Monsieur Dominique Restino, vous êtes le président de la Chambre de commerce et d’industrie de Paris. La CCI de Paris a fait des propositions pour Paris, « Nos paris pour Paris », avec 60 mesures, dont 20 sont applicables dans les cent premiers jours de prise de fonction de la prochaine maire. Y en a-t-il une emblématique de la philosophie générale que vous portez ?
Il y a un an, j’ai souhaité faire travailler nos deux commissions d’études, « commerce – tourisme » et « développement économique » pour faire remonter la voix des entreprises. C’est notre raison d’être ici. Nous avons aussi rencontré tout l’écosystème entrepreneurial parisien.
Ce que nous avons souhaité, à partir de quinze grands enjeux, de soixante propositions, c’est mettre en avant vingt idées concrètes applicables immédiatement, dans les cent prochains jours, c’est-à-dire avant l’été 2020 : création d’une agence municipale pour gérer et organiser les travaux dans Paris, mise en place d’un fonds permanent d’urgence pour les commerçants et les chefs d’entreprise en cas de dommages liés à des manifestations, des actes terroristes ou d’autres catastrophes…
Nous demandons aussi l’ouverture de deux grands débats, l’un sur le péage urbain, et l’autre sur la vision de Paris à dix ans. Ces questions devront en effet être traitées dans les prochaines années.
Une proposition a retenu notre attention, celle d’une zone touristique internationale (ZTI) unique dans tout Paris. Qu’en pensent les candidates ?
Plusieurs candidats n’y sont pas favorables ou souhaitent engager une concertation avec les syndicats de salariés sur ce sujet mais d’autres ont inscrit cette mesure dans leur programme et l’idée progresse.
Avec la création de cette ZTI unique, mesure d’équité qui ne défavorise aucun quartier, les commerçants ne seraient pas obligés d’ouvrir en soirée ou le dimanche. C’est eux qui le décideraient.
Vous avez suivi le premier débat entre les candidats à la Mairie de Paris sur LCI le 4 mars. Le moins que l’on puisse dire est qu’ils ont peu parlé d’économie et encore moins des entreprises. Est-ce à dire que l’économie n’est pas la priorité des candidats à la mairie de Paris ?
Un maire a en charge l’ensemble de la population et pas seulement les acteurs économiques. Cela dit, les entreprises et les commerces sont le poumon économique de la cité et, pour cette raison, il faut que l’environnement des affaires soit pris en considération dans un programme municipal.
L’environnement est devenu une priorité pour les électeurs et donc les candidats. Cela vous inquiète ?
Aucunement. La Chambre de commerce de Paris, à travers ses élus, est pour le développement économique, mais aussi pour une croissance responsable. Cela n’est pas incompatible. C’est juste une question de bon sens. Prenez les voies sur berges : aucun candidat ne veut revenir dessus ! Avoir du vert, des jardins dans Paris, nous sommes tous d’accord.
Je ne suis pas pour la décroissance mais je ne suis pas pour la croissance à outrance. Il y a une nouvelle génération qui pose des questions pertinentes et qui nous permet de prendre un peu de recul. C’est ce qu’il faut essayer de faire en proposant des aménagements nécessaires à la bonne marche des entreprises.
Paris a beaucoup souffert depuis seize mois, des manifestations des « gilets jaunes » aux grèves contre la réforme des retraites. Paris n’est plus la même les samedis après-midi dans la plupart des quartiers. La crise du coronavirus frappe aujourd’hui durement l’activité économique de la capitale. Que faut-il faire ?
Oui, Paris a beaucoup souffert. Et vous oubliez de mentionner deux drames : l’explosion due au gaz dans le 9ème arrondissement, rue de Trévise, le 12 janvier 2019. Nous étions là le dimanche 13 au matin avec la maire du 9ème. Et puis bien sûr l’incendie de Notre-Dame. C’est tout un quartier au cœur de la capitale qui souffre encore bientôt un an après.
A chaque fois, nous avons été immédiatement sur le terrain avec les élus, et l’équipe de la Chambre de commerce. Nous avons aussitôt créé un « kit de survie » des commerçants, pour les aider à faire en quelques heures, des déclarations de sinistre et entrer en relation avec les assureurs lorsqu’ils ont subi des dommages comme, par exemple, avec les casseurs lors des manifestations des gilets jaunes. Cette expertise, nous l’avons acquise avec les attentats de 2015, malheureusement.
Le siège de la CCI Paris situé place de la Bourse, est « avant tout » un lieu d’entraide, c’est la maison des entreprises, c’est la maison des entrepreneurs, c’est là où un commerçant doit se sentir chez lui.
Vous avez rencontré la mairie de Paris pour une réunion d’information sur le coronavirus. Qu’en est-il sorti concrètement ?
La crise du coronavirus appelle avant tout des mesures de précaution : il y a d’ores et déjà des événements, des salons qui sont annulés. Donc ce sont des pertes, c’est moins de monde, moins de développement économique.
Le devoir du président de la CCI de Paris est de dire continuons à travailler en prenant le maximum de protections pour soi, les autres, sa famille … Il en va de même avec nos collaborateurs dont nous avons la responsabilité. Et ne cédons pas à la panique.
Avez-vous un message à transmettre à la prochaine Maire de Paris ?
J’espère que la prochaine ou le prochain maire de Paris pourra mettre en œuvre au moins une partie de nos propositions les plus urgentes.
En tout cas, avec les élus de la CCI Paris, je m’engage à accompagner la prochaine équipe municipale pour mettre le cap, avec les entreprises et les commerces parisiens, sur un Paris qui entreprend et innove, au service d’une croissance durable !