À un mois des élections municipales, une « sexe tape » coûte à Benjamin Griveaux sa candidature à la Mairie de Paris. Le Macron boy avait droit au respect de sa vie privée comme toute personnalité publique et la violation de tous les secrets (de la vie privée, des correspondances des avocats, en médecine) menacent nos libertés et la démocratie. Plus précisément, que Twitter ait mis jusqu’à hier vendredi après-midi pour rendre inaccessible la vidéo qui a fait tomber Griveaux est profondément scandaleux. Ceci dit, on ne peut se contenter de telles paroles comme tant d’observateurs et d’acteurs de la vie politique les ont assénées hier.
Évidemment, Emmanuel Macron, en imposant à LREM l’investiture de Benjamin Griveaux, n’imaginait pas que son chouchou à la tête d’ange puisse être d’une pareille bêtise, au point d’envoyer la photo de ses parties intimes en activité débordante à une femme, vraisemblablement sa maîtresse, qu’il voulait ainsi conduire à l’extase photographique.
Griveaux le grivois, gamin gâté de la macronie, n’a pas contesté la véracité des images. Du mauvais goût, de la vulgarité, de la gaminerie d’adolescent fraîchement pubère, assurément, mais rien d’illégal : pas de harcèlement, d’agression, de viol, de pédophilie… Le défaut de démenti ne vaut toutefois pas aveu. Dans quelques semaines, nous apprendrons peut-être que tout cela n’est qu’un coup monté (sans jeu de mots). Mais, dans cette hypothèse que nous souhaiterions pour M. Griveaux, alors on aurait pu attendre un démenti cinglant et immédiat de la victime.
Disons-le d’emblée : la diffusion sur Internet de la vidéo d’une partie fine de Benjamin Griveaux est écœurante, choquante et, osons le terme, dégueulasse. Mais elle est ! C’est cela aussi le nouveau monde. Et se contenter de s’horrifier de cette divulgation, c’est ne rien comprendre à ce dit nouveau monde !
Ce qui n’est pas nouveau, en revanche, c’est le bon (et mauvais) ménage qu’ont toujours fait sexe et politique. Dominique Strauss Kahn, dont Griveaux fut le collaborateur, en sait quelque chose. Sauf que DSK fut piégé, alors que Benjamin Griveaux s’est piégé, ou fut piégé par sa bêtise. La politique est un monde impitoyable. Dans notre environnement numérique hyperconnecté, où la frontière entre la vie privée et la vie publique n’existe plus, celui qui veut entrer dans cette arène doit en avoir une parfaite conscience et en tirer toutes les conséquences. L’ex candidat à la mairie de Paris savait-il que l’une de ses ex avait cette vidéo ? Comment pouvait-il risquer de se porter candidat à l’une des mandatures les plus prestigieuses qui soit en sachant qu’il avait diffusé à un copine pareille exhibition ? Certes, envoyer par whatsapp ou sms une vidéo intime à une partenaire sexuelle s’apparente au secret de la correspondance. Mais tout de même, quelle naïveté, ou quel sentiment mal placé de toute puissance d’avoir diffusé de tels « messages » !
Qui peut faire de la politique aujourd’hui ?
Faut-il exiger une absolue exemplarité de la classe politique ? La perfection est-elle humaine ? L’exhibitionnisme de Griveaux aurait tourné d’une manière ou d’une autre à un semblant d’affaire Bill Clinton – Monica Lewinsky aux États-Unis (c’était en 1998).
Aujourd’hui, à l’heure des réseaux sociaux et d’une circulation immédiate de l’information, doublée de fake-news et détournements amplificateurs, ce souci d’exemplarité est devenu malsain, car l’homo sapiens n’est pas un ange. Même Piotr Pavlensky, – arrêtons de dire qu’il est un artiste ! – ce Russe réfugié en France, qui se targue d’avoir diffusé la vidéo fatale à Benjamin Griveaux, n’en est sûrement pas un. Ce grand moralisateur entend « dénoncer l’hypocrisie » de l’ancien candidat à la Marie de Paris, toujours enclin à vanter les valeurs de la famille. Sauf que Piotr Pavlensky ne se présente pas à une élection. Sa morale de caniveau, d’une bassesse que même les plus virulents opposants à Benjamin Griveaux dénoncent unanimement, ne lui vaudra qu’un surplus de notoriété, sauf à revêtir la qualification pénale d’atteinte à l’intimité de la vie privée ou de diffamation. On peut d’ailleurs s’étonner de la lenteur du parquet de Paris, alors que celui de Vienne n’avait mis que quelques minutes à déclencher une enquête contre Mila, à la suite de son « blasphème ». Ce « réfugié russe » est de ceux qui abusent de nos libertés (et d’internet) pour fragiliser notre démocratie.
Bref, c’en est fini du « Faites ce que je dis, mais pas ce que je fais », convaincu que « ce que je fais, vous ne le saurez jamais ».
Autre fait majeur : qu’un député de la nation, Joachim Son-Forget, ait retwitté la vidéo des ébats de Benjamin Griveaux, en dit très long sur certaines faiblesses gravissimes de la macronie. Espérons qu’il sera très lourdement et très rapidement sanctionné par l’unanimité des parlementaires.
Si la légèreté, l’inconscience, la bêtise de Griveaux ne sont pas des fautes pénales, les Parisiens devraient d’autant plus regretter d’être privés, pour si peu en définitive, d’un possible brillant futur maire de Paris, comme le Parti socialiste avait pu regretter les frasques sexuelles de son brillant candidat pressenti à la présidentielle de 2012. Sauf que Benjamin Griveaux n’est pas Dominique Strauss-Kahn et encore moins Bill Clinton, finalement absout par la pudibonde Amérique.
Depuis son investiture fort contestée par LREM, il n’a cessé de décliner dans les sondages. Certes, il a dû faire face à la candidature dissidente de l’excentrique Cédric Villani, mais celui-ci dérive en permanence vers un écolo gauchisme, ce dont Griveaux ne sut à aucun moment tirer parti. Au contraire, il n’a cessé d’implorer vainement le ralliement du dissident.
Benjamin Griveaux est avant tout une erreur de casting. Dans les colonnes d’Opinion internationale, nous avions déjà relevé certaines de ses pratiques peu flatteuses durant sa campagne électorale lorsqu’il piqua littéralement une idée d’une start-up en matière de logement à Paris. Mais surtout, comment Emmanuel Macron, grand maître es communication, n’a-t-il vu ce que tout le monde voyait : son poulain souffrait d’un cruel manque de charisme, de force de conviction et d’entraînement. De l’eau tiède, fade, insipide. L’apparatchik Benjamin Griveaux fut l’un des fondateurs d’En Marche. Mais il n’a jamais eu la carrure d’un leader, d’un meneur. Il n’aurait jamais dû être candidat à la mairie de Paris.
Le tsunami Griveaux
Désormais, il convient de s’interroger sur les conséquences politiques de cette affaire, pour le chef de l’État et pour son parti. Elles pourraient être désastreuses. Le temps d’un grand remaniement dans la macronie, – dont les coulisses des pouvoirs bruissent de plus en plus à Paris pour les lendemains des élections municipales -, devient-elle une question de survie politique pour la dite macronie ? Remaniement gouvernemental ? Dissolution de l’Assemblée Nationale pour envoyer au charbon du pouvoir des opposants coalisés qui remporteraient les législatives, pendant deux années de cohabitation, et protéger ainsi le président de la République en vue de 2022 ? Renonciation du président de la République lui-même à se présenter en 2022 ?
Pour l’heure, les yeux sont tournés vers le scrutin municipal parisien qui se tiendra dans un mois. Qui pour remplacer Griveaux ? Plusieurs noms ont déjà circulé, à commencer par celui de Marlène Schiappa, qui à défaut de popularité (sauf chez les féministes), jouit d’une importante notoriété. Si proche de l’échéance, cette qualité prime sans doute les autres. Mais, prudente, elle y renoncerait selon BFMTV se contenterait d’essayer de conquérir le 14ème arrondissement de Paris. Mounir Mahjoubi, ancien challenger lors de la primaire LREM des municipales, s’est dit disponible.
Si LREM (Emmanuel Macron en réalité) choisissait un second couteau pour remplacer Benjamin Griveaux, cela reviendrait à tirer un trait sur les municipales à Paris, qui de toute manière, étaient fort mal engagées. Mieux vaut perdre par jet de l’éponge, dirait-on en boxe, que par KO. LREM éviterait au moins cette humiliation.
Au bénéfice de qui ? La seule opposition crédible à la maire sortante semble être Rachida Dati. Nous l’avions déjà annoncé il y a trois semaines. Les autres, écolos, cocos, gauchos, auxquels semble s’être joint Villani, devraient in fine négocier leur ralliement à Anne Hidalgo, même si la complexité du mode de scrutin parisien est source d’incertitudes, voire de surprises.
PS contre LR : l’ancien monde reprend du poil de la bête sur la ruine annoncée de LREM à Paris ? L’histoire ne ferait-elle une fois de plus que (re)commencer ?