Dans son allocution du 31 mars dans une usine de masques d’Angers, Emmanuel Macron demandait une nouvelle fois l’union nationale face au Covid-19, tout en indiquant que le temps des responsabilités viendra ultérieurement.
Certains n’ont pas fait montre de patience et ont déposé plainte pour « mensonge d’État », ce qui n’est pas une qualification pénale, devant la Cour de justice de la République, qui juge les crimes et délits commis par les membres du gouvernement dans l’exercice de leurs fonctions. D’autres incitent à le faire et on voit fleurir des sites internet consacrés à l’aide au dépôt de plainte pour toute une série de qualifications plus ou moins crédibles.
Il est à noter qu’une plainte devant la Cour de justice de la République est soumise au filtre de la Commission des requêtes, dont la décision est sans recours.
Outre le volet pénal, l’action administrative contre l’État peut être envisagée, cette fois devant le juge administratif. Ce qui est appelé mensonge d’État peut juridiquement relever de la faute engageant la responsabilité de celui qui la commise.
Les faits :
La durée de vie du Covid-19 sur différents matériaux et dans l’air
Le document ci-contre fut diffusé sur le site internet du Département d’Eure-et-Loire courant mars, avant d’être retiré. Mais nous l’avons encore trouvé sur celui d’une radio dépendant de FranceInfo Réunion.
Les déclarations relatives à l’inutilité des masques
Il est évident que le premier « geste-barrière » face à un virus respiratoire est d’éviter qu’il pénètre… les voies respiratoires. Il s’agit donc de se protéger le nez et la bouche. Les yeux seraient aussi à protéger.
L’idéal est de porter un masque de type FFP2. À défaut, un masque artisanal (nombreux tutoriels sur internet, comme celui proposé par le CHU de Grenoble pour ses agents) est largement préférable à rien du tout. Il fallut attendre fin février pour le gouvernement commande des masques à l’étranger, alors que toute la population en portait depuis deux mois dans les pays d’Asie touchés par le Covid-19. Il indique qu’ils sont prioritairement destinés aux personnels soignants, ce qui est exact, et qu’ils sont inutiles pour les autres, même dans des espaces clos comme les transports en commun ou les supermarchés. Sous la pression, et parce que la disponibilité devrait s’améliorer, Emmanuel Macron finira par admettre le 31 mars que tous les professionnels en contact avec le public devraient être équipés d’un masque, même s’il ne s’agit pas d’un modèle FFP2. Mais toujours rien pour la population, pas même un encouragement à recourir au système D, sans doute pas si inefficace, comme l’illustre l’exemple fourni par le CHU de Grenoble. La communication des autorités est inflexible : les masques sont inutiles à ceux auxquels ils ne peuvent être fournis. Pourquoi, dès lors, en avoir commandé 1,5 milliards ?
Le Covid-19 survit dans l’air ambiant durant trois heures (et bien plus, selon une étude japonaise). Le gouvernement continue par conséquent de laisser les Français faire leurs courses et prendre les transports sans se couvrir la bouche et le nez. On notera qu’en Autriche, le port du masque est désormais obligatoire dans les commerces. Peut-on en déduire que notre gouvernement met la population en danger ? Nous verrons un peu plus loin ce que prévoit la loi, mais il faut être conscient que dans un procès, c’est la victime, et non la population, qui demande réparation. Une juridiction n’est pas une commission d’enquête parlementaire.
L’information incomplète sur les autres gestes-barrières
Le Covid-19 survit plusieurs jours sur les surfaces inertes, ce qui implique de prendre des précautions spécifiques. Mais le gouvernement n’a pas modifié ses préconisations en matière de gestes-barrières. On en est resté à se tenir à un mètre de distance, se laver les mains le plus souvent possible, éternuer dans son coude, etc. L’évolution des connaissances sur les modes de contagion ne l’a jamais conduit à revoir ses alertes, alors qu’il fallait, outre la question essentielle des masques, informer le public de la nécessité de désinfecter les emballages, de rincer les fruits à l’eau chaude (plus de 60°), à l’eau savonneuse ou diluée de javel, d’éviter de toucher durant plusieurs jours les vêtements portés dans un lieu clos comme un supermarché ou un bus, ou de les laver, de toaster le pain ou de le passer au four, etc.
La résistance du coronavirus sur les matériaux participe nécessairement à sa contagiosité. Elle relativise l’efficacité des seules mesures de confinement et laisse supposer que la fermeture des frontières aux personnes (mais pas aux marchandises) n’aurait pas empêché la pandémie.
Les voltes-faces d’Agnès Buzyn
Fin janvier, Agnès Buzyn, médecin de son état, est ministre de la Santé. Elle déclare que le risque que le coronavirus se propage en France est « quasiment nul ». Mais quelques semaines plus tard, elle conseille au Premier ministre d’annuler les élections municipales, devant le risque épidémique dont elle semblait pleinement consciente. Pourtant, quelques jours plus tard, elle entre en campagne en lieu et place de Benjamin Griveaux. Cette mascarade, et surtout le soupçon d’avoir dissimulé la gravité de l’épidémie, valent à Agnès Buzyn et à Édouard Philippe une plainte pour « mensonge d’État » devant la Cour de Justice de la République. Elle fut déposée le 19 mars par un collectif de médecins.
Les pénuries actuelles et à venir
Masques, gel hydroalcoolique, tests de dépistage, respirateurs… et quoi d’autres ? Les médicaments, en particulier ceux utilisés en réanimation en en soins palliatifs, éventuellement le fameuse chlorhydrine, au cas où l’on déciderait d’y recourir massivement, certaines denrées alimentaires, puisque l’agriculture et les importations agricoles sont en berne, et que nous vivrions sur nos stocks de blé… Ces différentes pénuries, en particulier si elles sont plus sévères en France que chez nos voisins européens, pourraient inciter ceux qui en sont victimes à demander réparation.
Fondements juridiques des accusations portées contre l’exécutif :
Mise en danger délibérée d’autrui, délit par d’imprudence, de négligence, homicide involontaire…
Article 121-3 du Code pénal Il n’y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre. Toutefois, lorsque la loi le prévoit, il y a délit en cas de mise en danger délibérée de la personne d’autrui. Il y a également délit, lorsque la loi le prévoit, en cas de faute d’imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s’il est établi que l’auteur des faits n’a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait. Dans le cas prévu par l’alinéa qui précède, les personnes physiques qui n’ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n’ont pas pris les mesures permettant de l’éviter, sont responsables pénalement s’il est établi qu’elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d’une particulière gravité qu’elles ne pouvaient ignorer. Il n’y a point de contravention en cas de force majeure. Article 221-6 du Code pénal : Le fait de causer, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, la mort d’autrui constitue un homicide involontaire puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. En cas de violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, les peines encourues sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende. Article 222-19 du Code pénal : Le fait de causer à autrui, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, une incapacité totale de travail pendant plus de trois mois est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. En cas de violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, les peines encourues sont portées à trois ans d’emprisonnement et à 45 000 euros d’amende.
L’article 121-3 du Code pénal est la base de ces incriminations. L’article 221-6 correspond à l’homicide involontaire, lorsque les mêmes fautes conduisent au décès de la victime. L’article 222-19 complète le dispositif en prenant comme critère l’incapacité de travail résultant de la faute d’imprudence, de maladresse, de négligence, etc.
Le second alinéa de l’article 121-3 exige, pour que le délit soit constitué, que la mise en danger d’autrui soit délibérée. Il ne s’agit pas nécessairement d’une intention de nuire. Il suffit d’agir en ayant conscience d’exposer la victime à un risque. Par exemple, il a été jugé qu’une infirmière laissant une élève infirmière injecter une substance dangereuse à un patient commettait une faute caractérisée (Cour de Cassation, 26 juin 2001, DP 2001, Comm n° 124).
Une autre hypothèse visée par l’article 121-3, cette fois à l’alinéa 3, est la faute d’imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement. Si la Constitution, qui détermine les attributions du gouvernement, ne prévoit pas expressément qu’il est tenu de veiller à la santé de chacun, l’article L1110-1 du Code de la santé publique dispose : « Le droit fondamental à la protection de la santé doit être mis en oeuvre par tous moyens disponibles au bénéfice de toute personne. Les professionnels, les établissements et réseaux de santé, les organismes d’assurance maladie ou tous autres organismes participant à la prévention et aux soins, et les autorités sanitaires contribuent, avec les usagers, à développer la prévention, garantir l’égal accès de chaque personne aux soins nécessités par son état de santé et assurer la continuité des soins et la meilleure sécurité sanitaire possible. »
Quand bien même le juge considérerait-il que la loi ne prévoit pas une obligation de sécurité à la charge des membres du gouvernement, ils pourraient néanmoins être poursuivis sur le fondement de l’article 121-3, cette fois à l’alinéa 3. Car comme il est expliqué sur le site de la Cour de cassation, « en l’absence de l’une de ces conditions, une simple faute d’imprudence ou de négligence pourra engager la responsabilité pénale du prévenu. Il suffira alors d’établir, conformément à l’alinéa 3 de l’article 121-3, qu’il n’a « pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait ». Néanmoins, la démonstration d’une faute qualifiée ne sera pas pour autant inutile. La violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité prévue par la loi ou le règlement pourra alors être retenue, non comme élément constitutif, mais comme circonstance aggravante de l’infraction (v. par ex. Crim. 11 sept. 2001, Bull. n° 176, pour un manquement délibéré à une obligation de sécurité retenu à l’encontre d’un médecin anesthésiste, auteur direct du dommage, comme circonstance aggravante). »
Ainsi, même à un moindre degré, l’article 121-3 offre un second fondement juridique à une plainte contre ceux qui auraient négligé de protéger la population par des mesures-barrières nécessitées par la nature du danger, dont ils avaient connaissance.
Non-assistance à personne en péril et défaut de réaction face à un sinistre
Article 223-6 alinéa 2 du Code pénal … Sera puni des mêmes peines (cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende) quiconque s’abstient volontairement de porter à une personne en péril l’assistance que, sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours. Quiconque s’abstient volontairement de prendre ou de provoquer les mesures permettant, sans risque pour lui ou pour les tiers, de combattre un sinistre de nature à créer un danger pour la sécurité des personnes est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende.
Article 223-7 du Code pénal
L’article 223-6 al 2 du Code pénal ne vise pas le danger, mais le péril. Ce qui distingue le danger du péril est la certitude que si l’on n’agit pas immédiatement, malheur arrivera à la victime. Il ne s’agit pas d’une hypothèse, mais d’une certitude à très court terme.
L’article 223-7 s’applique si quelqu’un assiste à un sinistre, par exemple un incendie, sans intervenir s’il le peut, ou provoquer les secours.
Certes, les pouvoirs publics ont négligé d’intégrer aux gestes-barrières celui de protéger les voies respiratoires ou de désinfecter les emballages. Pour autant, pourraient-ils être accusés de ne pas être intervenus ou de laisser le sinistre se propager ? Intervenir, c’eut été, comme en Corée, d’imposer la prise de la température de toute personne entrant dans un lieu clos comme un supermarché, d’imposer le port du masque et le nettoyage des mains avec du gel hydroalcoolique, d’imposer la désinfection des locaux ouverts au public…
Dans un pays « pauvre » ou moins développé, de tels moyens ne peuvent être mis en œuvre. Intervenir pour éviter un péril devrait alors, a minima, prendre la forme d’une information du public pour qu’il puisse lui-même se protéger avec les moyens du bord. Cette information étant manifestement insuffisante, une plainte fondée sur l’article 223-6 pourrait-elle prospérer ? Peu probable, en l’état actuel de la jurisprudence, car les juges considéreraient que la victime était en danger (risque potentiel) et non en péril (risque immédiat certain). Quant à la plainte fondée sur l’article 223-7, elle semble également vouée à l’échec, les pouvoirs publics n’étant pas restés les bras ballants devant l’épidémie.
La responsabilité civile et administrative, et l’indemnisation de la perte de chance
Les articles 1241 et 1242 du Code civil sont le socle de la responsabilité civile depuis Napoléon. Ils furent renumérotés par une « ordonnance Macron » (alors ministre) de 2016. S’ils n’ont, en principe, pas vocation à s’appliquer directement un juge administratif, le principe de réparation du préjudice qui en découle est d’application générale.
Article 1240 du Code civil : Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. Article 1241 du Code civil : Chacun est responsable du dommage qu’il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.
Ces articles signifient que celui qui cause un préjudice à autrui doit le réparer, a fortiori lorsque le préjudice résulte d’une imprudence ou d’une négligence. En pratique, la victime saisit la juridiction compétente, civile ou administrative selon l’adversaire, afin d’obtenir des dommages-intérêts. Dans un procès pénal, la victime, en se constituant partie civile, demande également réparation de son préjudice, comme dans un procès civil.
La difficulté d’établir le lien de causalité entre la faute et le préjudice explique de nombreux échecs des justiciables, en particulier devant le juge administratif, qui bien qu’il s’en défende, semble plus enclin à défendre l’administration dont il est lui-même un représentant, que l’administré.
Néanmoins, en matière civile, la victime ou ses ayants droit peuvent se voir allouer des dommages-intérêts sur le fondement de la perte de chance : celle de ne pas tomber malade, de ne pas décéder, de ne pas perdre son travail avec toutes les conséquences qui en découlent… La justice administrative, qui jugerait la faute de l’État, accepte l’indemnisation de la perte de chance depuis le début des années 2000, principalement à propos des erreurs médicales dans les hôpitaux publics.
Moins spectaculaire et médiatique qu’une plainte pour mise en danger d’autrui, non-assistance à personne en péril, ou « mensonge d’État » l’action en réparation du préjudice fondée sur la perte de chance nous semble avoir plus de chance de prospérer, car les victimes (leurs ayant-droits en cas de décès) n’auraient pas à démontrer que si elles avaient été mieux protégées car mieux informées, elles n’auraient en aucun cas contracté la maladie. Cette preuve est quasiment impossible à rapporter. En revanche, il semble difficile de nier que le défaut d’information augmente le risque de contracter le Covid-19, hypothèse qui correspond à la notion de perte de chance. En ce début avril, les Français ignorent toujours que d’autres gestes et précautions que ceux présentés par les pouvoirs publics les protégeraient mieux. Du moins, ce ne sont pas les pouvoirs publics qui les en informent.
Conclusion : juridiction, commission parlementaire, électeur… Qui sera le vrai juge ?
Bien entendu, les pouvoirs publics peuvent invoquer quelques excuses ou circonstances atténuantes : si des personnes meurent par manque de masques, de respirateurs, de lits de réanimation, si des entreprises se retrouvent en faillite et leurs salariés au chômage parce qu’on a été incapable d’appliquer les recommandations de l’OMS (trouver les personnes contaminées, les tester, puis les traiter) et par conséquent de ne confiner que les personnes infectées, sans arrêter la vie économique et sociale d’un pays, c’est parce Emmanuel Macron et son gouvernement ont hérité d’une situation préexistante, et que la plupart des gouvernements de la planète ont été surpris par la pandémie.
Le gouvernement soutiendrait qu’il n’est pas possible de dimensionner l’hôpital en fonction d’un événement imprévisible et extraordinaire dans sa soudaineté et son ampleur. Il invoquerait également la rétention d’informations de la part des autorités chinoises, tant sur la contagiosité que sur la mortalité du Covid-19. Pourtant, il ne fallait pas être professeur d’infectiologie ou homme d’État visionnaire pour se poser quelques questions, en voyant Pékin et Shanghai vidés de leurs habitants dès le mois de janvier. Ces images, le gouvernement chinois n’a pas cherché à les dissimuler (le pouvait-il ?).
Il est indéniable qu’à travers le monde, de nombreux gouvernements n’ont pas saisi la portée de la pandémie. Début février, l’épidémiologiste Gabriel Leung, président du département de médecine de santé publique à l’Université de Hong Kong, estimait que 60 % de la population mondiale pourraient être contaminés par le Covid-19. En France, politiques et experts préféraient le considérer comme un halluciné. Le 26 février, un premier Français décède du Covid-19, alors que l’épidémie sévit dans le nord de l’Italie. Le 6 mars, Emmanuel Macron, qui semble faire une confiance aveugle à son Comité scientifique, se rend avec sa femme au théâtre pour inciter les Français à ne pas modifier leurs habitudes. Le 12 mars, il annonce la fermeture des écoles, mais le 15 mars se déroule le 1er tour des élections municipales, avec une abstention considérable. Les Français, incapables de comprendre ces injonctions paradoxales, ont préféré piqueniquer dans les parcs, sur les berges des cours d’eau ou en bord de mer.
L’excuse que d’autres n’ont pas fait mieux n’est (en principe) pas recevable devant une juridiction, quand bien même s’agirait-il de la Cour de Justice de la République, si le prévenu est membre du gouvernement. La responsabilité de se dilue pas, ne se divise pas. La faute des uns n’excuse pas celle des autres. En France, scientifiques et politiques ont eu l’outrecuidance d’affirmer que l’épidémie n’attendrait jamais l’hexagone, et que si par extraordinaire cela devait se produire, notre système de santé saurait y répondre. Erreur d’appréciation ou mensonge éhonté ? Ici, nous sommes plus sur le terrain de la politique que sur celui du droit, car il est peu probable que ces arguments soient entendus par une juridiction.
Malgré la matérialité de la faute, s’agissant du défaut d’information quant aux gestes barrières adaptés à la durée de vie du Covid-19 sur différent matériaux, malgré cette fâcheuse tendance à présenter comme inutile ce que l’on n’est pas en mesure de fournir, la perspective d’une condamnation pénale de responsables politiques demeure hypothétique.
Il est vraisemblable que certains responsables aient à s’expliquer devant une commission parlementaire, dont il ne faut évidemment pas attendre de sanctions. Le vrai juge sera-t-il l’électeur ? Emmanuel Macron, mais peut-autre aussi Donald Trump et quelques autres jouent leur avenir politique avec cette crise du coronavirus. Mais rien n’indique que ceux qui ont la critique la plus virulente, même à juste titre, auraient fait mieux, surtout avec leurs solutions simplistes dictées par l’idéologie. Mais ceci est une autre histoire…
Raymond Taube
Rédacteur en chef d’Opinion Internationale et Directeur de l’Institut de Droit Pratique