Traditionnellement, en temps de crise, a fortiori de guerre, le peuple se rassemble derrière son chef. Emmanuel Macron vient de progresser de 14 % dans le dernier sondage de popularité. On est encore loin de l’union sacrée, même si dans les cercles du pouvoir, on ne cesse de l’implorer. « Pas de polémique ! » On connaissait le « pas d’amalgame » pour éviter d’autres débats.
D’ailleurs, d’autres sondages, plus nombreux, soulignent que l’opinion publique désapprouve la politique du gouvernement contre le coronavirus ! Annonçant probablement la chute prochaine des têtes de l’exécutif… dans sondages évidemment.
On ne peut pas toujours suivre aveuglément le chef dans ses initiatives guerrières. L’Histoire nous le rappelle !
De toute façon, la métaphore guerrière a ses limites. Nous sommes face à une pandémie mal anticipée et mal gérée, où suffisance et mépris, et parfois incompétence et mensonges, ont entaché l’action de l’exécutif et de l’Etat. Tout cela n’incite pas à s’aligner en rang d’oignons derrière Emmanuel Macron et son gouvernent.
Bruno Retailleau chez Les Républicains, Marine Le Pen n’ont pas manqué d’accuser le gouvernement de chaos ! La réalité est que l’exécutif s’est mis en en marche à partir du 12 mars mais que jusqu’à cette date, nous avons pris un à trois trains de retard, de sorte que nous manquons (définitivement ?) de masques, de tests, de médicaments et de respirateurs.
L’Union sacrée ne peut être sollicitée ni obtenue sans sincérité, sans transparence, sans preuve d’efficacité. Et surtout sans adhésion du peuple, sans quoi elle devient dictature. L’Union sacrée ne se décrète pas. Elle se mérite, et elle se vit.
On ne peut d’une part nous priver de libertés fondamentales et d’autre part minimiser la gravité de la situation. La tentation du pouvoir absolu est dans les gènes de la Vème République, et dans sa Constitution (l’article 16). Les mesures d’exception exigent un contrôle du peuple. C’est sous la pression populaire que quelques inflexions à l’arrogance gouvernementale ont été constatées, mais l’obsession de ne pas se désavouer est encore largement partagée par nos dirigeants et ses Comités de notables scientifiques.
Et pourtant, il faudra très vraisemblablement faire bloc face au Covid-19. Car notre plus extraordinaire système de santé du monde et notre fantastique haute administration vont devoir affronter la grande vague du tsunami. Elle n’est pas encore là, et tout porte à croire qu’elle sera dévastatrice. Et quand elle se retirera, elle dévoilera des montagnes de cadavres. Cadavres de personnes, cadavres d’entreprises, malgré les mesures de soutien annoncées. Cadavres politiques aussi, car tapie dans l’ombre de son confinement, Marine Le Pen attend son heure.
Emmanuel Macron ne mérite pas l’Union sacrée. Mais la méritons-nous ? Ne sommes-nous pas devenus un peuple d’assistés qui s’en remet à l’État qu’il croit encore Providence, et qui se retrouve perdu quand cet État se montre défaillant ? Ne sommes-nous pas devenus un peuple qui ne fait plus Nation, une juxtaposition d’individus égoïstes que l’intérêt général laisse indifférents ? Après tout, n’avons-nous pas les dirigeants que nous méritons ?
Nous n’avons plus le choix. Ce n’est pas derrière le pouvoir exécutif, mais avec lui que nous devrons faire face à cette catastrophe et faire l’union sacrée derrière nos soignants.
L’heure d’établir les responsabilités viendra, même si les plaintes pénales se multiplient déjà contre l’Etat, venant surtout de soignants. Celle des remises en causes fondamentales aussi sera nécessaire et avant 2022. En attendant, la fraternité, la solidarité, la détermination doivent guider toutes nos actions. Le premier de cordée doit donner l’exemple. Dans les faits, et non dans le discours. Sans quoi il vaudrait mieux qu’il laisse sa place.