dont des Français) sont pour les Turcs des terroristes.
Ainsi la complexité de la crise en Syrie éclate maintenant au grand jour. Monsieur Erdogan qui est en situation difficile après la perte des élections communales (six grandes villes dont Istanbul et Ankara) essaye de regagner l’électorat en jouant sur la lutte contre le terrorisme et l’immigration syrienne en Turquie.
Le Président Trump applique son programme de campagne en rapatriant les soldats américains présents en Syrie. Comme la Président Erdogan, il n’est préoccupé que par son électorat. La menace terroriste de Daesh est un sujet qui concerne avant tout les Européens.
Les Européens ont été très solidaires au Conseil de Sécurité de l’ONU vendredi, les cinq pays ayant demandé un arrêt de l’offensive turque. Madame Merkel hier a montré une unité exemplaire avec le Président français, mais que peuvent-ils faire ?
Aujourd’hui l’arbitre de cette situation est Monsieur Poutine grâce à ses liens avec Monsieur Erdogan et Monsieur Bachar el Assad. Le rapprochement initié depuis plusieurs mois par le Président Macron peut trouver ici une expression concrète. Depuis huit ans, l’absence de vision claire des Occidentaux dans cette crise conduit à la conclusion que les Etats-Unis ne sont pas un allié fiable et que la Russie doit être plus proche de l’Europe.
En fait, comme en 1941 « l’Orient compliqué », l’est essentiellement à cause des imbroglios des intervenants extérieurs !
Général (2S) Dominique Trinquand